<131> neutralité arrêtée avec l'Angleterre, pourrait bien vouloir profiter du refroidissement qu'elle suppose devoir peut-être exister dans la conjoncture présente entre moi et la France, pour se tourner de ce côté-là et se rapprocher de cette dernière par quelque négociation secrète, mon intention est que vous devez sonder milord Holdernesse et même lui demander confidemment de ma part que, d'autant qu'il me revenait de toute part d'une manière non équivoque1 que l'Impératrice-Reine ourdit quelque négociation secrète avec les ministres de France et qu'elle paraissait vouloir entrer en liaisons avec la dernière, je priais le susdit lord Holdernesse de vouloir bien me dire son sentiment dans la dernière confidence, qu'en supposant que la Reine-Impératrice changeât de parti et s'accrochât à la France, si alors l'Angleterre saurait compter, malgré cela, sur la Russie et si elle pouvait faire fond sur la cour de Pétersbourg qu'elle ne se laisserait pas entraîner par celle de Vienne à suivre ses impressions, par un motif de prédilection qu'elle aurait plutôt pour la dernière que pour l'Angleterre, et que, comme milord Holdernesse saurait bien s'apercevoir que la chose m'intéressait fort, j'attendais qu'il voudrait bien s'ouvrir confidemment là-dessus envers moi. Vous observerez attentivement la réponse qu'il vous fera, et ne manquerez pas de m'en faire votre rapport fidèle et exact immédiatement à moi.

Federic.

Nach dem Concept.


7287. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH A BAIREUTH.

[Potsdam,] 21 [février 1756].

Ma très chère Sœur. Votre lettre, ma très chère sœur, a achevé de rétablir le calme de mon âme, qui avait été troublée par l'appréhension où j'ai été pour votre précieuse santé. Je vous avoue que je suis tombé de mon haut en recevant une couronne de laurier de vos mains. S'il y avait quelque chose de capable de renverser ma chétive cervelle, c'aurait été les choses obligeantes que vous y ajoutez. Mais je me suis bien vite remis dans mon assiette naturelle, en pensant que l'ombre de Virgile était assez vieille pour radoter, et que dans la cuisine française on fait l'honneur aux jambons de leur donner le laurier comme aux héros. Il n'y a que l'excès d'indulgence que vous daignez avoir pour moi, qui puisse vous faire illusion sur mon sujet; mais, ma chère sœur, en faisant un retour sur moi-même, je n'y trouve qu'un pauvre individu composé d'un mélange de bien et de mal, souvent très mécontent de soi-même, et qui voudrait fort avoir plus de mérite qu'il n'en a, fait pour vivre en particulier, obligé de représenter, philosophe par inclination, politique par devoir, enfin qui est obligé d'être tout ce qu'il n'est pas, et qui n'a d'autre mérite qu'un attachement religieux à ses



1 Vergl. S. 127—129.