724. AU ROI DE POLOGNE A DRESDE.

Znaym, 1er mars 1742.

Monsieur mon Frère et Cousin. Mon adjutant de Wartensleben m'a rendu la lettre que Votre Majesté m'a fait le plaisir de m'écrire, et je L'assure qu'Elle n'aura pas lieu de regretter la confiance qu'Elle veut bien mettre en moi. Je dois Lui dire que depuis le temps que j'ai eu la satisfaction de Lui écrire, l'ennemi s'est retiré vers l'Autriche, mais que, comme M. de Broglie est entré en même temps dans les quartiers — qui, entre nous soit dit, sont pris mal à propos et mal assurés — nous ne pouvons faire autre chose que de choisir les meilleurs quartiers possibles pour donner du repos aux troupes, qui en ont besoin, <63>et pour nous refaire vers le printemps. Les Hongrois assemblent entre Presbourg, Tirna et Scalitz un corps de 12,000 hommes, auquel il est pourtant prudent de réfléchir. Je suis du sentiment qu'il vaut mieux aller lentement mais sûrement en besogne, que de se précipiter dans ses opérations et de faire ensuite des pas de clerc; c'est pourquoi je ne veux pas avancer plus loin avant que le renfort que je fais venir de Bohême et de Silésie m'ait joint, ce qui se fera dans huit jours. Je n'ai pas voulu non plus hasarder bataille, puisque la saison ne nous eût point permis d'en profiter, et qu'il eût été imprudent de risquer quelque chose avant que le secours des Français ne commence à opérer; alors notre risque n'est rien, mais à présent il y serait allé du tout pour le tout.

Je suis sûr que Votre Majesté ne désapprouvera pas entièrement les raisons que je Lui allègue, d'autant plus qu'Elle verra par l'événement si j'ai eu tort ou raison; d'ailleurs Elle peut être persuadée que je regarde Ses intérêts comme les miens propres, marque de quoi j'ai rejeté encore dernièrement les propositions avantageuses par lesquelles la cour de Vienne m'offrait carte blanche et tous les avantages que je pouvais désirer.

Les troupes de Votre Majesté ont abandonné Iglau un peu vite sans que l'ennemi en ait approché. Je l'ai appris après coup, mais, après tout, le malheur n'est pas grand et les mouvements que nous faisons vers la Hongrie et la Basse-Autriche sont plus décisifs. Hier mes hussards, dragons et grenadiers n'ont été qu'à 2 milles du pont de Vienne. Je suis avec toute l'estime, la considération et l'amitié imaginables, Monsieur mon Frère et Cousin, de Votre Majesté le bon frère et fidèle allié

Federic.

Nach der Ausfertigung im Königl. Haupt-Staatsarchiv zu Dresden.