<296>courrait avec empressement à toutes les précautions et mesures que la cour de Dresde jugerait à propos de prendre pour faire échouer et pour contrecarrer cette négociation. De vous dire sur quoi cette prétendue négociation doit avoir roulé, c'est que je ne saurais point vous dire, puisque mes avis ne s'en expliquent pas et que je puis bien vous protester sur mon honneur que je n'ai jamais eu les moindres liaisons, ni correspondance aucune avec le susdit Prince, que je [ne] connais d'ailleurs que par réputation, comme un prince qui n'aime qu'à s'étourdir par la crapule, et d'ailleurs fort emporté. Mais, comme il se doit être agi dans les susdites conférences d'intéresser même le Pape dans cette affaire pour donner son agrément à ce que ce Prince évêque soit confiné dans quelque lieu de sûreté, il faut bien que la cour de Dresde en veuille à sa personne et que peut-être ce Prince, étourdi et emporté qu'il doit être, ait menacé dans des moments de sa colère qu'il se jetterait entre mes bras, pour faire valoir ses droits sur diverses principautés de Saxe dont on l'avait privé de la succession. Je ne vous parle sur ceci que par conjectures, mais il faut bien qu'il en soit quelque chose, puisque les comtes Kaunitz et Colloredo ont fait entendre à Flemming que, si ce projet était réel, il serait très difficile d'y parer et qu'ils ne connaissaient d'autre moyen que de tenter encore les voies de la douceur, en adoucissant ce Prince féroce par des moyens capables à le guérir de ses noires idées, de lui ôter ses mauvais conseillers et de le faire environner par des gens affidés, d'autant plus qu'on ne saurait user des violences contre lui sans exciter force de criailleries, et à moins qu'on n'eût des preuves évidentes et des pièces justificatives en main pour le convaincre pleinement de ses desseins, que le comte Kaunitz a qualifiés de pernicieux et de scandaleux. Voilà tout le roman qui a apparemment effectué tant de conférences secrètes, et dont j'ai bien voulu vous informer pour votre direction.

Federic.

Nach dem Concept.


6289. AU PRINCE DE PRUSSE A SPANDAU.

[Potsdam], 13 [avril 1754].1

Mon très cher Frère. Je suis bien aise que l'aventure de vos officiers se soit terminée moins tragiquement qu'on n'avait lieu de le présumer; il faut une punition pour la forme, il faut que le conseil de guerre prononce à la rigueur, mais je modèrerai l'arrêt de façon que les coupables en seront quittes à bon marché.

Si mes conjonctures le permettent, je compte d'assembler encore un camp en automne à Spandau des garnisons voisines et de manœuvrer; je regarde ces sortes de mouvements comme les vrais exercices d'un soldat, et c'est par là que les officiers subalternes acquièrent de l'intelli-



1 Die Antwort des Prinzen von Preussen ist vom 16. April 1754.