<80>pourvue des officiers et de la cavalerie. Quelle que puisse être l'armée, elle est digne du Général : il n'a jamais vu l'ennemi et n'a pas la moindre envie de le voir; il est parti pourtant avant-hier pour Riga, c'est mon avis qu'il ne passera pas la frontière, au moins cette année.

Je me suis donné beaucoup de mouvements à contredire tous les mensonges et calomnies de la faction française et autrichienne contre le roi de Prusse, et j'ai tant gagné sur l'esprit de l'Impératrice qu'elle commence à douter; c'est pour cela qu'elle a pris la résolution d'envoyer le comte Iwan de Tschernyschew sous prétexte de résider auprès [de] la reine de Pologne, mais réellement, pour s'informer de la vérité des faits. Ce jeune comte a été autrefois à Berlin, et je puis répondre qu'il est bien intentionné au roi de Prusse; je sais aussi qu'il a des ordres secrets, en cas que l'occasion se présente, de ne montrer aucune aversion aux intérêts du roi de Prusse; en un mot : je suis persuadé que le voyage de ce jeune comte à Dresde pourrait ouvrir un chemin pour rétablir la bonne intelligence entre les cours de Pétersbourg et de Berlin, et comme il est bien intentionné et ne manque pas de bon sens, il conviendra d'avoir des attentions pour lui et même de le traiter avec quelque marque de distinction. J'espère que le roi de Prusse enverra quelque homme de bon sens auprès de lui, à son arrivée à Dresde, pour l'informer de tout ce qui s'est passé dans la Saxe depuis son entrée dans ce pays, et par là de le mettre en état de contredire tous les faux bruits, répandus par la malice des ennemis de Sa Majesté. Le jeune comte est entièrement attaché à Schuwalow, le favori; il doit écrire en droiture à l'Impératrice, et pas aux ministres; il partira d'ici bientôt.

Si Sa Majesté Prussienne m'autorisait de faire des compliments de sa part au Giand-Duc et à la Grande-Duchesse, cela ferait du bien. Je suis charmé de l'approbation dont Sa Majesté m'a honoré.“

Dresde, 28 novembre 1756.

Je vous rends mille grâces, Monsieur, des bonnes nouvelles que vous avez bien voulu communiquer des dernières lettres qui vous sont entre'es du chevalier Williams, et qui ne laissent rien désirer qu'une bonne continuation. Je ne saurais être que très sensible et touché du zèle avec lequel il agit pour moi et pour les intérêts de la cause commune; j'attends tout de sa dextérité, mais il m'obligerait infiniment encore s'il voulait bien prendre le moment convenable pour assurer affectueusement de ma part Leurs Altesses le Grand-Duc et la Grande-Duchesse de toute l'étendue de la plus haute estime et de l'amitié sincère que j'avais pour elles, et qui jamais n'avaient été ni ne seraient altérées. Il peut compter d'ailleurs que, quand le jeune comte Tschernyschew arrivera ici, j'aurai toutes les attentions possibles pour lui et ne manquerai à aucune politesse à son égard. Si, au reste, il y avait moyen que M. le Chevalier nous sache instruire de ce que la cour de Russie voudra faire, à la fin, de ses troupes assemblées en Livonie et en Courlande, je lui en saurais un gré infini. Et, sur ce, je prie Dieu etc.

Federic.

P. S.

N'y aurait-il pas moyen que le chevalier Williams tirât parti des sentiments pacifiques du favori et de son empressement à complaire à