1604. AU FELD - MARÉCHAL COMTE DE SCHMETTAU [A STRASBOURG].

Camp auprès de Tein, 3 octobre 1744.

Je viens de recevoir les deux lettres que vous m'avez écrites en date du 21 du septembre passé, au sujet des déliberations que vous avez eues avec les trois maréchaux, et sur son résultat. Bien que je convienne du premier point de ce résultat,298-1 j'avoue que je ne saurais comprendre par quelles raisons vous vous êtes prêté aux deux autres,298-2 et je n'ai pu m'empêcher de vous envoyer ci-clos mes réflexions de main propre sur ce résultat. Vous en ferez un usage convenable, et je vous ordonne de faire lire l'original de ces réflexions au maréchal de Noailles, lorsque vous présenterez au maréchal de Noailles la réponse ci-close que je lui fais à sa lettre du 21 passé. J'ai touché entre autres dans ma réponse l'article de la marche d'un corps de troupes françaises vers le Bas-Rhin, aussitôt que Fribourg sera pris, pour appuyer ce que vous avez représenté sur ce sujet; et, comme Klinggræffen vous aura déjà instruit des avis qui lui sont venus des Pays-Bas sur les desseins des ennemis d'établir dans les pays de Juliers, Bergue, Cleves, Gueldre et Liège leurs quartiers d'hiver, d'y lever des contributions, pour dédommager la cour de Vienne de ce qu'elle perd en Bohême, et de soutenir par là les électeurs ecclésiastiques dans leur parti, en rendant le Palatin inutile à l'alliance, vous insisterez sur ladite marche vers le Bas-Rhin et la Westphalie, afin qu'elle se fasse d'abord, après la prise de Fribourg.

<299>

Vous représenterez dans des expressions convainquantes, quoique modestes, la nécessité qu'il y a de faire absolument cette démarche, pour rendre les électeurs ecclésiastiques plus dociles et soutenir les alliés de la France et de l'Empereur, que le roi de France, selon les sentiments de droiture que je lui connais, ne voudra pas négliger ni abandonner, contre ce qu'il leur a promis.

Au reste, il faut que je vous avertisse que le roi de France, dans la lettre qu'il vient de m'écrire, me prie de vous recommander de ne point chercher à vous faire aucune liaison particulière dans sa cour, ce qui ne serait point le moyen de lui plaire; qu'il savait que vous êtes un bon homme de guerre, et qu'il écouterait volontiers à vos conseils dans tout ce qui y aurait rapport, et que vous pourriez vous adresser directement à lui pour ce que vous aurez à dire de ma part. Selon cet avis, vous dirigerez toutes vos attentions d'une manière à ne rien omettre de ce qu'il faut pour mes intérêts, sans pourtant vous mêler des intrigues dont les ministres de France usent l'un vers l'autre.

Quant à mes opérations, je viens de prendre, par un détachement de mes troupes, le 23 septembre le poste de Tabor, le 30 celui de Budweis, et le 1er de ce mois le château de Frauenberg. Il sera à voir présentement ce qu'il y aura à faire contre l'armée ennemie, qui est encore, à ce qu'on dit, aux environs de Pilsen. Sur ce je prie Dieu etc.

Sans éparpiller mon armée, et sans traverser les nues et marcher avec mes troupes comme vole Mercure, j'ai conduit mon opération jusqu'aux frontières d'Autriche, et quiconque dit que ce n'est pas agir vigoureusement, est un Jean etc.

Federic.

Réflexions sur le résultat des délibérations des quatremaréchaux.

Premièrement, le but des opérations du roi de Prusse a été de faire une diversion en Bohême, pour que Seckendorff pût entrer en Bavière. Dès que Seckendorff ne prend pas ce parti, la diversion du roi de Prusse devient inutile.

En second lieu, dès que l'on veut prendre un pays, il faut agir offensivement, et la conduite que l'on prescrit à Seckendorff, est d'une nature toute différente. Si Seckendorff ne devait commander qu'une armée d'observation pour couvrir le siége de Fribourg, le plan qu'on lui propose serait sensé; mais il doit reprendre la Bavière, il faut en chasser les autres, Seckendorff est le double plus fort que les Autrichiens, il n'y a aucun risque à son opération: et c'est ce qu'on appelle véritablement à la guerre ne pas savoir profiter des moments, si Seckendorff néglige la supériorité momentanée que lui donne sur les Autrichiens la diversion que je viens de faire.

Nach der Ausfertigung. Der Zusatz zu dem Erlasse sowie die Denkschrift eigenhändig.

<300>

298-1 Die kaiserliche Armee soll sich keinem zweifelhaften Ereigniss aussetzen, selbst wenn sie ebenso stark als die österreichische sein sollte.

298-2 Seckendorff soll nicht gegen die Oberpfalz vordringen, sondern auf das rechte Donauufer zurückkehren; ein Marsch auf Fassau erscheine voreilig und undurchführbar.