<92>a fait ôter avec assez mauvaise grâce, en leur enjoignant en même temps de sortir de la ville. J'en suis d'autant plus surpris qu'on agisse de la manière avec les miens, dans un temps où, pour dire la vérité sans ostentation, peut-être ni troupes françaises ni bavaroises ne seraient plus en Bohême, si mes troupes n'étaient entrées en Moravie. Je vous laisse juger vous-même de ce procédé, et s'il est de la bienséance, pour ne pas dire de la reconnaissance, de défendre aux miens de faire quelque recrues, pendant qu'on tue ici de mes soldats, uniquement pour sauver mes amis, dans un temps où sans cela ils pourraient être tranquilles dans leurs quartiers d'hiver. Je n'en parlerai plus, mais je vous prie de croire que je suis avec une estime invariable, Monsieur, votre bien affectionné

Federic.

Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.


759. AU CARDINAL DE FLEURY A ISSY.

Selowitz, 27 mars I742.

Monsieur mon Cousin. Vos lettres me font toujours un plaisir infini, j'y vois le tableau de l'Europe en raccourci, dessiné par Carrache et coloré par Rubens. Les conjonctures présentes, qui s'embrouillent de plus en plus, donnent lieu à bien des réflexions. Si l'Angleterre déclare la guerre à la France, sans le concours de la Hollande, elle pourrait bien avoir lieu de s'en repentir, et si la Hollande se joint à l'Angleterre, la République en sera le sacrifice. Je vais plus loin, et j'examine le but que peuvent avoir l'Angleterre et la Hollande d'allumer le flambeau de la guerre en Flandre? On me dira que c'est pour opérer une diversion à la reine de Hongrie, mais quelle diversion peuvent faire ces deux puissances combinées, en Flandre, où une triple barrière de places où l'art de la fortification s'est épuisée, défendent les limites de la France? Ce n'est donc point une guerre offensive qu'elles peuvent entreprendre, et je demande si, lorsqu'on veut faire la guerre, l'on commence par la défensive? De ceci je conclus que tout l'appareil de guerre en Angleterre et en Hollande n'est jusqu'à présent qu'une montre d'ostentation, et qu'à moins que le peuple de Hollande ne prenne généralement la rage, il n'est pas à présumer que les États-Généraux s'engagent de gaieté de cœur dans une guerre ouverte avec la France.

Voici l'état où se trouvent les affaires d'Allemagne. M. de Khevenhüller a détaché, à la vérité, un corps de 12,000 hommes de ses troupes vers la Basse-Autriche, mais ce corps a été remplacé par 12,000 Croates et hussards. J'ai appris par grand nombre de lettres interceptées que le projet de M. de Khevenhüller est d'aller jusqu'en Souabe, au devant du secours français, et de le combattre, ce qui obligera, je crois, les Français de marcher en corps de troupes et non pas par détache-