12287. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.

Quartier de Leubnitz, 25 juillet 1760.

J'ai été bien aise de la bonne nouvelle que vous m'avez marquée par votre lettre du 23, d'une action complète que les Anglais ont remportée sur les Français dans les Indes Orientales près de Pondichéry.522-1 Je ne suis pas assez au fait des affaires de ce pays-là, pour pouvoir juger si la prise de Pondichéry sera une suite nécessaire de cet avantage; ce qui forcerait les Français à se remettre à la discrétion de l'Angleterre et à la rechercher, afin d'obtenir d'elle la paix au plus tôt mieux, surtout si le Ciel seconderait encore les opérations du prince Ferdinand pour porter quelque coup, tant soit peu considérable, à l'armée française en Allemagne.

Quant au mémoire du sieur de Schwerin,522-2 je ne serais pas du tout éloigné d'employer la somme d'un demi-million, s'il en faut tant, quoique j'en doute, pour gagner la supériorité à la Diète de Suède, afin de culbuter les sénateurs tyrans et malintentionnés, et pour y opérer un changement favorable à mes intérêts et à ceux de la reine de Suède, si l'on pourra être sûr qu'au moyen de cet argent l'on parviendrait certainement au but proposé; mais il y a encore des considérations à faire :<523> 1° qui serait celui qui conduirait assez sagement et prudemment cette intrigue, et de qui l'on saurait se servir pour distribuer avec effet ces somme; 2° s'il n'y aura pas à risquer que, les sénateurs malintentionnés culbutés, les autres ne se jettent entre les bras des Russes. Il est constant que la plus grande part de ces gens sont pensionnés de la France. Si ces pensions leur manquent, je ne suis pas à même de les leur fournir. Il est fort incertain si l'Angleterre voudra entrer pour autant en cette affaire qu'elle voudra se charger d'y suppléer, ce qui réduirait ces sénateurs à la nécessité de se rendre à la Russie; mais 3° et principalement, le grand embarras en tout ceci est qu'un pareil changement nous viendra trop tard, par le temps qu'il faudra pour arranger le nécessaire et pour en voir le succès. Car, en attendant, tout sera déjà décidé, tant ici qu'avec les Russes, les choses étant actuellement parvenues à un tel point critique qu'il faut que la bombe crève et que tout se démêle au plus tôt, soit en bien, soit en mal.

Federic.

Nach der Ausfertigung.



522-1 Am 22. Januar 1760 bei Fort Wandewash, vergl. Schäfer a. a. O. Bd. II, Th. 1, S. 395.

522-2 Finckenstein hatte berichtet, der Prinz Heinrich habe ihm ein „Memoire“ zukommen lassen, „qui vient du sieur de Schwerin, conseiller de la régence de Stralsund et attaché aux intérêts de la cour. Il s'agit d'un plan pour gagner la supériorité à la Diète, . . . pour culbuter les sénateurs malintentionnés et engager la Suède à se séparer des intérêts de la France et à faire sa paix avec Votre Majesté; . . quoiqu'il soit sûr qu'on n'y pourrait parvenir qu'à force d'argent, la somme d'un demi-million, que l'auteur de ce mémoire demande, me paraît . . . exorbitante.“