469. AU CARDINAL DE FLEURY A ISSY.

Camp de Reichenbach, 24 août 1741.

Monsieur mon Cousin. J'ai reçu avec bien du plaisir la lettre que vous venez de m'écrire, et je vous réitère encore par celle-ci les assurances de la fidélité la plus inviolable à mes engagements. Il est bon de demander quelque fois des éclaircissements, et je ne crois pas que l'amitié en souffre.

Vous apprendrez, Monsieur, par tous les détails que vous aura faits M. de Valory, la façon vive et fervente dont j'embrasse les intérêts du roi de France. J'ai donné des ordres à mes ministres à Francfort d'agir en tout de concert avec le maréchal de Belle-Isle et de suivre au pied de la lettre ses directions. J'ai refusé nettement toute la négociation du sieur Robinson, ne trouvant plus convenable de continuer à la longue un jeu qui ne pouvait être susceptible que d'interprétations malignes auprès de mes alliés et auprès de mes ennemis. Il ne dépendra donc plus que de vous defaire éventer le mystère de notre alliance, et je me verrai flatté bien agréablement de pouvoir me dire désormais à la face de toute la terre l'allié du roi de France; c'est un titre qui me tiendra toujours à cœur, et que je ne troquerai contre aucun avantage du monde.

Quant aux opérations de guerre, je vous dirai que je viens de me rendre maître de la ville de Breslau, où les Autrichiens avaient force intelligences. Assuré de mes derrières par ce poste si avantageux, je me suis avancé sur M. de Neipperg, tant pour l'observer que pour lui porter le coup mortel. Vous verrez pas mesopérations que je ne suis pas médiocrement ami, et que j'agirai avec toute la vigueur possible pour favoriser notre cher Électeur.

Pour ce qui regarde le roi de Pologne, je suis de l'avis qu'on peut en quelque façon le considérer dans ces circonstances comme les acteurs muets de la comédie; dèsque nous serons tous en mouvement, ce prince se trouvera trop heureux de ce que la générosité du roi de France voudra lui distribuer des États de Bohême, Silésie ou Moravie, ainsi que je crois hors d'oeuvre de s'embarrasser beaucoup de lui; je suis même du sentiment que, moins on s'empresse pour l'avoir, plus tôt il viendra s'offrir lui-même.

Je vous prie d'assurer le Roi votre maître de la sincérité de mes sentiments et de la haute estime que j'ai pour sa personne. Vous me <311>trouverez toujours invariable et dans la ferme résolution de témoigner à la France et à son sage Mentor la considération, l'amitié et tous les sentiments avec lesquels je suis etc.

Federic.

Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.