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de penser que vous saurez l'être.1 C'est encore se flatter gratuitement que de croire que l'escadre anglaise ne pourra être prête que longtemps après celle de Brest,2 vu que mes dernières lettres de Londres m'annoncent positivement que l'amirauté en Angleterre avait donné part au ministère que la plus grande partie de la flotte à Portsmouth était prête de mettre à la voile au premier ordre. Au reste, ce que vous me marquez des deux camps qu'on formera à la Sambre et à la Sarre, est bien peu de chose, et dont on n'imposera guère aux ennemis de la France.

Quant à l'opinion de M. de Rouillé qu'il saurait se servir de l'affaire de l'Électeur palatin pour contenir la cour de Vienne et l'intéresser au rétablissement de la paix, je crains bien qu'il ne s'y trompe, et il peut croire que, dès que la guerre se commencera par mer, celle de terre suivra immédiatement et que la cour de Vienne agira conformément aux volontés de l'Angleterre; enfin, que ce n'est point du côté du Palatin de brider la cour de Vienne pour lui faire désirer la paix. Ce que vous insinuerez pareillement à ce ministre, mais toujours avec ce grand ménagement que je vous ai recommandé.

Federic.

Nach dem Concept.


6727. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Potsdam, 8 avril 1755.

J'ai reçu votre rapport du 29 du mois dernier, sur le contenu duquel je veux bien vous dire que je ne présume pas que le gouvernement en Angleterre ne s'embarrasse guère de la circonstance de l'élévation d'Ali-Bâcha au grand-visirat,3 mais qu'il ira toujours son train relativement à la guerre qu'elle a résolu de faire à la France, sans se soucier beaucoup si elle sera de la convenance de la cour de Vienne ou non, qui, dès que les Anglais le voudront et que l'ordre en viendra de Londres, sera obligée d'entrer au branle au gré de l'Angleterre.

Au surplus, je veux bien vous dire, quoique dans la dernière confidence et pour votre direction seule, que, selon de bons avis que j'ai, le ministère de France reste jusqu'à présent encore à cet égard dans une indolence qui est inconcevable, et paraît se flatter de pouvoir conjurer encore l'orage, malgré qu'il soit informé des concerts que le roi d Angleterre cherche à prendre avec ses alliés, des arrangements guerriers qu'il fait en Angleterre, et de ce que la flotte anglaise est prête à mettre à la voile au premier ordre.

Comme je serais bien marri, si ledit ministère se laissait surprendre par sa trop grande indolence, je remets à votre dextérité et votre savoir-



1 Vergl. S. 52.

2 Vergl. S. 93.

3 Vergl. S. 104.