757. AU MARÉCHAL DE FRANCE DUC DE BELLE-ISLE A VERSAILLES.

Selowitz, 26 mars 1742.

Monsieur le Maréchal. C'est avec une vraie satisfaction que j'ai reçu votre lettre du 11 de ce mois, par le courrier de M. de Valory, et, pour y répondre, il faut avant tout que je vous mande dans quel état nos affaires se trouvent présentement en Allemagne.

Il est sûr que le comte de Khevenhüller a détaché un corps de 12,000 hommes vers la Basse-Autriche, mais la cour de Vienne a eu soin de le remplacer par 12,000 Croates, hussards et autres troupes irrégulières. Des lettres interceptées m'ont appris que le projet du comte Khevenhüller n'est autre que d'aller jusqu'en Souabe, au devant du secours français, et de le combattre s'il peut.

Le prince Charles de Lorraine s'opiniâtre à soutenir avec son corps de 9,000 à 10,000 hommes Budweis et Tabor, postes dont cependant l'armée de Bohême le pourra facilement déloger, le printemps qui vient.

Lobkowitz commande 12,000 hommes de troupes, auxquelles il a joint 12,000 hommes qui sont sous les ordres du général Saint-Ignon. Ces troupes se sont étendues de Krems, Horn, Waidhofen, Teltsch, Laa à Nicolsbourg.

Une armée hongroise, forte de 18,000 hommes, sous les ordres du maréchal Ghillanyi, est à Tirna, sur les frontières de la Moravie, où elle n'attend que quelque secours pour opérer alors. Un autre corps hongrois, sous les ordres du vieux Palffy, menace de pénétrer en Haute-Silésie par la Jablunka, et nous incommode assez. J'ai envoyé un détachement, sous les ordres du prince Thierry d'Anhalt, vers les confins de la Moravie et de la Hongrie, qui ont nettoyé le pays pour quelque temps des Hongrois et en ont fait 800 prisonniers. Mais le mal est que nous ne pouvons pas faire des magasins, étant à Brünn 1,000 hussards, à Landskron 1,200, à Scalitz 2,000, à Nicolsbourg 1,500, à Teltsch 700, à Weisswasser 600, et à Teschen 900. Cette cavalerie légère est partout et ne laisse pas que d'embarrasser notre communication, les paysans mutins et armés de même, ainsi que je ne vois pas jour encore à la subsistance. Il est vrai que d'abord qu'on se fut emparé d'Olmütz, mes ordres étaient de travailler à faire des magasins, mais contre toute mon attente ce point si important n'a pas été exécuté avec la promptitude nécessaire, dont j'ai un très grand chagrin. Les Saxons, encore, me font souvent enrager, et, sans vouloir faire quelque chose, ils témoignent grande envie de retourner aux confins de Saxe, craignant que pareil malheur n'arrive à leur pays qu'à la Bavière.

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Après vous avoir expliqué les peines où je suis, lesquelles pourtant je tâcherai de surmonter au possible, je viens à votre plan et projet de la campagne prochaine,91-1 où je trouve tout si bien arrangé que je n'y saurais ajouter quelque chose. La seule difficulté qu'il y a, ce sont les magasins à faire, qui nous coûteront assez de peine, vu la situation du pays où il y aura le théâtre de guerre.

En attendant, je crois nécessaire de vous avertir que vous n'envoyiez point le corps de troupes qui vient d'Alsace par détachements, afin que le projet de Khevenhüller, dont je juge les forces en troupes régulières et irrégulières, tout compté ensemble, jusqu'à 35,000 hommes, ne réussisse pas, qui est de les battre en détail. Je crois qu'il y a aussi une bonne précaution à prendre avec les recrues qu'on enverra à l'armée de M. de Broglie en Bohême, et il vaudra mieux de les envoyer par quelque détour que de les risquer d'être combattues et dispersées.

Les bruits que les Anglais font maintenant ne m'embarrassent pas trop encore, et je crois que tout cet appareil n'est jusqu'à présent qu'une montre d'ostentation qui aboutira à point ou peu de chose, pourvu qu'il n'y ait une révolte générale en Hollande.

J'espère d'avoir encore de vos nouvelles, et en attendant je vous prie d'être assuré de l'estime invariable avec laquelle je suis, Monsieur le Maréchal, votre très affectionné

Federic.

Nach dem Concept.



91-1 Befreiung Baierns durch eine neue, unter Broglie zu stellende französische Armee von 30,000 Mann; Verfolgung der Oesterreicher nach Tirol durch 12 — 15,000 Baiern bez. Hülfsvölker aus dem Reich; Operation der französisch-baierischen Armee in Böhmen gegen Budweis unter Führung des Kaisers und Belle-Isle's.