7661. AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.

Michell berichtet, London 22. Juni: „On continue d'être très satisfait ici, tant de la façon gracieuse avec laquelle Votre Majesté S'explique vis-à-vis de cette courci, que sur les moyens à prendre pour soutenir efficacement les engagements que l'on a ensemble.“

Michell berichtet, London 25. Juni: „En suite des ordres dont Votre Majesté m'a honoré le 8 de ce mois,31-2 … j'ai eu différents entretiens avec les ministres de cette cour sur leur contenu et le dernier aujourd'hui. Ils ont d'abord commencé par me dire qu'ils applaudissaient extrêmement au langage que Votre Majesté avait tenu au sieur Mitchell,31-3 aussi bien qu'à ce que je leur avais dit de Sa part relativement à la position présente des affaires générales;31-4 mais qu'avant d'entrer dans les moyens à prendre pour se garantir des suites que les liaisons des cours de Vienne et de Versailles pourraient produire, ils étaient toujours d'opinion de remuer le verd et le sec pour bien s'attacher la Russie et d'empêcher que les deux cours susmentionnées ne la débauchassent. Il est vrai que la cour de Pétersbourg ne s'explique pas encore d'une façon fort satisfaisante pour celle-ci, le courrier dont j'ai fait mention et qui a apporté des dépêches au prince de Golyzin, ne fait que trop voir que le ministère russien est encore très irrité des liaisons prises avec Votre Majesté, et dans l'opinion qu'en conséquence de ces liaisons, la Russie n'est pas tenue à l'exécution des siennes vis-à-vis de l'Angleterre, vu que l'on prétend à Pétersbourg qu'elles n'étaient calculées que contre Votre Majesté, et que, depuis qu'Elle S'est raccommodée avec l'Angleterre, les engagements de la Russie ne doivent plus exister sur le même pied qu'auparavant; il y a eu même une division dans le conseil de la Czarine de 4 contre 5 pour rompre le traité fait avec l'Angleterre, et ce n'a été que pour la majorité d'une voix qu'on a laissé subsister ce traité, aux conditions d'expliquer cependant à Sa Majesté Britannique qu'on n'entendait pas remplir ses engagements vis-à-vis d'elle sur le même pied qu'avant qu'elle se fût raccommodée avec Votre Majesté. Le ministère russien a même fait remettre ici une déclaration fort extraordinaire là-dessus, que l'on communique à Votre Majesté31-5 par les dépêches que l'on envoie au sieur Mitchell et qu'on m'a montrée. Elle verra donc par ce que Lui dira<32> ce ministre, aussi bien que par la communication des dépêches que l'on a envoyées à Vienne et que l'on fait partir ce soir pour Pétersbourg, les réponses que l'on a données au prince de Golyzin, les amples instructions que l'on a envoyées au sieur Keith pour maintenir le comte de Keyserlingk dans ses bons sentiments à l'égard de l'Angleterre,32-1 pour l'engager à plaider sa cause vis-à-vis de sa cour et pour éviter qu'il ne se laisse séduire par les fausses insinuations des Autrichiens. Votre Majesté verra aussi quel est le langage que l'on fait tenir à Pétersbourg par le chevalier Williams. Outre cela, on envoie des instructions particulières au résident Wolf, par le canal duquel on se flatte de mieux réussir que par l'autre32-2 maîs, comme c'est un secret et qu'une partie des ministres, amis du chevalier Williams, l'ignorent, le lord Holdernesse prie Votre Majesté de n'en pas parler. En un mot, on veut faire ici tout ce qui est humainement possible pour faire entendre raison au ministère russien sur les explications extraordinaires qu'il a données de ses engagements avec l'Angleterre, et on lui fait entendre bien clairement qu'on aurait eu tort de s'imaginer en Russie qu'on les avait pris contre Votre Majesté, mais uniquement contre les ennemis de l'Angleterre, et que, Votre Majesté ne l'ayant pas été et n'ayant pu le devenir qu'en secourant les Français, le traité qu'on avait conclu avec la Russie, ne pouvait pas être calculé contre Votre Majesté qu'au cas qu'Elle Se fût jointe à la France, et pas autrement; que, si on ne veut pas l'envisager sur ce pied-là en Russie, il serait fort inutile à l'Angleterre de lui payer des subsides, mais si, au contraire, ce n'est qu'un peu plus d'argent qu'on y demande, Sa Majesté Britannique n'était plus éloignée d'ouvrir les cordons de sa bourse pour cet effet. Les ministres croient même que ce n'est que dans ce but que les Russes expliquent aujourd'hui si extraordinairement leur traité avec l'Angleterre, et comme ils sont très résolus de ne pas épargner l'argent, ils se persuadent très fort que, par ce moyen, ils ramèneront la Russie au point où ils la veulent avoir, et où il faut qu'elle soit, pour se servir de ses troupes, si on en a besoin pour faire diversion en faveur de l'Angleterre contre toutes les entreprises que la France ou ses alliés pourraient former sur les possessions et États de Sa Majesté Britannique … On y croit également savoir que les lettres qui sont passées de Russie en France, et l'espèce d'instruction qu'a reçue le comte de Golovvkin de bien vivre avec les ministres de France à la Haye,32-3 ne viennent uniquement que de la part du vice-chancelier Woronzow et de sa clique;32-4 or comme ces gens-là ont encore la minorité dans le conseil de l'impératrice de Russie et que d'autre côté le Grand-Chancelier et ses amis s'en tiennent toujours à l'Angleterre, on a fait et l'on continue de faire tout ce que l'on peut pour maintenir ce chancelier dans sa façon de penser, on l'a pris et l'on le prend par son propre intérêt et crédit, on lui a fait voir et fait connaître encore les mauvaises conséquences qui en pourraient résulter, tant pour lui que pour sa souveraine, et, par ce moyen, on espère que, travaillant de son côté, comme il y est si fort intéressé, il ôtera à sa cour tous les scrupules et les jalousies qu'elle peut avoir eus sur les liaisons de Sa Majesté Britannique avec Votre Majesté, et la ramènera entièrement aux intérêts et au système de l'Angleterre … L'on suspend de mettre encore les fers au feu, pour prendre les arrangements proposés par Votre Majesté en cas de défection de la Russie,32-5 on les approuve cependant beaucoup, et les ministres m'ont dit qu'ils y voyaient avec une satisfaction infinie la grande étendue des lumières de Votre Majesté, aussi bien que la justesse de Ses idées; mais comme on se persuade que cette défection n'aura pas encore lieu, malgré tout ce qui paraît et s'en débite, on veut premièrement savoir mieux à quoi s'en tenir là-dessus, avant que de travailler à d'autres arrangements#133; L'on souhaiterait encore ici que Votre Majesté fît usage des amis qu'Elle peut avoir à la cour de Pétersbourg, pour y soutenir les intérêts de l'Angleterre, on se persuade au moins que, malgré que Votre Majesté ne soit pas bien en général dans ce payslà, Elle ne laisse pas d'y avoir toujours quelque bon canal dont Elle pourrait<33> faire usage … L'affaire des dettes de la Silésie a été entièrement finie avant-hier, je l'ai fait annoncer dans toutes les gazettes.“ 33-1

