10264. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.203-5

Blumberg, 1er septembre 1758.

Mon cher Frère. Je ne m'étonne pas que le chasseur vous ait fait une description très confuse de la bataille du 25; pour moi, j'ai eu peine à en concevoir tous les détails. Il s'y est passé tant de choses inouïes qu'on doit avoir beaucoup de difficultés à combiner tant de différents faits; vous serez informé de tout, mais ce qui est très vrai et ce qui paraît incroyable, est que l'ennemi a eu 26,000 morts sur la place, que nous avons 2000 de ses prisonniers, qu'il traîne encore 10,000 blessés avec lui, qu'il a été le jour de l'action 80,000 hommes et moi 37,000, que 8000 hommes commandés par un Rumänzoff et Soltykoff se sont retirés de Schwedt, Stargard et Soldin avec Fermor à Landsberg, que, dans peu de jours, il n'y aura plus de Russe dans le pays.

Quant aux détails, j'ai la carte du lieu, je sais toutes les circonstances, mais des raisons que vous approuverez en temps et lieu, m'empêchent de vous en faire tous les détails : bref, les Autrichiens sont de tous nos ennemis ceux qui entendent mieux la guerre que les Russes les plus féroces203-6 et les Français les plus légers. Je ne saurais vous faire une idée de toutes les barbaries que ces infâmes commettent ici, les cheveux m'en dressent à la tête : ils égorgent des femmes et des enfants, ils mutilent les membres des malheureux qu'ils attrapent, ils pillent, ils brûlent; enfin, ce sont des horreurs qu'un cœur sensible ne<204> supporte qu'avec la plus cruelle amertume. Si le terrain n'était pas aussi difficile dans ces contrées, j'aurais pu mettre une fin plus prompte à tant de calamités; mais les considérations qui m'arrêtent, sont valables, et je me flatte que nos malheurs tirent à leur fin.

Voilà, mon cher frère, tout ce que je puis vous dire à présent, pour satisfaire votre curiosité. Ma cavalerie a fait des merveilles et des prodiges, mon infanterie que j'ai amenée de Silésie, de même.

Je vous embrasse de tout mon cœur, vous assurant de la tendresse infinie avec laquelle je suis, mon cher frère, votre très fidèle frère et serviteur

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



203-5 Die aus dem Monat September erhaltenen Berichte des Prinzen vom 2. bis zum 24. datiren aus dem Lager von Gamig (westl. von Pirna).

203-6 In einem eigenhändigen Schreiben an Keith, datirt „ce 2“ , dankt der König für den Glückwunsch zum Siege über die Russen und schreibt: „Ces gens ne valent pas les Autrichiens, ils n'entendent rien à la guerre, ils ne sont que féroces et barbares.“ Am 3. aus Müllrose dankt der König für die Glückwünsche Schlabrendorff's und fügt eigenhändig hinzu: „Ich habe keine Zeitungen aus Oberschlesien.“