1328. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

Berlin, 8 février 1744.

Le marquis de Valory ayant fait à mes ministres d'ici les mêmes ouvertures, sur la commission du sieur de Chavigny à Francfort, particulièrement par rapport à l'engagement des troupes de Hesse, que vous avez reçues de la part du sieur d'Amelot, suivant votre dépêche du 24 janvier passé, je lui ai fait répondre que la nouvelle m'en était très agréable, mais que j'appréhendais fort que ce ne fût maintenant que de la moutarde après dîner, et que la France ne trouvât à l'heure qu'il est autant de difficultés à faire réussir la négociation, qu'elle y aurait trouvé de facilité, si elle l'eût entamée quelques mois ou seulement quelques semaines plus tôt.

Vous ferez bien de vous expliquer dans le même sens envers le sieur Amelot, au cas qu'il vous reparlât sur ce sujet, et de lui commenter, sans nommer toutefois l'auteur, la réflexion que le maréchal de Belle-Isle vous a faite sur l'irrésolution de sa cour,23-1 en y ajoutant que, si elle avait agréé au mois d'août passé le plan d'opération que je lui proposais <24>alors,24-1 on aurait eu le loisir de prendre des arrangements justes et tels qu'exigeait l'exécution d'un projet de cette conséquence; au lieu qu'ayant attendu à se déterminer jusqu'à présent, où l'ouverture de la campagne n'était éloignée tout au plus que de six semaines, elle avait perdu les avantages que l'hiver lui fournissait pour la négociation, et laissé carrière ouverte à celle de ses ennemis, de sorte que je ne serais nullement surpris qu'elle se trouvât partout prévenue à cet égard, et qu'elle rencontrât une infinité des difficultés dans la poursuite du plan qu'elle avait formé en faveur de l'Empereur ; de même que, par ce retardement, elle avait rompu et déconcerté tous les desseins d'armée de neutralité et d'observation que j'avais conçus pour remettre les affaires de Sa Majesté Impériale.

Federic.

H. Comte de Podewils. C. W. Borcke.

Nach dem Concept.



23-1 Chambrier berichtet, 24. Januar: „Le maréchal de Belle-Isle, qui ne laisse pas sous main que de se mêler de plusieurs choses et qu'on croit dans des liaisons secrètes avec le cardinal de Tencin et le maréchal de Noailles, a été en confidence avec Chavigny sur tout ce qu'il a fait ici ; ledit Maréchal me disait avant hier que l'Empereur serait mis par la France dans telle position qu'il la fallait pour parvenir au but qu'on se propose à son égard, mais ayez la bonté, m'a t-il dit, d'écrire au Roi, en l'assurant de mon profond respect, qu'il fallait faite tout cela il y a trois mois.“

24-1 Gemeint sein kann wohl nur das etwas spätere „Projet que doivent suivre les Français s'ils sont sensés“ , Bd. II, Nr. 1208.