1212. AU LIEUTENANT-GÉNÉRAL COMTE DE DOHNA A VIENNE.

Berlin, 5 octobre 1743.

Je ne conçois pas trop à quoi le comte d'Ulfeld a pointé, en vous insinuant, ainsi que je vois par le premier post-scriptum de votre dépêche du 25 septembre dernier, qu'il était surprenant que, dans le temps <435>même qu'on avait offert à la cour de Vienne, ainsi qu'il m'était connu, des troupes impériales et royales pour l'aider à reconquerir la Silésie, l'Empereur désirât ma médiation, et que je voulusse me prêter à des choses qui vinssent de la part du baron de Haslang. Il se peut que le comte d'Ulfeld ait voulu parler des propositions qu'on prétend avoir été faites par le sieur Hatsel, sous-intendant de Strasbourg. Car ce sont les uniques de cette espèce dont on ait jugé à propos jusqu'ici de me donner connaissance. Je ne décide pas sur la réalité de ces propositions. La cour de France nie hautement le fait. Elle m'a même donné sur cette matière des éclaircissements qui rendent la chose pour le moins fort problématique, sans compter que l'électeur de Mayence tient une conduite qui ne me permet pas de le regarder sur le pied d'un témoin impartial. Mais, quand on lui aurait effectivement fait les propositions dont il s'agit, je ne comprends point par quelle raison on prétend les mettre à charge de l'Empereur et de son ministère, qui, de l'aveu de la cour d'Angleterre même, n'y ont eu aucune part, ni pourquoi je dusse être en garde contre ce qui vient de la part du baron de Haslang, dont le nom n'a jamais été allégué dans la communication que le ministère britannique m'a faite de ces prétendues propositions.

Après tout, quand je prétends concourir à la médiation de la paix entre Sa Majesté Impériale et la cour de Vienne, ce n'est pas uniquement en vue de l'Empereur, mais encore en celle de l'Empire; et les assurances positives et solennelles de la cour de Londres qu'on ne ferait rien sans ma participation, dans la négociation de paix avec l'Empereur, m'y donnent un droit acquis dont je ne suis pas d'humeur de me laisser frustrer, de quelque manière qu'on s'y prenne. Mon intention n'est point de m'ingérer dans les négociations qui pourraient s'entamer entre les cours de Vienne et d'Angleterre et la France, non plus que dans celles qui n'auront pour objet que les affaires d'Italie. Mais lorsqu'il sera question de celles d'Allemagne et du rétablissement de la tranquillité de la patrie, j'y suis trop intéressé, par le rang que j'y tiens en qualité d'un des principaux et des plus puissants membres de l'Empire, pour souffrir qu'on en traite à mon exclusion. D'ailleurs, la cour de Vienne ayant si souvent déclaré ci-devant que ma concurrence à la négociation de la paix avec l'Empereur lui serait toujours agréable, j'ai lieu d'être surpris de ce changement subit de ses dispositions, et je suis en suspens à quoi l'attribuer.

Quoi qu'il en soit, je veux bien qu'on sache à Vienne que j'insiste absolument sur mon admission aux négociations qui se feront au sujet de la paix avec l'Empereur, que je n'en démordrai point, quoi qu'il en arrive, et que, si l'on prétend m'en exclure, je saurai prendre mes mesures en conséquence: et j'entends que vous le déclariez aux ministres de la reine de Hongrie d'une manière ferme et mâle, en vous servant des mêmes paroles que je vous ai prescrites, sans biaiser ni plier en aucune façon de tout, sous peine de ma dernière disgrâce.

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Vous aurez soin au surplus de me rendre un compte exact et détaillé de l'effet que cette déclaration opérera sur leurs esprits, et de la manière dont ils s'expliqueront là-dessus.

Federic.

H. Comte de Podewils. C. W. Borcke.

Nach der Ausfertigung. Zu Grunde liegt eine dem Grafen Podewils von dem Könige persönlich ertheilte Weîsuug.