Potsdam, 6 juillet 1756.

Les dépêches que vous m'avez faites du 22 et du 25 juin, m'ont été fidèlement rendues. Si la cour où vous vous trouvez est contente de ma façon de m'expliquer vis-à-vis d'elle, vous pouvez compter que je ne le suis pas moins de son procédé amiable et de la manière ouverte et confidente dont elle agit avec moi, pour soutenir efficacement notre engagement réciproque, ce que vous saurez bien faire entendre de la manière la plus polie aux ministres.

Quant à ma situation ici, je me trouve encore entre la guerre et la paix jusqu'ici. Je ne sais pas dire si la cour de Vienne rompra ouvertement avec moi, mais il faut que cela se développe dans une quinzaine de jours. A la vérité, j'ai eu la nouvelle depuis trois jours, par une lettre écrite de Pétersbourg le 19 de juin,33-2 qu'on venait d'arrêter là tous préparatifs de guerre, soit par terre ou par mer, qu'on avait envoyé ordre au corps de troupes irrégulières qui allait en Livonie, de retourner, et qu'on avait de même enjoint à d'autres régiments d'infanterie et de dragons qui étaient actuellement en marche vers la Livonie, de faire halte; mais, comme ces avis sont trop généraux pour en pouvoir juger précisément, il faut que j'en attende la confirmation, quoiqu'en attendant je ne saurais que présumer que, si ces avis ont accusé juste, il faudra bien que la négociation du chevalier Williams ait eu du succès et qu'au moins il ait eu l'occasion de donner une autre tournure aux affaires de la cour de Pétersbourg; sur quoi il faut bien que nous voyions bientôt plus clair.

