9909. AU CONSEILLER DE GUERRE CŒPER364-1 A GRÜSSAU.

Finckenstein berichtet, Berlin 4. April, der neuernannte englische Gesandte General Yorke364-2 sei am 1. April in Berlin eingetroffen und werde am 5. seine Reise nach Schlesien fortsetzen.

„Ce ministre est venu me voir, immédiatement après son arrivée, et m'a parlé fort en détail et avec beaucoup de franchise sur la situation des affaires de sa cour et sur la nature de sa commission.

Votre Majesté en jugera Elle-même, par le précis que je vais avoir l'honneur de Lui faire des entretiens que j'ai eus avec lui :

Il a d'abord commencé par me témoigner la joie que lui avait causée la rencontre du baron de Knyphausen à Hamburg,364-3 dont il avait ignoré la destination, et de la mission duquel364-4 il se promettait les suites les plus avantageuses pour les intérêts communs des deux cours; que c'était de lui qu'il avait appris l'ordre que Votre Majesté avait déjà donné au sieur Michell de se prêter aux vues de sa cour pour la signature de la convention proposée,364-5 et que, cette affaire faisant l'objet principal de sa mission, il sentait lui-même qu'elle devenait à présent inutile, mais que le désir qu'il avait toujours eu de faire sa cour à Votre Majesté, et les ordres qu'il avait de Lui donner les assurances les plus fortes de l'amitié et des dispositions du Roi son maître et de sa nation en général, et l'occasion qu'il aurait de pouvoir Lui fournir peut-être des explications satisfaisantes sur les différentes particularités qui y étaient relatives, lui faisaient espérer que ce voyage pourrait être aussi utile pour les affaires qu'il le trouvait en son particulier honorable et flatteur pour lui.

Après ce début, il entra en matière et me dit qu'il ne pouvait pas m'exprimer l'impression singulière et la fermentation qu'avait produites sur l'esprit des ministres anglais, ou plutôt sur celui d'un seul, le parti que Votre Majesté avait pris de surseoir la signature de la convention,364-6 Que c'était proprement le sieur Pitt qui avait été tellement frappé de cet incident qu'il avait cru tout perdu et tout le système renversé, qu'il lui était venu sur cela tout plein de doutes et de soupçons destitués de fondement, et que, comme c'était l'homme qui jouait aujourd'hui le premier rôle en Angleterre,364-7 sa façon d'envisager la chose avait influé sur. tout le reste et avait causé un dérangement et une inaction totale dans toutes les affaires.

Il me fit, à cette occasion, le caractère de ce secrétaire d'Etat, disant qu'on ne pouvait pas lui refuser beaucoup de génie et de très grands talents, mais qu'il avait aussi ses faiblesses et, entre autres, celle d'être un peu défiant et soupçonneux; qu'il avait formé de tout temps la résolution de rendre le pays d'Hanovre une province dépendante de l'Angleterre, qu'il avait eu le bonheur d'y réussir et d'obtenir par là un but que tous ses prédécesseurs avaient manqué; qu'il outrait peut-être à bien des égards une chose très bonne en elle-même, mais que, comme l'idée était chère à la nation et qu'il en était amoureux en son particulier, il n'y avait pas moyen de le faire renoncer à tout ce qui pouvait y avoir la moindre relation, et que c'était là proprement ce qui avait causé son opposition à un transport de troupes anglaises,364-8 et ce qui le porterait constamment à se refuser à cette mesure; que le roi d'Angleterre et une partie de ses ministres auraient vu ce transport avec plaisir, mais que ce Prince, qui avait été autrefois d'une fermeté à toute épreuve, était devenu plus indécis par une suite de son âge avancé, et qu'il préférait aujourd'hui le repos aux tracasseries par lesquelles il faudrait qu'il passât pour nager contre le torrent: circonstance qui augmentait le crédit du sieur Pitt et faisait qu'il était, pour ainsi dire, l'âme et le mobile de tout le ministère anglais; qu'avec cela et après m'avoir parlé tout naturellement de ce ministre, il devait lui rendre aussi la justice qu'il était très<365> bien intentionné pour la bonne cause et aussi zélé que possible pour les intérêts de Votre Majesté, de sorte que lui, Yorke, avait été charmé en apprenant qu'Elle avait eu la condescendance de Se prêter à ses idées, au moyen de quoi il était persuadé qu'il ferait, de son côté, tout ce qui serait dans la possibilité des choses pour entrer dans les vues de Votre Majesté.

Le sieur Yorke ajouta qu'il avait appris que Votre Majesté souhaitait de suppléer au défaut des troupes anglaises par deux objets, dont l'un était l'augmentation de l'armée alliée,365-1 et l'autre l'envoi d'une escadre dans la mer Baltique,365-2 et qne, comme il était convaincu de la solidité et de l'avantage de ces mesures, il pouvait m'assurer d'avance qu'il appuierait sur l'une et l'autre dans toutes ses dépêches.

