<14> que non seulement ce mémoire dût rester tel qu'il était conçu, mais qu'on l'avait accompagné d'un second mémoire en termes encore plus durs que le premier, qu'on avait envoyés au comte Keyserlingk avec ordre de les présenter tous deux, tels qu'ils étaient conçus, à la cour de Vienne; ce qui étant exécuté, l'Impératrice-Reine en a été extrêmement mécontente et choquée. Si cette anecdote, que je ne vous communique que pour votre direction seule, est exactement vraie, comme elle me l'a été assurée, il se peut que cela fasse encore le deuxième objet des fréquentes conférences du comte de Keyserlingk.

Je me rapporte, au reste, à la dépêche ordinaire des ministres que vous recevrez à la suite de celle-ci pour ce qui regarde les dernières nouvelles que nous avons eues de Hollande touchant les menées du roi d'Angleterre et le succès qu'elles ont eu à ses cours alliées.

Quant au jeune homme qu'on vous enverra pour lui faire apprendre la pâtisserie et mêts de farine, je serai bien aise que vous le fassiez mettre en apprentissage quelques semaines à Vienne et que vous l'envoyiez à la suite à Munich avec recommandation pour pouvoir s'y perfectionner.

Federic.

Nach dem Concept.


5958. AU LORD MARÉCHAL D'ÉCOSSE A COMPIÈGNE.

Potsdam, 13 [juillet 1753].

Enfin mon cher Milord, je me crois sorti d'affaire avec le poète1 et sa nièce qui, comme vous le dites, pourrait bien être une aimable carogne aussi malicieuse que monsieur son oncle. Ces gens ont joué des tours pendables à mon résident Freytag à Francfort-au-Main, et ce dernier rend grâces au Ciel d'en être délivré. Le poète a demandé à la reine de Hongrie d'entrer à son service; celle-là lui a fait répondre ingénieusement que Voltaire n'avait de place que sur le Parnasse, et comme il n'y en avait pas à Vienne, on ne pourrait l'y recevoir convenablement. Sur quoi, le poète s'est adressé au Roi mon oncle, en lui demandant une pension de 800 livres sterling par an; c'était demander sa maîtresse à un héros de roman. Le roi d'Angleterre a fait une mine affreuse à cette proposition et a juré de ne jamais lire les vers d'un poète qui voulait ruiner l'Angleterre. On dit que sur cela Voltaire avait écrit en France pour y négocier son retour, mais que d'Argenson la Guerre2 lui avait écrit qu'il ferait bien de ne pas remettre le pied dans le royaume. Quant à cette dernière circonstance, vous pouvez en être mieux informé que nous le sommes ici, et je vous la mande sous le nombre des on dit.



1 Vergl. Bd. IX, 460.

2 Der Kriegsminister Graf d'Argenson, im Unterschied von seinem Bruder dem Marquis d'Argenson.