794. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BRESLAU.

Chrudim, 21 avril 1742.

Mon cher Podewils. Après avoir bien réfléchi à la relation que vous m'avez faite hier,120-2 j'ai cru d'y avoir aperçu les deux inconvénients principaux de la paix à faire, savoir le peu de besoin que les Anglais affectent d'avoir de nous; en second lieu, le soupçon dans lequel la cour de Vienne est que nous en userions après la paix comme après le protocole de Schnellendorf.

Pour faire sentir à l'Anglais tout le besoin que leur parti a de nous détacher, il faut premièrement amplifier les desseins immenses de la France, ses liaisons et ses traités secrets avec le Danemark et la Suède, sa grande influence en Russie et auprès de la Porte Ottomane, et ajouter à tout cela que nous travaillons moins pour nous à présent, que pour le despotisme universel de cette couronne: c'est la principale raison qui a déterminé le Roi à vouloir se détacher de cette alliance <121>et à prendre des liaisons avec les Puissances maritimes, qui pour lors seront pleinement en état de rétablir cet équilibre si nécessaire pour la continuation des libertés de l'Europe et pour le bien commun; que, si une fois nous nous entendions avec l'Angleterre, on pourrait leur faire des ouvertures qui ne laisseraient pas de les surprendre, mais qu'indépendamment de toutes ces raisons, nous agirions avec plus de vigueur que jamais, si nous ne pouvions, par l'entremise de l'Angleterre, parvenir à une paix juste et honorable.

Quant au second point, il faut mettre aux Anglais et aux Autrichiens l'esprit en repos sur ce que nous romprions nos engagements, leur faire bien sentir la différence d'un traité et d'un pourparler, et leur dire naturellement que nous comprenons bien qu'ils ne veulent notre assistance que pour être certains de nous, et que nous ne changeons pas d'avis à la première occasion. Que pour l'article de l'assistance, je le rejette absolument, mais que je ne rejette point tels expédients qu'il plairait à Hyndford de proposer, pour tranquilliser la cour de Vienne sur ce sujet. Voyez alors ce que Hyndford vous dira, et proposez en suite de ne laisser qu'une certaine quantité de troupes dans nos nouvelles conquêtes, jusqu'à la paix générale, ou quelque idée synonyme, pour mettre les Autrichiens en repos. Je crois que par ce moyen nous pourrons parvenir à notre but.

Ensuite faites voir à Hyndford quel bon effet opèrerait sur le parlement d'Angleterre la paix que le Roi aurait négociée avec nous et la reine de Hongrie; la gloire particulière de Hyndford, d'avoir sauvé la maison d'Autriche; et ensuite, faites lui sentir que, s'il vient à bout de cette négociation, 100,000 écus seront sa récompense.

Voici tout ce que j'ai pu imaginer sur ce sujet. Vous pourriez faire remarquer à milord Hyndford que, comme les Français retirent leurs troupes de la Westphalie, je suis à présent maître de faire d'autres arrangements, mais que l'hiver passé le cas avait été différent.

En gros, je suis résolu de faire la paix aux meilleures conditions que je le pourrai, sauf les déshonorantes. Du reste, je me repose sur vous que vous employerez dans cette négociation toute l'activité et le feu dont vous êtes capable. Adieu, cher Podewils, comme je suis fort intrigué de tout ceci, mandez-moi tous les détails et toutes vos conjectures, et cela amplement.

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



120-2 Ueber eine zweite Unterredung mit Hyndford.