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6469. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.

Potsdam, 28 septembre 1754.

La dépêche que vous m'avez faite du 17 de ce mois, m'a été fidèlement rendue. J'ai été véritablement frappé de l'insolence du clergé de France, telle que vous me l'avez accusée, et surtout les propos que l'archevêque de Paris a tenus au sujet de la déclaration du Roi touchant le rappel de son Parlement, m'ont fait horreur.1 Il serait bien à souhaiter que le Roi apprît à connaître bien par là ces gens, et qu'il les contînt dans les bornes qu'il faut par son autorité, et toute la France se verrait bientôt calmée et tranquille à ce sujet.

Comme je viens d'apprendre de très bonne main les particularités suivantes touchant la négociation en Russie par rapport à la convention de subsides à faire avec l'Angleterre, savoir que le sieur Guy Dickens avait reçu par un courrier arrivé de Vienne une lettre du secrétaire d'État comte Holdernesse, par laquelle celui-ci l'avait chargé dans des termes forts de dire au nom du Roi son maître au grand-chancelier Bestushew :

Que les demandes faites par la Russie dans son contre-projet de la convention des subsides, étaient exorbitantes et inadmissibles, et que, quant au mémoire y joint du ministère russien, on l'avait trouvé tel qu'on avait jugé convenable de n'y faire aucune réponse. Qu'il fallait qu'on n'eût guère compris l'intention de Sa Majesté Britannique, sans quoi, entre autres, on n'aurait pas omis dans le contre-projet les paroles : ou aucn de ses alliés, que l'on avait insérées avec dessein dans le projet anglais.2 Qu'au reste la Russie ne devait s'en prendre qu'à elle-même, si elle laissait échapper cette occasion d'obtenir un secours aussi considérable en argent pour l'affermissement du bon système. Qu'il pouvait cependant ajouter à cette déclaration qu'au cas qu'on fût disposé en Russie à accepter encore purement et simplement les conditions proposées dans le projet anglais, lui, Guy Dickens, était tout prêt et autorisé par sa cour à signer d'abord ce projet.

Le comte Holdernesse a chargé exprès le sieur Guy Dickens de représenter au Chancelier de bouche, aussi énergiquement que possible, et de se garder absolument de donner la moindre chose par écrit làdessus. Le sieur Guy Dickens ayant informé le comte Bestushew du contenu de cette dépêche, celui-ci s'est d'abord récrié sur l'impossibilité de traiter une affaire de cette importance, sans que le ministre anglais donnât sa réponse par écrit ou la dictât du moins ad protocollum.3 Sur quoi, le sieur Guy Dickens, le comte Bestushew et le ministre saxon Funcke, qui était présent, sont convenus entre eux sous la foi du secret, pour ne pas commettre le premier avec le ministère de Londres, que



1 Vergl. S. 428.

2 Vergl. S. 193 Z. 11 v. u. mit S. 357 Z. 21 v. o.

3 Vergl. S. 350.