12886. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.

[Au camp de Kunzendorf,392-1 16 mai 1761.]392-2

Après avoir recueilli toutes les nouvelles que j'ai été en état de me procurer, et après avoir réfléchi aux projets que l'ennemi peut former, je crois pouvoir vous dire à peu près ce qui pourra en résulter pour le commencement de la campagne. Lacy a pris le chemin de Zittau et de Braunau, de sorte qu'il formera une chaîne avec Laudon, et celui-ci emploiera la plus grande partie de ses troupes à garder les débouchés de Wartha, de Silberberg et de Johannsberg. Selon toutes les apparences, le maréchal Daun prendra le même chemin, dès qu'il aura laissé un corps suffisant auprès de Dresde pour couvrir cette capitale.

Les Russes, selon toutes mes nouvelles, se proposent d'agir avec deux corps dont l'un doit attaquer Colberg et l'autre se joindre à Laudon. Voilà donc 1° le prince de Württemberg opposé aux Russes du côté de Colberg, voilà Goltze qui marche à Glogau, et vous qui vous mettrez en chemin en même temps que le maréchal Daun pour la Silésie. N'oublions pas que l'objet principal de l'ennemi est la conquête de la Silésie; or voici le projet de nos ennemis pour la prendre. Le maréchal Daun s'avancera avec un corps considérable pour se mettre sur les hauteurs soit de Jauer soit de Schweidnitz. Laudon filera en ce temps au delà de la Neisse pour entreprendre le siège soit de Neisse soit de Cosel; un corps des Russes marchera le long des frontières de la Silésie, passera l'Oder à Oppeln, se joindra à Laudon pour commencer un siège.

Après le départ de Goltze, il ne me reste ici que 42 000 hommes. Cela serait suffisant pour tenir tête à Daun; mais dès qu'il faut qu'un corps suive Laudon, cela devient insuffisant. Il faut donc nécessairement, si les choses tournent ainsi, ou que je succombe sous le nombre, ou que je sois renforcé à temps. Supposant donc que les Russes veulent assiéger Colberg, il faut que, si ce n'est pas toute l'armée et seulement 14000 hommes, que Goltz envoie une brigade d'infanterie pour renforcer le prince de Württemberg, que vous vous joigniez ensuite à Goltze, soit pour contrecarrer la marche des Russes de l'autre côté de l'Oder, mais mieux encore pour me joindre. Je pourrais, en vous renforçant alors, vous laisser sur le Zobtenberg, où il y a nombre de bons<393> postes à prendre, et j'irais avec le reste de l'armée m'opposer à Laudon. Le poste du Zobtenberg défend Breslau, Schweidnitz et Glogau, dans le cas que je vous marque; car l'ennemi n'aura jamais le cœur de vous passer et de se hasarder vers Breslau, au risque de perdre ses convois ; il ne saurait rien non plus entreprendre sur Glogau qu'il ne lui faille faire des arrangements de longue main, et votre poste de Zobten me donne le temps de me défaire de Laudon et de vous rejoindre à temps, après quoi il faudrait voir de quoi il sera question.

Cette position devient encore avantageuse à d'autres égards. Si le gros de nos troupes se trouve vis-à-vis des Autrichiens, nous n'aurons pas de si grands hasards à courir; car supposons que la paix se fasse entre la France et l'Angleterre, que reste-t-il à la reine de Hongrie que de brusquer les choses et d'essayer de parvenir à son but par le gain d'une bataille? Or si je suis faible, qu'il ne me reste que 40000 hommes contre Daun et Laudon, qui tous deux en auront 80 000 au moins, jugez du hasard où les choses seraient exposées; et mon armée battue, que deviendrait le reste? Voilà donc ce qui me fait penser que le plus sûr parti, si vous entrez en Silésie — à moins que vous ne soyez obligé de marcher au général Goltz à Glogau, pour couvrir cette ville contre les Russes — serait de prendre le chemin de Parchwitz, pour me mettre promptement en état de tourner mes forces contre les entreprises que Laudon pourrait former.

Federic.

P. S.

Je viens de recevoir vos deux lettres du 12 de ce mois; je me remets à ma présente, où j'ai oublié de vous dire que, selon qu'on vient de me le rapporter, Lacy est marché vers Marklissa. Son but en cela ne peut être que de préparer là des magasins pour Daun, quand il voudra y marcher.

Dem Prinzen wird eine Liste von Rekruten übersandt, die unter seine Regimenter vertheilt werden sollen.

Das Hauptschreiben nach dem eigenhändigen Concept; das P. S. nach der Ausfertigung.



392-1 Westl. von Schweidnitz.

392-2 Das Datum nach der Ausfertigung.