12059. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.

Au camp de Meissen, 5 mai 1760.

Voici deux rapports de Danzig320-2 que je viens de recevoir, et que je n'ai pas voulu manquer de vous communiquer. Si celui de l'anonyme accuse juste, le renvoi de cette artillerie me paraît indiquer que les Russes commencent à soupçonner et à craindre quelque évènement défavorable à eux, et, pourvu que cela se confirme, il en saurait bien arriver qu'ils renoncent à toute campagne offensive et qu'ils se bornent à la défensive dans la Prusse. Si ce cas arrive et que nous saurions nous entendre avec les Danois,320-3 en sorte qu'outre leur flotte en mer ils nous joignent encore leurs troupes de terre, il faudra voir comment concerter les mesures avec eux, pour commencer à expulser les Suédois de la Poméranie, afin d'avoir les bras libres de ce côté-là.

Quand cela nous aura réussi, il faudra voir comment nous régler, afin de reprendre la Prusse sur les Russes. A cette fin vous pourrez vous faire joindre alors de tout ce que le général-major de Stutterheim a avec lui de régiments proprement dits de Prusse, et marcher droit vers la Vistule, après que préalablement vous aurez détaché 8 bataillons et 10 escadrons pour aller joindre incessamment le général de Fouqué en Silésie. Il faut que, parmi cette cavalerie, il y ait 5 escadrons de cuirassiers, et quant aux 8 bataillons d'infanterie, il faut qu'ils consistent des régiments de notre pays, par exemple de ceux de Hülsen, de Finck, de Lindstedt etc.

Je dois vous avertir à cette occasion qu'il y a plus d'un an que j'ai déjà arrangé sous main avec mon résident à Danzig, le sieur Reimer, afin de tenir toujours prêt un certain nombre de vaisseaux avec tout ce qu'il faut de cordages et d'ancres pour la construction d'un pont de bateaux sur la Vistule, afin d'y pouvoir faire passer nos troupes sur cette rivière, à tel lieu où les circonstances l'exigeront.320-4 Ce n'est que préalablement que je vous écris tout ceci, dans l'intention, afin que, si tous les cas que je présuppose, venaient à arriver, vous soyez déjà au fait de mes idées sur ce qu'il y aura à faire alors.

Les troupes des Cercles n'ont pas encore remué dans leurs quartiers. Daun fait venir ses tentes de la Bohême; en attendant nous sommes, les bras croisés, à nous reposer, certains que nous ne manquerons pas d'exercice en temps et lieu.

Federic.

Nach der Ausfertigung. Der Zusatz eigenhändig.

<321>

320-2 Liegen nicht bei.

320-3 Vergl. S. 316. 317.

320-4 Vergl. Bd. XVIII, 252.