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5982. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Potsdam, 4 août1 1753.

Je serais bien aise que vous continuiez de votre mieux d'approfondir de quel œil les cours de France, d'Espagne et de Sardaigne auront regardé le traité conclu entre l'Impératrice-Reine et le duc de Modène;2 car quant au roi de Sardaigne, j'ai de la peine à me persuader qu'il ait été ravi de la conclusion d'un pareil traité, comme le ministre modénois l'a dit en conséquence de votre rapport du 25 dernier.

Sur ce qui regarde l'accommodement de la cour où vous êtes avec celle de Dresde, je sais de bonne main et positivement qu'il n'est point constaté encore; qu'en attendant la Saxe donne toujours de belles espérances qu'elle y apportera toutes les facilités et qu'elle accèdera au traité de Pétersbourg, dès que le roi d'Angleterre y accèderait pour son électorat d'Hanovre. Au surplus, tout s'accroche sur ces sujets à la résolution que l'Angleterre donnera aux propositions de la cour de Russie par rapport aux subsides qu'elle demande pour tenir un corps de troupes prêt en Livonie à la disposition du roi d'Angleterre; et comme il sera fort difficile à celui-ci et à son ministère de disposer la nation et le Parlement à vouloir se charger gratuitement d'un aussi gros fardeau que les susdits subsides, le terme de l'accession de la Saxe au traité de Pétersbourg et par conséquent son accommodement avec la cour de Vienne saurait être encore assez éloigné.

Je crois savoir à présent ce qui aura fait le sujet des fréquentes conférences que le comte Keyserlingk a eues avec les ministres d'Autriche, puisqu'il m'est revenu de bon lieu3 qu'il y a depuis une convention nouvellement conclue entre les deux cours impériales4 pour perpétuer les engagements défensifs, stipulés contre la cour ottomane par l'article secrétissime du traité de Pétersbourg, anecdote sur laquelle je vous demande un secret absolu.

Quant aux affaires de Turquie, j'ai appris que rien ne paraît encore à la Porte dont on saurait inférer une rupture prochaine avec la Russie, mais que la fermentation recommençait à paraître dans les intrigues du Sérail, et que le Grand-Visir était de nouveau menacé d'en être pour son poste; qu'il s'y couvait une espèce d'agitation dans l'intérieur du gouvernement, quoiqu'on ne saurait pas prévoir encore contre qui éclaterait l'orage; qu'au surplus le ministère ottoman n'était pas sans inquiétude par rapport aux progrès des établissements russiens en Ukraine, qui ne laissaient pas de lui donner à penser. Mais ce qui mérite une attention particulière, c'était que les ministres de Vienne et d'Angleterre avaient eu ordre de faire expliquer la Porte sur le fond qu'il y avait à faire sur elle, quant au maintien de la paix avec ses voisins respectifs.



1 In der Vorlage verschrieben: juillet.

2 Vergl. S. 20.

3 Bericht Plesmann's, Dresden 31. Juli, nach zwei Berichten Funcke's an Brühl, Moskau 28. und 30. Juni.

4 Vergl. Martens, Recueil des traités conclus par la Russie I, 183.