<184> Français concerteraient entre eux, j'avais cependant de forts soupçons sur une chose qui, pourvu que mes soupçons fussent justes, méritait qu'on ne perdît plus un moment pour prendre des mesures à rencontre; savoir que, parceque je savais que la France était piquée de ce qu'on leur avait voulu barrer l'entrée en Allemagne, et que d'un autre côté je savais que la cour de Vienne était également piquée, parceque le traité de neutralité avait été conclu sans son aveu, j'ai mes soupçons qu'il saurait être très possible que les Autrichiens et les Français convinssent entre eux d'un traité de neutralité, en conséquence duquel la France enverrait un corps de troupes de 40 à 50,000 hommes, soit de la Flandre française, soit des évêchés, tout droit vers l'Hanovre, tandis que l'Impératrice-Keine mettrait un nombreux corps d'observation sur mes frontières et déclarerait peut-être en Allemagne que l'invasion des Français dans les États d'Hanovre ne regardait l'Empire en aucune façon et que sa tranquillité n'en serait aucunement troublée, parceque c'était une querelle à vider particulièrement entre la France et le roi d'Angleterre. Vous ajouterez qu'à la vérité j'avais bien de la peine encore à croire que l'Impératrice-Reine ferait une démarche autant contraire à ses véritables intérêts, mais, comme les humeurs aveuglent, et quand on suppose qu'une telle chose saurait arriver, qu'on s'en tienne en garde d'une certaine façon. En cela, une des choses les plus principales serait que l'Angleterre s'assurât d'abord et sans perte de temps de la Russie, pour la tenir dans son parti et pour empêcher que les Autrichiens ne l'entraînassent pour agir de concert avec eux, parcequ'il était aisément à comprendre que, dans le dernier cas, la partie liée en contraire serait trop forte pour que nous saurions y résister.

Vous continuerez à dire au lord Holdernesse que, dans la conjoncture présente très critique, il devenait d'un jour à l'autre plus pressant que l'Angleterre envoyât un ministre ici avec lequel l'on pourrait dans de pareilles occurrences s'entretenir d'abord et concerter des mesures.1

Que, d'ailleurs, je laissais à la considération de Milord si dans ces circonstances il ne conviendrait pas aux intérêts du Roi son maître de gagner l'électeur de Cologne, ce qui serait apparemment une chose aisée à faire,2 pourvu qu'on ne ménagerait pas le temps, et qui dans les conjonctures présentes pourrait avoir assez d'influence dans les affaires. Il y a encore une réflexion à faire, c'est si, dans le cas que le traité que la France négocie secrètement encore avec la cour de Vienne, parvînt à sa consistance de la manière que je suppose, il ne serait pas important au roi d'Angleterre de prendre ses précautions touchant les Bavarois,3 dont sans cela la cour de Vienne saura arrêter d'un seul mot la marche de leurs troupes,4 et de prendre ainsi des mesures pour pouvoir se servir de ces auxiliaires, quand on en aura besoin.



1 Vergl. S. 182.

2 Vergl. S. 27.

3 Vergl. Bd. XI, 275. 312.

4 Vergl. Bd. XI, 434.