Qu'au premier égard, il se souvenait que le sieur Pitt lui avait dit une fois dans la chaleur du discours qu'il aimerait mieux augmenter l'armée alliée de 10,000 hommes et charger l'Angleterre de tous les frais de cette augmentation, que d'envoyer un seul Anglais dans le pays d'Hanovre, de sorte qu'il ne désespérait pas que le baron de Knyphausen, à qui il avait fait part de ce propos, ainsi que [de] tout ce qui pourrait le faire réussir dans sa négociation, ne parvînt à régler ce premier point à la satisfaction de Votre Majesté.

Il me parla d'une manière un peu plus vague et plus incertaine sur l'envoi d'une escadre, mais sans désespérer cependant que cette affaire ne puisse réussir également. Il se contenta de me dire qu'elle n'était pas sans difficultés :

1° par la prodigieuse quantité de vaisseaux qu'on avait envoyée en Amérique, où l'on avait prévenu l'arrivée de la flotte française, de sorte que celle-ci, obligée de rester dans les parages de l'Europe, prendrait peut-être le parti de les inquiéter dans la Manche, ce qui les obligerait de lui opposer encore des forces navales de ce côtéci; qu'à cela se joignait

2° La difficulté de trouver un bon port dans la mer Baltique, au cas que l'escadre qu'on voudrait y envoyer, vînt à y avoir un échec, et que c'était à cause de cela qu'on voulait être sûr d'une des trois puissances du Nord, avant que de procéder à cette mesure; qu'il croyait cependant qu'on pourrait trouver moyen de lever ces deux premières difficultés, et qu'on se mettrait peut-être au dessus de l'opposition qu'on craignait de la part du Danemark, pourvu qu'on pût

3° Trouver la quantité de matelots nécessaires pour cette expédition, ce qui causait aujourd'hui un embarras extrême en Angleterre, et ce qui mettrait le plus grand obstacle à toute cette expédition, pour laquelle le gros de la nation et la cité de Londres en particulier était généralement porté, et à laquelle le sieur Pitt ne s'opposerait pas non plus, pourvu qu'on pût trouver moyen de lever ses doutes sur les objets susmentionnés, et que lui, Yorke, pousserait certainement à la roue et ferait de son mieux pour la faire réussir.

Ce ministre me dit ensuite qu'il n'y avait qu'une seule voix en Angleterre sur le sujet de Votre Majesté et sur la nécessité de Lui rester attaché; que tout le monde y était prussien, que le crédit de la maison d'Autriche y était tombé pour toujours, qu'on désirait aujourd'hui de voir Votre Majesté à la tête de toutes les affaires d'Allemagne, et que l'idée du sieur Pitt en particulier était de s'unir plus étroitement que jamais avec Elle et de faire en sorte que cette union ne soit pas momentanée et simplement relative aux circonstances présentes, mais qu'elle puisse être durable, de manière que Votre Majesté reste l'allié intime de l'Angleterre après la paix, tout comme Elle l'a été pendant la guerre.

Qu'en conséquence de ces sentiments, il avait ordre d'assurer Votre Majesté que les secours qu'on Lui avait offerts, ainsi que ceux dont on pourrait convenir encore, soit en argent soit autrement, ne se borneraient pas à la campagne présente, mais qu'on était résolu de les renouveler l'année prochaine, au cas que la paix ne pût pas se faire, et de les continuer, en un mot, jusqu'à la fin de la guerre.

<366>

Qu'il lui avait été enjoint, de plus, de rendre compte à Votre Majesté des mouvements qu'on s'était donnés, et qu'on se donnait encore à Constantinople, pour animer la Porte Ottomane a une levée de bouclier;366-1 qu'il n'y avait pas moyen, à la vérité, de juger avec quelque certitude du succès de cette négociation, puisqu'il s'agissait d'un pays éloigné et sujet à des changements continuels, mais que, le sieur Porter ayant marqué, il y a environ six semaines, que les Turcs ne paraissaient pas contents des deux cours impériales, on lui avait ordonné de profiter de cette disposition pour parvenir à son but, et qu'on lui avait envoyé une lettre de crédit très considérable, comme le meilleur moyen de traiter et de faire réussir les affaires dans ce pays oriental.

Qu'il devait aussi avoir l'honneur de dire à Votre Majesté que, par les mesures qu'on avait prises en Amérique, on avait lieu de se promettre les succès les plus éclatants et une campagne des plus brillantes, et qu'il y avait tout à parier qu'on se rendrait maître du Cap Breton, ou qu'on ferait quelque autre coup d'éclat qui en imposerait à la France et lui ferait sentir la nécessité de songer à la paix.

Qu'il était chargé en particulier de la part du roi d'Angleterre de marquer à Votre Majesté sa vive reconnaissance et de Lui dire qu'il n'oublierait jamais ce qu'Elle avait fait pour lui en lui accordant le prince Ferdinand pour général de son armée, en l'assistant de Ses conseils et en lui fournissant un secours de Ses propres troupes;366-2 qu'il sentait bien que c'était à elles seules qu'il était redevable de366-3 la délivrance de ses Etats électoraux, et qu'en revanche Elle pourrait compter sur lui dans toutes les occasions qui se présenteraient.

