<330>

6335. AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.

Potsdam, 14 mai 1754.

Après vous avoir suffisamment instruit par la dépêche ordinaire d'aujourd'hui du département des affaires de ce qui m'est revenu par des lettres de Vienne sur ce qui regarde les arrangements militaires de la cour de Vienne qui paraissent suspendus, je me borne présentement à faire mes réflexions sur la situation des affaires générales et sur ce qu'on en doit présumer par rapport à l'avenir.

Je pénètre parfaitement que, tandis que le nouveau Parlement anglais n'aura pas pris consistance, tout restera tranquille, mais, dès que ledit Parlement aura pris consistance et que la cour de Londres sera assurée de sa supériorité dans le Parlament, alors les grosses rubriques commenceront. La cour susdite commencera de parler d'un ton haut, et celle de Vienne emploiera tout, afin de voir si elle ne pourra disposer l'Angleterre de lui fournir les moyens et les subsides nécessaires, afin de pouvoir m'envelopper partout, et alors il ne faut plus douter que les troubles commenceront et que la combustion embrasera la plus grande partie de l'Europe. Il est vrai que la cour de Vienne commence peu à peu d'être intriguée sur les affaires de l'Italie et d'en appréhender les suites, de sorte qu'il est à voir encore ce que cela effectuera, et c'est pourquoi je désire aussi que vous vous appliquiez bien à approfondir bien tout ce qui se négocie en Angleterre relativement aux affaires d'Italie, afin de m'en faire souvent des rapports exacts. La seule chose qui saurait arrêter encore un nouveau feu de guerre, est que le roi d'Angleterre ne se sente pas assez de santé pour être en peine qu'il ne pourrait assez vivre pour voir la fin des nouveaux troubles.

En attendant, je me [persuade] que dans le cours de cette année-ci tout restera tranquille, parceque la grosse cloche, savoir l'argent d'Angleterre, ne saura pas sonner.

Voilà en raccourci le système que vous devez vous mettre devant les yeux afin de diriger en conséquence vos recherches et d'appliquer toute votre attention, pour me faire vos rapports à ces sujets.

Au reste, mandez-moi, s'il arrive que le nouveau Parlement s'assemble au mois prochain de juin1 si alors encore le roi d'Angleterre passera dans ses États d'Allemagne.

Federic.

Nach dem Concept.


6336. AU LORD MARÉCHAL D'ÉCOSSE A PARIS.

[Potsdam], 15 [mai 1754].

Je suis bien fâché, mon cher Milord, de vous avoir mis dans un assez mauvais compromis avec les cuisiniers de Paris,2 je vous en demande bien pardon, mais je n'en doute pas moins que vous n'en sortiez à votre satisfaction, ou plutôt à la mienne.



1 Vergl. S. 329.

2 Vergl. S. 250.