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6441. AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.

Potsdam, 24 août 1754.

M'étant revenu de bonne main qu'une quantité très considérable de ducats avait depuis peu pris cours tout à coup en Livonie, de manière que la différence qui en résultait pour le change et la valeur desdites espèces, était notable, en tant que le ducat qui y avait circulé autrefois pour trois écus d'Allemagne, était tombé à deux écus et seize gros monnaie d'Allemagne, et que des marchands étrangers les échangeaient pour ce prix, sur quoi il courait un bruit universel en Livonie qu'il s'était fait une remise de trois millions de livres sterling d'Angleterre à Riga, et que c'était de là que s'originait l'abondance des ducats, j'ai bien voulu vous faire part de cet avis et vous mettre ainsi à même de pouvoir approfondir sur vos lieux s'il se pourrait que pareille remise en argent eût été faite d'Angleterre à Riga ou à Pétersbourg, et vous me ferez votre rapport si, le cas supposé, la cour d'Angleterre y est intéressée, ou bien si les marchands d'Angleterre se seraient avisés de pareil expédient pour faire la balance des marchandises provenantes de Russie.

Federic.

Nach dem Concept.


6442. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.

Potsdam, 24 août 1754.

Ma dernière lettre vous doit avoir déjà appris combien je suis mal édifié des dépêches pour la plupart stériles et nullement intéressantes que vous m'avez faites depuis le départ de milord Maréchal. Vous deviez savoir de quelle importance m'est le poste que je vous ai confié, et en connaître les obligations, ayant été assez longtemps à même de les apprendre; mais le dernier rapport du 12 que vous m'avez envoyé, et qui ne m'a rien appris que ce que les gazettes imprimées en ont fait au public, m'a tellement frappé que je suis entré en doute si peut-être je m'étais trompé en mon attente à votre égard. Sachez que je ne voudrais point entretenir à Paris quelqu'un sous le caractère de ministre qui ne voudrait faire que le métier de simple gazetier. La routine que vous avez eue pendant tout le temps du ministère de milord Maréchal, vous devrait faire comprendre que vous deviez être maintenant bien actif et appliqué pour m'instruire par vos dépêches de tout ce qui peut intéresser mon service et de ce qui regarde les affaires de la cour où vous êtes. Ce serait une défaite à pure perte que de vouloir vous excuser sur le défaut de matières intéressantes; une cour telle que de la France ne manque jamais d'en fournir à ceux qui font attention à tout et qui connaissent à en juger avec discernement.