<61>sible que des forces si supérieures que nous aurons contre nous et de tant de côtés, ne nous prennent au dépourvu de l'un ou de l'autre côté. Les véritables effets de cette situation ne se feront sentir qu'au mois de juin ou de juillet, lorsque les Russes commenceront d'agir.

Ce sont ces malheurs que je prévois et que je voudrais prévenir; je n'y vois aucun autre moyen que celui de détacher la France, puisque cela paraît le plus facile par l'empressement qu'elle témoigne pour la paix. Voici les conséquences qui en résulteront, si l'Angleterre peut s'accommoder avec la France. Les subsidiaires de la France tomberont avec elle, comme la Suède et quelques Princes de l'Empire. Une partie de l'armée aux ordres du prince Ferdinand, ne fût-ce que 40000 hommes, qui ferait des démonstrations pour m'assister, paraîtrait aux yeux de la cour de Vienne et de Russie mettre tout l'équilibre dans nos forces, pour ne pas plus se natter de remporter sur moi des avantages faciles, et cela peut-être pourrait les obliger que, se voyant abandonnés de la France, de prêter à la fin les mains à la proposition de la paix.

Vous aurez vu par mes dépêches précédentes que la cour de Vienne et celle de Pétersbourg, séduite par l'autre, se roidissent orgueilleusement contre toute pacification et qu'elles déclinent le congrès auquel on les avait invitées; elles nous tracent par là le chemin que nous devons suivre, et nous indiquent que c'est aux Français que nous devons nous attacher. Il est certain que ce colosse, formé de tant de parties hétérogènes, tombera dès qu'on commencera à les séparer.

Au surplus, vous devez vous attendre que, de ce côté-ci, nos opérations et celles des Autrichiens commenceront à la fin de mars qui vient.

J'avais oublié de vous dire que la résolution, prise par les ministres anglais, d'ordonner au général Yorke de s'expliquer d'une façon certaine avec le comte d'Affry, est très sensée et bien pensée, pour entendre au moins ce que ces gens diront, et, pourvu qu'on entende seulement les Français et qu'ils commencent à parler, on n'aura pas de la peine de comprendre bientôt où ils en veulent, et ce qu'on peut s'en promettre.

Vous ne manquerez pas de faire votre usage de tout ce que cette ma dépêche comprend, envers M. Pitt et les autres ministres, et j'attendrai non sans impatience le rapport que vous m'en ferez.

Voici tout ce que j'ai cru pouvoir vous écrire, pour vous mettre non seulement au fait de la situation véritable des affaires, mais aussi de ma façon de penser sur des points dont il vous importait d'être instruit. Je ne doute point que vous n'agissiez avec tout le zèle et toute l'ardeur et que vous n'employez également l'adresse et la persuasion dans une conjoncture de la plus grande importance pour l'État. Vous pouvez être assuré que je vous tiendrai compte de toutes vos