7133. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.

Potsdam, 13 décembre 1755.

Le rapport que vous m'avez fait du 1er de ce mois, m'a été bien rendu. J'ai toute la compassion possible de la malheureuse situation où les affaires de France se trouvent actuellement, qui non seulement est très fâcheuse en soi-même, mais qui met également ses alliés dans<430> une si mauvaise position qu'ils ne trouvent presque plus de sûreté avec elle. Je crois cependant, encore, que, quand les choses deviendront plus sérieuses, il se trouvera au moins encore quelqu'un, soit le Dauphin, soit le prince de Conty ou autre, qui parlera naturellement et sans réserve au Roi, pour lui dessiller les yeux sur la mauvaise administration de ses affaires et sur la situation critique où ses États se trouvent.

Quoique vous me marquez qu'on révoque en doute encore la fâcheuse nouvelle qu'on avait eue de la perte du fort de la Couronne, je crains néanmoins que, sans être un grand prophète, on ne sache justement prédire la perte du Canada, et cela par la raison que du côté de France on n'a pas assez prévu à sa défense et qu'à présent on n'est plus à même d'y porter du secours, et que d'un autre côté les Anglais sont les maîtres absolus là de tout faire et entreprendre.

Au surplus, comme je désire d'avoir quelque portion du sel de china qu'on prépare mieux en France qu'en ces pays-ci, vous devez m'en faire une emplette de quarante de ces petites bouteilles où on le met ordinairement et me l'envoyer au plus tôt mieux. Vous observerez, cependant, de l'avoir de la véritable composition que les Carmes à Rennes — ou je ne sais justement à quelle autre ville de France, ce que vous saurez bientôt — en font, et non pas de celui qu'on fait ordinairement à Paris, vu que ceci ne vaut pas celui que les susdits Carmes préparent.

Federic.

Nach dem Concept.