<91> détachement de 20 000 Russes qui doit agir du côté de Glogau. Si tout le corps de Fouqué s'oppose aux barbares, Beck suivra et se mettra à dos des Prussiens; si tout n'y marche pas, le corps prussien n'aura de poste sur les frontières de la Lusace que celui de Lœwenberg ou de Hohlstein.1 Ces opérations commenceront, à ce que l'on croit, à la fin de mars, mais ce n'est pas à ceci que se borne le projet de nos ennemis. Soltykow avec sa grande armée, dès que la saison le permettra, s'entend en juin, marchera le long de la mer en Poméranie, pour assiéger Colberg, et lorsque Daun verra que toute l'armée prussienne est occupée de tous côtés, surtout si elle souffre quelque part un échec, il enverra Marschall avec 15000 hommes d'Olmütz, pour assiéger Neisse.

Ce sont certainement là les idées que nos ennemis se flattent d'exécuter, et il ne faut point perdre ces objets de vue, pour se ménager les facultés de s'y opposer. Que pouvons-nous opposer à tout ceci?

Une armée en Saxe, une armée en Silésie. Celle de Silésie doit au commencement couvrir Glogau ou Breslau, profiter des moindres fautes des Russes et, s'il se peut, leur faire souffrir quelque échec, avant que la grande armée puisse commencer ses opérations, tenir les lieux difficiles et abandonner les plaines, car les Russes ont pour principes de ne point attaquer et de marcher par les bois, jamais par les plaines. Ou s'il leur arrivait de marcher par des plaines, peut-être les circonstances fourniraient-elles l'occasion de les battre. La principale attention contre eux doit consister à leur empêcher de prendre un pied, de prendre des forteresses; ainsi Colberg et Glogau font pour cette partie-là les points de vue les plus importants. Les magasins de cette armée ne peuvent être qu'à Stettin pour Colberg, Küstrin et Glogau. Du corps qui reste à Landeshut, on pourra, selon le besoin, détacher vers Neisse plus ou moins, selon que cela sera nécessaire.

Quant aux affaires de la Saxe, si les Français font la paix, comme ils paraissent le vouloir, le prince Ferdinand pourra nous secourir avec 50 000 hommes, ce qui mettra le Roi en état d'envoyer de la Saxe des renforts au prince Henri. Si la paix ne se fait pas, il y aura sûrement quelque combat qui décidera de beaucoup de la fortune des États.

Voilà à peu près ce que l'on peut penser en général d'évènements futurs, qui peuvent tourner très mal, mais qui peuvent aussi prendre une forme plus avantageuse qu'on ne l'ose espérer à présent.

Nach der eigenhändigen Aufzeichnung des Königs.



1 Nördl. von Löwenberg.