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6509. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION HELLMUTH- BURCHARD DE MALTZAHN A STOCKHOLM.

Potsdam, 6 novembre 1754.

La dépêche que vous m'avez faite du 22 du mois dernier, m'a été bien rendue, par laquelle j'ai vu avec une surprise extrême ce que le baron de Hcepken a eu l'attention de vous communiquer du rapport que le baron de Posse lui a fait relativement aux extravagances du sieur de Leutrum et à sa prétendue commission de ma part à l'impératrice de Russie et à quelques-uns de ses ministres.

Vous ne manquerez point de remercier M. de Hœpken par un compliment bien obligeant de ma part de l'ouverture qu'il a bien voulu donner de cette singularité, mais vous l'assurerez en même temps hardiment que tout ce que ledit sieur de Leutrum avait débité à ce sujet, était absolument controuvé et sans fondement, et que je n'avais jamais songé à charger cet homme d'aucune commission pour la Russie. Pour éclaircir aussi le baron de Hcepken d'autant mieux sur le vrai fait en tout ceci, vous lui direz que le baron de Leutrum avait été autrefois en mon service, où il avait fait les fonctions d'adjudant auprès du feldmaréchal de Buddenbrock, mais qu'on l'avait congédié, n'ayant point trouvé en lui de qualités propres pour le militaire. Qu'étant du depuis passé au service de Russie, je n'avais plus entendu parler de lui, sinon à l'occasion de l'affaire malheureuse qui lui était arrivée à Moscou, dont le baron de Hœpken vous a déjà fait le récit et dont la tête lui fut dérangée. Qu'ayant eu après un congé de sa souveraine pour faire un voyage en Allemagne, apparemment pour s'en remettre, il avait passé par mes États, où, en passant, il avait demandé la permission de se faire présenter à moi.1 Je n'avais point voulu le refuser, vu qu'il avait été autrefois en mon service; et qu'à cette occasion, je ne l'avais vu à Sanssouci que pour quelques moments, où les propos n'avaient roulé que sur des compliments et des choses vagues et indifférentes, d'où après il avait continué son chemin dans l'Empire. Et, comme du depuis il avait passé encore à son retour par Berlin et que, sans le voir plus, il avait fait demander vaguement mes ordres, je lui ai fait dire que je n'en avais aucuns à lui donner et qu'il n'aurait qu'à continuer son chemin. Voilà, au vrai, ce qui s'est passé à son égard, et comment pourrait-on croire que, connaissant le caractère de cet homme et le malheur qu'il avait eu en Russie, je me serais jamais avisé de lui confier des choses de conséquence et de le charger de commissions de cette importance que celles qu'il a faussement débitées. C'est pourquoi aussi vous prierez le baron de Hcepken de vouloir bien requérir de ma part le baron de Posse afin qu'il avertisse le sieur Leutrum que, comme je ne lui avais jamais donné aucune commission qui regardait mes affaires, il conviendrait qu'il s'abstînt absolument d'en débiter et de ne se pas mêler de choses qui ne le regardaient en aucune façon.



1 Vergl. S. 246.