Le sieur Yorke ajouta que ce Prince était effectivement si pénétré de la manière dont Votre Majesté en avait agi à son égard qu'il n'en parlait jamais qu'avec une sorte d'extase, et que, le voyant dans ces sentiments dont il pouvait garantir la sincérité, il en avait profité pour lui proposer une question que personne n'avait osé lui faire jusqu'ici, et sur laquelle il avait cependant cru devoir s'éclaircir, avant que de se rendre auprès de Votre Majesté, pour couper court à toutes les difficultés et à toutes les chicanes que la délicatesse pointilleuse du ministère hanovrien pourrait imaginer; qu'il lui avait donc dit que, le cas pouvant arriver que le comte de Clermont, après avoir passé le Rhin et avoir reçu ses renforts, se contentât de faire une guerre défensive de ce côté-là et envoyât un détachement considérable pour agir contre Votre Majesté, soit en Bohême soit du côté de la Thuringe, il serait bien aise de savoir si, dans ce cas, Sa Majesté Britannique voudrait que toute son armée restât rassemblée du côté du Rhin, ou si elle ne permettrait pas qu'on fît alors aussi un détachement proportionné aux forces de cette armée, pour agir en faveur de Votre Majesté, et du côté où Elle le trouverait nécessaire? Sur quoi, ce Prince lui avait répondu, sans hésiter, qu'il en était content, qu'il l'avait même remercié de lui en avoir fait naître l'idée, et lui avait ordonné de déclarer à Votre Majesté qu'Elle pouvait disposer de ses troupes et donner Ses ordres au prince Ferdinand, de la manière qui Lui paraîtrait la plus convenable dans tous les cas qui pourraient survenir.

Enfin, le sieur Yorke m'a parlé du rappel du sieur Mitchell comme d'une chose qui était résolue,366-4 et qui lui faisait de la peine, mais qui pourrait encore être redressée, si Votre Majesté désirait de conserver ce ministre; qu'il était en partie cause lui-même de cette résolution, pour avoir écrit de certaines vérités un peu trop durement, ce qui avait personnellement offensé le sieur Pitt, qui était le seul du ministère qui avait insisté sur son rappel; que le roi d'Angleterre était persuadé qu'on lui faisait tort, et serait charmé qu'il restât; qu'en attendant on lui avait donné ordre de demander à Votre Majesté si Elle agréerait le retour de milord Hyndford,366-5 mais qu'il était persuadé que cette affaire dépendrait en dernier ressort de Votre Majesté et de la manière dont Elle jugerait à propos de S'intéresser en faveur du sieur Mitchell.

<367>

Le sieur Yorke m'a aussi fait faire la connaissance du chevalier Goodrick, destiné pour la cour, de Suède,367-1 et qui doit avoir l'honneur de Lui demander Ses ordres sur la manière de Lui faire parvenir les nouvelles de la Suède, aussi bien que sur les conditions auxquelles Elle pourrait vouloir Se prêter à un accommodement avec la Suède, s'il survenait des circonstances propres à terminer cette affaire.“

[Grüssau, 8 avril 1758.]367-2

Le remercier de cette relation, qui me met au fait de tout.367-3

La communiquer à Mitchell,367-4 pour qu'il sache de quoi il est question.

Federic.

Eigenhändige Weisung; auf der Rückseite des Berichts von Finckenstein.



364-1 Cöper setzte den weiter unten (S. 367. Anm. 3.) genannten Cabinetsbefehl auf.

364-2 Vergl. S. 292. 343.

364-3 Vergl. S. 343.

364-4 Vergl. S. 293.

364-5 Vergl. S. 276. 277. 285. 293. 294.

364-6 Vergl. S. 196. 197. 199. 200.

364-7 Vergl. S. 253.

364-8 Vergl. S. 250. 256. 300.

365-1 Vergl. S. 277. 285. 293. 300.

365-2 Vergl. S. 277. 285. 293. 333.

366-1 Vergl. S. 160. 237. 261. 351.

366-2 Vergl. S. 293. 339.

366-3 Vorlage „à la délivrance“ .

366-4 Vergl. S. 312. 338.

366-5 Hyndford war vom Frühjahr 1741 bis zum Herbst 1744 englischer Gesandter in Berlin gewesen. Vergl. Bd. I, 219; III, 311.

367-1 Vergl. S. 294.

367-2 Das Datum nach der Ausfertigung des Erlasses an Finckenstein.

367-3 Demgemäss ergeht, Grüssau 8. April, ein Cabinetserlass an Finckenstein. Der zweite Theil des Erlasses enthält die in der folgenden Nummer (Nr. 9910) ertheilten Befehle.

367-4 Geschieht mit Cabinetsschreiben, datirt Gnissau 8. April. [Brit. Museum. Add. MSS. 6843 und 6844.]