Vous remercierez très poliment de ma part milord Holdernesse de toutes les confidences qu'il m'a faites par vous et par les communications que le sieur Mitchell me doit faire;33-3 vous l'assurerez de la manière la plus positive que je n'en abuserais jamais et que je lui en garderais un secret impénétrable, en sorte qu'il n'aura jamais lieu de le regretter.

Vous ajouterez que, quant aux mesures qu'on avait prises pour faire revirer la Russie, je ne saurais que d'y applaudir extrêmement, de sorte que je ne souhaitais [rien si ce n'est] que sa cour y réussisse à son gré. Vous le préviendrez d'ailleurs que je venais de communiquer au sieur Mitchell33-4 bien des détails regardants les finances et les desseins de la France contre l'Angleterre, dont apparemment il ferait son rapport à lui, lord Holdernesse. Pour ce qui regardait la république de Hollande, je serais charmé si l'on pouvait la ramener au bon système, et que j'avais déjà fait expédier mes ordres à mon chargé d'affaires à la Haye d'aller en tout ceci de concert avec le sieur de Yorke,33-5 mais que<34> je n'étais pas encore hors de toute appréhension que les intrigues des Français n'empêchassent les régents de la République de se déclarer favorablement.

Vous ajouterez, quoiqu'en termes très ménagés et avec toute la délicatesse possible, qu'il était à souhaiter que la marine anglaise ne procédât pas selon toute la rigueur contre les vaisseaux commerçants des sujets de la République, vu que, sans cela, il serait à craindre que cela ne mît un grand obstacle à l'alliance à contracter avec la République.

Comme je parlerai aujourd'hui au sieur Mitchell,34-1 je l'entretiendrai de la situation présente des affaires de la Suède, qui se trouvent actuellement dans un état le plus fâcheux du monde,34-2 et je verrai avec le sieur Mitchell ce qu'il y aura à faire.

Quant à mes amis en Russie, vous ferez observer à milord Holdernesse qu'il savait que c'était une nation très mercenaire et que le dernier offrant les avait toujours à sa disposition, de sorte que j'étais obligé de lui dire tout naturellement que, quoique j'eusse eu des amis là, j'avais mes raisons de présumer qu'ils étaient bien changés depuis l'arrivée du sieur Douglas dans ce pays-là.

Au reste, j'ai été bien content d'apprendre que vous avez fini entièrement l'affaire des dettes autrefois hypothéquées sur la Silésie, à la satisfaction de tout le monde; aussi vous pouvez compter que je reconnais comme il faut tous les soins que vous avez employés pour arranger et finir cette affaire conformément à mes intentions.34-3

Federic.

Nach dem Concept.



31-2 Vergl. Bd. XII. Nr. 7551 S. 389.

31-3 Vergl. Bd. XII. 385—389.

31-4 Vergl. Bd. XII, 389—393.

31-5 Vergl. S. 35 Anm. 4.

32-1 Vergl. S. 26. 27.

32-2 Vergl. Bd. XII, 86.

32-3 Vergl, Bd. XII, 390.

32-4 Vergl. Bd. XII, 395.

32-5 Vergl. Bd. XII, 390—392.

33-1 Die von Michell übersandte Quittung der englischen Gläubiger datirt vom 23. Juni.

33-2 Vergl. S. 15.

33-3 Vergl. Nr. 7662.

33-4 Vergl. S. 14. 29.

33-5 Vergl. Bd. XII, Nr. 7604 S. 458.

34-1 Vergl. Nr. 7662.

34-2 Vergl. S. 26. 27.

34-3 Dem Erlass an Michell vom 6. Juli ist ferner der gleiche „Extrait d'une lettre de Paris, le 25 juin“ beigefügt, welcher am 4. Juli an Mitchell übersandt worden war. Vergl. S. 15.