9690. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE A LEIPZIG.

[Breslau,] 14 janvier 1758.

Mon cher Frère. Je vous rends mille grâces de toutes les peines que vous vous donnez pour mes affaires de là-bas et pour les princes d'Anhalt;174-5 j'ai reçu de très bonnes nouvelles de Lehwaldt,174-6 et je me flatte que les Suédois seront les premiers à faire la paix. Le prince Ferdinand a trouvé une si grosse besogne pour remettre cette armée qu'il lui a nécessairement fallu quelque délai pour la faire agir.

Je compte de vous envoyer dans huit ou dix jours une longue dépêche pour ce qui regarde les troupes de Magdeburg,174-7 et, s'il plaît au Ciel, cela ira bien.

Mes deux nièces sont arrivées ici; la joie qu'en a eu mon frère Ferdinand, a pensé lui causer une récidive, il en prit hier des transports au cerveau. J'ai obligé ma nièce à faire la malade,174-8 et je viens de chez lui et l'ai trouvé beaucoup mieux qu'hier. C'est le meilleur enfant<175> du monde; jusque dans son délire, il a les rêves d'un honnête homme. J'ai ici le comte Finck, Knyphausen et d'Argens;175-1 je suis si aise de pouvoir jouir, du moins pendant quelque temps, d'une société douce, pour perdre ce que cette terrible campagne pouvait avoir répandu de sauvage dans les mœurs.

Les Autrichiens se préparent sérieusement à faire la campagne prochaine, et j'en fais de même; si je réussis, je leur opposerai 96,000 hommes et, si cela ne se peut, j'en aurai pour sûr 84, sans compter les garnisons, 22,000 en Saxe et Lehwaldt à part, qui en a tout autant, et alors il faudra dire : « Saute Marquis! »175-2 Il faut pourtant que cette fièvre chaude finisse une fois; le délire a été fort cette année, encore une couple de poudres tempérantes et le retour de la raison ramènera la paix.

Voici une lettre dont je vous prie de vous charger pour ma sœur de Baireuth.175-3

Adieu, mon cher frère, je vous embrasse de tout mon cœur, en vous assurant de la haute estime et de la parfaite tendresse avec laquelle je suis, mon cher frère, votre fidèle frère et serviteur

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



174-5 Vergl. S. 146. 156.

174-6 Vergl. Nr. 9688.

174-7 Vergl. S. 98 und Nr. 9712.

174-8 Wohl gemeint: „a faire la garde-malade“ .

175-1 Vergl. S. 118. 163.

175-2 Vergl. Regnard, Le Joueur, Akt IV, Sc. 10 u. 11 Akt V, Sc. 4.

175-3 Vergl. Nr. 9689.