341. AU DÉPARTEMENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES.

Quartier général Ohlau, 12 avril 1741.

Messieurs de Podewils et de Borcke. J'ai bien reçu votre représentation du 25 de mars, touchant la lettre de l'empereur des Russies sur l'affaire de la Silésie,225-1 que je vous renvoie en original. Elle me paraît, comme à vous, fort significative, et les expressions polies ne m'empêchent point d'en pénétrer le véritable sens. Cependant, il y faut répondre avec toute la civilité imaginable sans faire connaître la moindre aigreur, et vous devez employer tout votre savoir-faire pour insinuer à cette cour que, loin de la soupçonner d'aucune mauvaise volonté, je me repose entièrement sur la solidité et la sincérité de son amitié et alliance, qui a subsisté depuis longtemps entre nous à l'avantage commun, et qui heureusement vient d'être renouvelée; que — l'affaire de Silésie ne regardant pas la succession de feu l'Empereur en général, mais plutôt mes prétentions sur ce pays, sur lesquellesj'ai si souvent offert un accommodement raisonnable, ayant sincèrement à cœur la conservation de la maison d'Autriche et le bien du duc de Lorraine, qui pourrait arriver avec plus de facilité à son but, s'il lui plaisait d'entrer dans ces idées — je n'espère pas moins de la bonté de l'Empereur que de vouloir, par ses bons offices plutôt que par des voies de fait, procurer la réunion et la paix entre moi et la reine de Hongrie, ce qui serait le moyen le plus propre à remplirles engagements contractés avec cette cour pour sa prospérité et conservation, parce que je serais prêt à tout faire pour cette fin, moyennant une satisfaction juste et compatible avec ma gloire; que sachant la bonne volonté du roi de la Grande-Bretagne pour cet accommodement si salutaire aux parties et à toute l'Europe, je me flatte que la cour de Russie y donnerait les mains, avant que de venir à des menaces et aux extrémités, qui ne sauraient qu'avoir des suites funestes à la susdite maison d'Autriche; qu'ainsi je ne doute nullement que l'empereur des Russies et son ministère n'embrassent avec plaisir cette occasion de marquer une égale affection pour les deux parties, en procurant à chacune sa convenance, par les moyens pacifiques et conformes <226>à nos intérêts réciproques et à ceux de l'Europe, où la Russie a une si grande part. Enfin, vous y ajouterez les arguments les plus persuasifs et les plus propres à venir à notre but. Au reste, il faut que Mardefeld travaille avec force pour gagner le comte d'Ostermann, auquel il peut promettre tout ce qu'il jugeraconvenable, soit pour lui, soit pour ses parents. Je suis etc.

Federic.

Nach der Ausfertigung.



225-1 Vergl. oben S. 177 Anm.