<41> attaché par l'estime et l'admiration que vous doivent, Madame, tous ceux qui ont le bonheur de vous connaître. Je commence à espérer à présent que nous pourrons réussir : les premiers accès de frénésie sont passés, l'épuisement des finances rend les Français raisonnables comme des Platons. Je ne voudrais pas jurer qu'ils restent des Platons, si l'abondance leur revient, mais qu'ils le soient à présent et qu'ils fassent la paix, voilà tout ce qu'on leur demande. Cela ne terminera pas la guerre : les Autrichiens, selon leur noble usage, seront les derniers à s'accommoder; mais ils seront bien obligés d'y venir, dès qu'un allié aussi puissant que la France les aura quittés. J'espère donc que cette année mettra fin à la misère de tant de peuples et aux calamités qui affligent l'humanité d'un bout du monde à l'autre. Voilà, Madame, de quoi je me flatte; voilà ce qui me fait passer sur tout ce que je trouve d'incongru dans mes procédés de vous adresser des lettres qui, contenant de tout autres objets, ne mériteraient pas de passer par vos mains. Je vous en demande encore mille pardons ; mais si mes soins réussissent, l'Europe vous sera sûrement redevable de la paix, que tout ce qu'il y a de sensé désire.

Oserais-je vous prier de ne point laisser apercevoir à Voltaire que vous êtes du secret? Cela pourrait ombrager le duc de Choiseul qui est proprement la cheville ouvrière de tous ces pourparlers, et qui ne voudrait pas peut-être que son secret fût pénétré. Que je serais heureux, si, à la fin de cette horrible guerre, je pouvais être assez heureux que de jouir, comme à Gotha, de tous les agréments de votre conversation, de vous revoir, Madame, de vous admirer encore et de vous témoigner de vive voix tous les sentiments etc.

Federic.

Nach dem Abdruck in den Œuvres, Bd. 25, S. 601.


11776. AU FELD-MARÉCHAL PRINCE FERDINAND DE BRUNSWICK.

Freiberg, 24 janvier 1760.

Vous m'avez si sensiblement obligé par la communication de la lettre de M. Choiseul à Vienne,1 à la suite de celle que vous m'avez écrite du 20 de ce mois, que je ne saurais assez vous en remercier; elle m'a été extrêmement instructive, de sorte que je ne saurais assez vous prier de vouloir bien continuer à me communiquer tout ce qui vous entrera de nouvelles sur de pareils sujets qui m'intéressent si fort. Votre Altesse verra, au moins, par là la nécessité urgente où je me trouve dans ma situation présente, et combien j'ai lieu d'appréhender une nouvelle campagne. Je puis cependant bien dire en confidence à Votre Altesse que la France, nonobstant qu'il n'en éclate rien encore,



1 Vergl. dieses Schreiben in dem Cabinetserlass an Knyphausen Nr.11777.