12990. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.

Kunzendorf, 24 juin 1761.

Je vous envoie ci-joint deux rapports du capitaine de Gœtzen484-1 que j'ai envoyé expressément aux frontières de la Lusace pour avoir des nouvelles de l'ennemi; et comme j'ai vu par là que les choses deviennent critiques dans la Lusace, j'ai donné ordre audit capitaine de Gœtzen484-2 de vous faire passer tout directement tous les avis qu'il aura.

Je commence à présumer que Daun veut retirer ses corps vers la Saxe. Toutes ces considérations m'ont fait croire que je devais prendre des mesures pour pouvoir porter du secours de quel côté il sera nécessaire.

Je vous ai écrit que j'ai fait détacher vers Glogau pour fortifier Goltz, afin d'entreprendre Buturlin; au sujet de quelle expédition je vous prie de me garder le secret encore, afin que rien n'en puisse transpirer à l'ennemi. Ma première raison à faire cette démarche est qu'il vaut mieux se battre hors de son pays que chez soi; en second lieu, que je puis faire ce Detachement, sans qu'il y ait du danger pour ma situation présente; tertio, que l'armée russe est partagée en trois corps qui ne sauront se joindre; quarto, que, si Goltz réussit à chasser ces gens-là, cela dérange non seulement tout le projet de campagne des Russes, mais encore celui des Autrichiens; quinto, si cette expédition a tout le succès qu'on en peut espérer, voilà le dessein du siège de Colberg rompu, auquel les Russes ne sauront plus penser; d'ailleurs, le dépérissement de leurs magasins les dérangera fort, et, s'ils voulaient agir encore contre moi, ils seraient obligés d'en former d'autres. En sixième lieu, si Daun veut faire des efforts du côté de la Saxe, je me trouverais en état de renforcer considérablement votre armée.

Cette expédition doit se terminer en quinze jours, et je crois que, dans ces quinze jours, en y ajoutant le temps qu'il faut aux troupes pour passer en Saxe, ce qui pourra faire trois à quatre semaines, vous n'aurez pas grand risque à courir.

Le général Goltz et le commandant de Glogau ont ordre de vous informer en droiture de tout ce qui se passe là-bas, et j'ai cru devoir vous mettre au fait de tout ceci, afin qu'en faisant vos réflexions sur<485> l'expédition de Goltz, et qu'en voyant en même temps si le corps de Zittau marchera vers Dresde ou vers la Silésie ou la Bohême, vous soyez en état de juger d'un moment à l'autre de ce qui se passera, et de faire avancer le magasin de Magdeburg, autant qu'il sera nécessaire pour vous nourrir. Tout ceci m'a semblé si important que j'ai cru devoir vous en informer incessamment.

Federic.

Nach der Ausfertigung.



484-1 D. d. Gersdorf 22. und 24. Juni. Der Bericht vom 24. enthielt die Meldung, dass „die Oesterreicher bei Zittau unterschiedene Anstalten machen, als wollten sie marschiren“ , und, dass sie „ihr Magazin bei Zittau haben wegfahren lassen“ .

484-2 Schreiben an Götzen, d. d. Kunzendorf 24. Juni. [Im Besitz des Grafen Götzen in Berlin.]