7983. AU MINISTRE DE LA GRANDE-BRETAGNE MITCHELL A BERLIN.

Précis remis à M. Mitchell le 5 de septembre 1756.346-1

Le Roi a été informé par des avis sûrs et authentiques que la cour de Vienne n'a eu d'autre dessein, dans les deux réponses qu'elle lui a données, que de le jeter dans de nouvelles incertitudes et de le mettre dans la nécessité d'en venir à une rupture qu'elle désirait.

Le comte de Kaunitz,346-2 en parlant à quelques amis de la première explication que le sieur de Klinggæffen eut ordre de demander, a dit en autant de termes : qu'étant allé immédiatement après à Schœnbrunn, il avait réfléchi, chemin faisant, sur la réponse qu'il conseillerait à sa souveraine de donner au sieur de Klinggræffen, et qu'ayant cru entrevoir que le roi de Prusse pouvait, en faisant cette démarche, avoir deux objets en vue qu'on voulait éviter également à Vienne, savoir d'en venir à des pourparlers et des éclaircissements qui causeraient d'abord une suspension des mesures nécessaires qu'on était résolu de continuer avec vigueur, ou bien d'amener les choses plus loin et à d'autres propositions et engagements plus essentiels, il avait jugé que la réponse à donner devait être d'une nature qui éludât entièrement la question du roi de Prusse, et qui, en ne laissant plus aucun lieu à des explications ultérieures, fût en même temps ferme et polie, sans être susceptible d'une interprétation sinistre, ni favorable; qu'il suffirait pour cela que l'Impératrice-Reine se contentât de répondre simplement que, dans la forte crise générale où se trouvait à présent l'Europe, il était de son devoir et de la dignité de sa couronne de prendre des mesures suffisantes pour sa propre sûreté, aussi bien que pour celle de ses amis et alliés, sans préjudicier à personne; que cette Princesse avait entièrement approuvé cette réponse, et qu'ayant d'abord fixé l'audience au lendemain, afin de montrer que la demande et la démarche du roi de Prusse ne lui causeraient pas le moindre embarras, elle avait répondu au sieur de Klinggræffen précisément dans les termes susdits346-3 et avait ensuite rompu tout d'un coup l'audience par un signe de main, pour éviter un plus grand détail.

Ce langage, dans la bouche d'un ministre qui dirige aujourd'hui toutes les affaires de la cour de Vienne, prouve bien clairement le plan<347> qu'on avait formé contre le Roi, le dessein de l'exécuter à quelque prix que ce fût, la crainte qu'il ne fût dérangé par une explication amiable, le soin qu'on a pris en conséquence d'éluder la question principale, et enfin les efforts qu'on a faits pour donner au Roi une réponse équivoque et ambiguë.

Il est à observer que c'est cette première réponse, que la cour de Vienne, de l'aveu même de son ministre, a tâché de rendre obscure, qu'elle voudrait faire passer aujourd'hui pour claire et satisfaisante, et à laquelle elle renvoie le Roi uniquement, dans la seconde et dernière réponse qui lui a été donnée.347-1

Une autre particularité non moins intéressante, et qui prouve la mauvaise volonté de la cour de Saxe et du comte de Brühl, c'est que ce ministre, ayant été interrogé sur ce problème : „S'il347-2 ne serait pas quasi plus avantageux pour la Saxe que le roi de Prusse continuât d'être possesseur de la Silésie, que si celle-ci rentrait sous la domination de l'Autriche, sans aucun profit pour la cour de Dresde d'une partie de cette réacquisition,“ en a donné la solution suivante: „Que347-3 les succès de la cour de Vienne ne la rendraient à la vérité pas plus accommodante envers la Saxe, mais qu'on n'aurait pas les mêmes appréhensions avec cette cour qu'on aurait à craindre de la part de la Prusse; qu'il ne fallait d'ailleurs pas désespérer de quelques évènements favorables qui pourraient peut-être se présenter dans la suite, et pour lesquels on ménagerait surtout l'amitié de la Russie.“

Ce discours prouve évidemment que le comte Brühl s'occupait dans ces derniers temps du dessein de nuire au Roi, d'entrer insensiblement dans la guerre que la cour de Vienne intentait contre lui, et de faire participer la Saxe à ses dépouilles; et l'on peut voir par cet échantillon à quoi le Roi aurait eu lieu de s'attendre, s'il avait voulu s'en remettre à la discrétion des Saxons, et que ce sont, par conséquent, les considérations les plus pressantes qui l'ont obligé, malgré lui, à prendre ses précautions à leur égard.

Nach dem Concept von der Hand des Grafen Finckenstein.



346-1 Vergl. die Weisung des Königs zur Abfassung des „Précis“ Nr. 7960 S. 327.

346-2 Der folgende Abschnitt nach dem Berichte Flemming's an Brühl, 28. Juli. Vergl. Nr. 7849 S. 214.

346-3 Vergl. S. 163.

347-1 Vergl. Nr. 7923.

347-2 Nach dem Bericht Flemming's an Brühl, d. d. Wien 18. Juli.

347-3 Nach dem Erlass Brühl's an Flemming, d. d. Dresden 26. Juli.