6029. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION JEAN-DIDIER DE MALTZAHN A DRESDE.

Camp de Spandau, 8 septembre 1753.

L'exprès que vous aviez chargé de m'apporter votre dépêche du 1er de ce mois, s'est fort bien acquitté de sa commission, et j'ai reçu avec toute la satisfaction possible les pièces très intéressantes que vous y aviez jointes70-4 et qui me seront fort utiles à plusieurs égards. Aussi vous recommandé-je de ménager soigneusement le canal d'où vous avez tiré tout ceci, et de tâcher d'en tirer encore tout le profit que vous pourrez.

L'on doit être frappé, à la vérité, du premier abord qu'on voit le noir complot que mes ennemis ont pensé former contre moi, mais, grâce à Dieu, je sais à présent que le chancelier Bestushew en sera là avec son détestable complot et son projet de convention qu'il aurait souhaité de faire valoir en Angleterre. Car je suis bien aise de vous dire pour votre seule direction que, quand le courrier de Guy Dickens a apporté ce projet détestable au ministère anglais, celui-ci, assez informé déjà de la futilité des bruits qui voulaient m'attribuer un dessein sur le pays d'Hanovre, s'y est refusé constamment et a renvoyé le courrier70-5 au sieur Guy Dickens avec des instructions qui lui ont enjoint de remercier la Russie des bons sentiments qu'elle avait témoignés en faveur<71> de l'Angleterre, dans lesquels on se flattait qu'elle se maintiendrait, mais qu'on sentirait à Moscou que, vu la position actuelle des affaires intérieures de l'Angleterre et à la veille d'une nouvelle élection de Parlement, le ministère ne saurait prendre aucun engagement relatif à des subsides, crainte de mettre la nation de mauvaise humeur et de s'attirer par là des difficultés sur les bras qui pourraient être sujettes à de grandes conséquences pour lui; qu'on espérait nonobstant que la cour de Russie ne laisserait pas de se prêter à tout autre arrangement pour fortifier l'alliance du Nord, et que, si contre tout attente on avait besoin un jour ou autre de profiter des dispositions favorables dans lesquels on se trouvait à Moscou, on espérait qu'on y trouverait également la même façon de penser en faveur de l'Angleterre que l'on y avait actuellement.

Voilà le langage poli, mais déclinatoire pour des subsides, que le ministère anglais a tenu vis-à-vis de la Russie; aussi les subsides énormes que celle-ci a demandés, ont opéré sur le ministère anglais qu'on a pris des mesures de se raccommoder avec moi au sujet des différends par rapport aux prises maritimes qu'on avait faites autrefois sur mes sujets, de sorte que j'ai tout lieu d'espérer que ces différends seront accommodés au premier jour. Ce que je ne vous dis cependant que pour votre direction seule.

Au surplus, quelque désir que j'aie de fortifier mon parti et celui de la France en Pologne,71-1 il faudra toujours que vous me proposiez une certaine somme en argent qu'il faudrait employer en Pologne pour fortifier et augmenter notre parti afin que je sois à même par là de me concerter là-dessus avec la France, ce qui me restait encore de vous dire sur votre dépêche du 28 dernier. D'ailleurs, en fortifiant notre parti en Pologne je n'aimerais pas que les choses vinssent à des éclats, ni qu'on les poussât au point qu'elles dégénérassent en confédérations, ni à des ruptures ouvertes. J'attends que vous vous expliquiez sur tout ceci.

Federic.

Nach dem Concept.



70-4 Bericht Funcke's an Brühl, Moskau 16. Juli 1753, dessen Inhalt das Mémoire ergiebt, das dem Immediaterlass an Lord Marschall vom 14. September, Nr. 6033, angeschlossen ist. Auch die Actenbeilagen des Funcke'schen Berichtes sind gedachtem Erlass vollständig angefügt (S. 80 ff.).

70-5 Vergl. S. 52. 54.

71-1 Vergl. S. 57.