<379> de dragons.1 Convenez, je vous prie, des marques d'une estime sans bornes que je vous ai données en toute occasion, et de mon empressement sincère pour tout ce qui peut contribuer à l'avantage de votre gloire; sauriez-vous donc douter que, s'il n'y avait eu une nécessité absolument indispensable, et à laquelle il n'y a rien eu à changer, que je vous eusse jamais redemandé ce peu de cavalerie qui, en considération de la situation actuelle où vous êtes en comparaison de la mienne, ne saurait guère vous embarrasser, mais qui fait à mon égard un grand article? Je vous ai fidèlement instruit, l'hiver passé, de la situation scabreuse où je me voyais vis-à-vis d'un ennemi si considérablement supérieur en force qui m'environne de tous côtés; ce nombre n'a point diminué: tout au contraire, l'on sait que mes ennemis ont fait leurs derniers efforts pour se rendre bien plus redoutables encore. Malgré toutes les peines que je me suis données pour réparer cette perte en cavalerie que j'ai soufferte à la monstrueuse affaire de Maxen, il m'a été impossible d'y réussir qu'en partie.

Il ne m'est donc resté aucun autre moyen à prendre pour me soutenir, quoiqu'assez faiblement encore, que de me fortifier de ces 10 escadrons de dragons que je vous ai redemandés, au moins pour quelque temps, et jusqu'à ce que ma situation se soit changée en mieux, tant soit peu. Je conviens que cela peut vous causer quelque embarras; mais convenez aussi de la grandeur du mien et s'il n'est pas juste que, comme le plus faible et le plus embarrassé, je dois me servir de la seule ressource qui me reste pour me garantir, quoiqu'assez faiblement encore, des malheurs qui me menacent, et pour la conservation de mes propres États, surtout après que, sur les instances que je vous fis, de vous arranger en sorte pour faire, le cas l'exigeant, quelque diversion en ma faveur du côté de la Thuringe, vous me répondîtes que votre situation ne le permettait absolument point. Balancez, je vous conjure, le nombre des forces ennemies que vous avez vis-à-vis de vous, avec celles contre lesquelles je dois me soutenir; vous trouverez que c'est tout au plus de votre part comme trois contre quatre, savoir 90000 contre 120000 ennemis, au lieu que je me trouve au moins comme un contre deux. Dans une telle situation, je connais trop votre pénétration et votre façon de penser juste, pour pouvoir douter un moment que vous ne voudrez pas vous tranquilliser sur une chose qu'une nécessité très urgente m'a entraîné de faire, à laquelle il m'est impossible de rien changer, à moins de ne vouloir tout-à-fait exposer mes affaires et même celles de la cause commune, si par une trop grande faiblesse en forces je ne saurais faire face à l'ennemi, qui a dessein de m'accabler de tous côtés.

Soyez, au reste, persuadé que, pour peu que ma situation se change en mieux, je n'aurai rien de plus pressé que de vous envoyer ces



1 Vergl. S. 367.