7094. AU MARGRAVE DE BAIREUTH A BAIREUTH.

Potsdam, 22 novembre 1755.

Monsieur mon Cousin, Beau-Frère et Frère. Je suis infiniment obligé à Votre Altesse des ouvertures qu'il Lui a plu de me faire par Sa lettre du 7 de ce mois, au sujet des engagements que mon cousin et beau-frère le margrave d'Anspach vient de prendre avec le roi d'Angleterre. Votre Altesse a les plus justes raisons du monde d'être indignée de ces liaisons contractées malgré Elle. La conduite que la cour d'Anspach a tenue à cet égard, est d'autant plus inexcusable qu'elle a oublié en cette occasion les égards qu'elle me doit en qualité de chef de ma maison royale et électorale et de ses branches, et qu'elle a diamétralement agi en cette rencontre contre les stipulations expresses énoncées dans nos pactes de famille, renouvelés depuis peu avec tant de peine,391-1 et où ladite cour s'est le plus solennellement engagée de ne vouloir prendre aucun engagement avec quelle puissance et de quelque nature que ce puisse être, sans avoir, été préalablement agréé par un consentement unanime. Cependant, je laisse à la considération de Votre Altesse s'il ne vaut pas mieux, dans le moment présent, de dissimuler Son chagrin et Son juste ressentiment à cet égard. La cour d'Anspach a réclamé jusqu'ici par rapport à bien des affaires qui lui importent extrêmement, ma protection et mon assistance. Je les lui ai accordées, autant qu'il m'a été possible; mais je saurai à l'avenir à quoi m'en tenir sur son sujet, et je trouverai bien moyen de lui marquer de la manière la plus sensible, à la première occasion qui se présentera, de m'avoir manqué et d'avoir contrevenu aux engagements les plus solennels et les plus sacrés.

Ce qui, selon moi, doit porter Votre Altesse à ne pas faire éclater d'abord Son ressentiment vis-à-vis de la cour d'Anspach dans cette affaire, c'est que Ses engagements avec la France391-2 ont été malheureusement éventés par le canal de la cour de Vienne, et que celle d'Anspach en est instruite à fond.391-3 Si on allait donc lui reprocher de la part de Votre Altesse les liaisons dans lesquelles elle vient d'entrer avec l'Angleterre, elle ne manquerait certainement pas de récriminer et de se plaindre à son tour des engagements que Votre Altesse a pris avec la France à son insu et sans son consentement. Je conviens, malgré tout cela, que ia cour d'Anspach s'est oubliée envers moi en cette occasion, comme<392> au chef de l'auguste maison de Brandebourg, de la manière la plus marquée et qu'elle ne saurait se justifier à cet égard en aucune façon. Aussi ai-je tout lieu d'être persuadé qu'elle se repentira un jour d'avoir fait ce faux pas, et, si Votre Altesse croit être indispensablement nécessaire d'aviser aux moyens les plus propres pour Se mettre à l'abri des machinations et des trames de la cour d'Anspach et de son ministère, Elle peut compter que les mesures qu'Elle prendra pour cet effet, seront secondées de ma part, autant qu'il me sera possible et qu'il dépendra de moi, le plus efficacement. C'est ce dont Votre Altesse peut être bien assurée, aussi bien que des sentiments les plus tendres d'estime, d'amitié et d'affection avec lesquels je suis à jamais, Monsieur mon Cousin, Beau-Frère et Frère, votre très affectionné cousin, beaufrère et frère

Federic.

Nach dem Concept.



391-1 Vergl. Bd. VIII, 437; IX, 477.

391-2 Vergl. Bd. VIII, 430.

391-3 Vergl. S. 186.