A.
Projet de réponse à la réplique de l'Angleterre.

Si la cour britannique avait bien voulu examiner, avec encore plus d'attention qu'elle n'a fait, la réponse que la cour de France a confiée à Sa Majesté Prussienne au mois de mars dernier,343-2 concernant les moyens d'accommoder les différends qui subsistent en Amérique entre la France et l'Angleterre, la cour de Londres aurait jugé plus équitablement des vues et des intentions de la cour de France.

Il est certain que le consentement de Sa Majesté Très Chrétienne à remettre les choses en Amérique sur le pied où elles étaient ou devaient être suivant le traité d'Utrecht, a été de sa part une preuve sensible de complaisance pour Sa Majesté Britannique et de son désir de prévenir une rupture entre Leurs Majestés. En effet, le traité postérieur d'Aix-la-Chapelle avait seulement stipulé, à l'article 9, que toutes choses y seraient remises sur le pied qu'elles étaient ou devaient être avant la guerre terminée en 1748. Mais ce n'est point là que se bornent les avantages que la cour de France a offerts à la cour de Londres dans la vue de parvenir à une prompte conciliation. Si cette cour veut se rappeler les conditions d'accommodement contenues dans le mémoire qui lui fut remis le 14 mai 1755 par M. le duc de Mire<344>poix,344-1 elle y trouvera des sacrifices réels que Sa Majesté Très Chrétienne était alors disposée à faire au maintien de l'intelligence entre les deux cours.

La cour de France, qui a toujours procédé dans la négociation avec l'Angleterre avec la bonne foi la plus pure et les dispositions les plus pacifiques, s'est constamment expliquée avec candeur et continuera d'agir par les mêmes principes d'équité et de modération qui ont jusqu'à présent dirigé sa conduite.

Elle déclare en conséquence :

1° Qu'elle ne doit ni ne peut faire ou écouter aucune proposition d'accommodement qui n'aura pas été précédée par l'entière restitution de tous les vaisseaux français pris par la marine anglaise.344-2

2° Que, dans le cas où Sa Majesté Britannique donnerait ses ordres pour cette restitution, Sa Majesté Très Chrétienne sera disposée à rentrer en négociation conformément à sa réquisition du 21 décembre dernier.344-3

3° Mais que la cour de France ne consentira point à se désister de la communication libre de la rivière Saint-Jean, tant par mer que par terre, ni à céder la côte depuis cette rivière jusqu'à Beaubassin.

4° Qu'elle regarde comme formellement contraire à l'esprit et à la lettre du traité d'Utrecht toute prétention de la cour britannique par rapport à l'Acadie, laquelle prétention s'étendrait au delà de la propriété de la partie de la presqu'île où l'Acadie est située.



343-2 Vergl. Nr. 7364 S. 205.

344-1 Vergl. Bd. XI, 168.

344-2 Vergl. S. 204.

344-3 Vergl. S. 32—34.