1646. AU ROI DE FRANCE A VERSAILLES.

Berlin, 18 décembre 1744.

Monsieur mon Frère. Le premier soin que j'ai eu à mon retour de l'armée, a été de faire à Votre Majesté une description exacte et détaillée de toute ma campagne; je prie Votre Majesté de ne la point rendre publique, puisqu'il y a beaucoup de points dont les Autrichiens pourraient tirer avantage, comme de tout ce qui regarde les subsistances etc.

Je félicite Votre Majesté de tous les heureux événements qui viennent de Lui arriver; une campagne aussi brillante que celle qu'Elle vient de faire, illustrera Son règne et le rendra aussi brillant qu'aucun des règnes des rois Ses prédécesseurs.

Je viens de recevoir aujourd'hui la nouvelle fâcheuse que les Autrichiens ont fait une invasion en Haute-Silésie, ce qui m'oblige de partir incessamment et de mettre fin à leur impertinence. Je prie Votre Majesté de n'attribuer ma brièveté qu'à cette cause-là; je me flatte de pouvoir être de retour dans une quinzaine de jours et d'assurer alors à Votre Majesté de nouveau à quel point je fais profession de Lui être attaché et comme je serai à jamais avec ces sentiments etc.

Federic.

<343>

Relation de ma campagne 1744.343-1

Je partis le 13 d'août pour me mettre à la tête de mes troupes, qui, divisées en trois colonnes, s'étaient mises en marche pour arriver auprès de Prague, à peu près au même jour. J'imaginais que les Saxons, ni aucune puissance de l'Europe, ne pouvaient trouver étrange qu'après avoir fait annoncer ma marche par des réquisitoriaux de l'Empereur, je poursuivisse mon chemin, sans m'arrêter, au travers de cet électorat, et en faisant observer la meilleure discipline du monde. Le bruit qu'en firent les Saxons, avait en vue trois objets différents, dont le premier était la passion et la jalousie qu'ils ont contre la Prusse, croyant ce voisinage trop puissant pour leur faiblesse, et se flattant par leurs cris de révolter les puissances du Nord et principalement la Russie contre une action qui n'avait en elle-même rien d'odieux ni de contraire aux lois et aux constitutions de l'Empire. Leur second objet consistait dans la partialité de la Reine et du père Guarini pour la cour de Vienne ; et le troisième, l'extrême disette d'argent, qui s'étendait si loin dans ces circonstances que la cour manquait souvent de quoi pouvoir suffire aux besoins les plus pressants, ce qui leur fit espérer que le moment favorable était venu de vendre leurs troupes à plus gros marché qu'on ne les eût payées en toute autre occasion. Pendant que tous ces mouvements se passaient à Dresde et encore plus à Varsovie, je m'avançais à grands pas vers les frontières de la Bohême. Il n'y eut rien de plus ridicule que la crainte extrême du ministère saxon, mêlée avec une fierté composée et soutenue des moyens les plus faibles et les plus insuffisants. L'on m'accordait d'un côté tout ce que je pouvais désirer relativement à mon passage et à la subsistance de mes troupes; d'un autre côté, l'on protestait sur ce que l'on faisait, et en même temps on faisait travailler, jusqu'aux manufacturiers de porcelaine, pour faire plus de vingt coupures et des barricades dans les rues de la nouvelle ville de Dresde. La ville était fermée, on avait doublé la garnison, mais trois bataillons de mes troupes, quarante pièces de batterie et vingt mortiers passèrent malgré ces grands préparatifs sur l'Elbe, au beau milieu de la ville, tandis que l'armée côtoyait cette capitale des deux côtés. Que de singulières contradictions ne renferme point l'esprit humain!

Nous trouvâmes bientôt un obstacle plus réel à notre entrée en Bohême: les Autrichiens avaient fait une espèce d'estacade dans l'Elbe qui en interrompait entièrement la navigation, et cette estacade était défendue par un bon château,343-2 situé sur un rocher escarpé de tous les côtés et qui commande toute la rivière. Le château fut sommé, un capitaine hongrois avec 100 hommes se rendit prisonnier de guerre,343-3 l'Elbe fut déblayée, notre petite flotte y passa, et toutes ces formalités ne nous firent perdre que deux jours. L'armée continua sa route, de<344>puis, vers Prague, sans aucun empêchement; une avant-garde composée de quatre régiments de hussards et de quatre bataillons de grenadiers précédait sa marche d'une journée et ramassait, en chemin faisant, les subsistances dont les troupes avaient besoin. Dans toute cette marche, on n'a eu d'autres nouvelles du comte de Batthyany — qui, au bruit de notre marche, était entré en Bohême avec un corps de r3,ooo hommes — que par un détachement du régiment de Zieten qui surprit et défit344-1 200 hommes du régiment de Baranyay, que M. de Batthyany avait envoyé à Munzifay, petit bourg non éloigné des rives de l'Égra; les prisonniers, au nombre de cinquante, déposèrent que l'ennemi était aux environs de la Beraun. Nous arrivâmes, le 2 de septembre, aux environs de Prague, après une marche longue et difficile, dans un temps pluvieux, de façon que le 3 et le 4 furent employés à faire la circon-et contrevallation de la ville. Le corps du maréchal de Schwerin et celui du prince Léopold étaient arrivés le 1er de septembre.

Les ponts de communication étaient jetés sur la Moldau, et il ne manquait plus que la grosse artillerie pour commencer le siége. L'Elbe n'est navigable que jusqu'à Leitmeritz, et de là on était obligé de faire le transport du canon, des munitions de guerre et de bouche, par charroi, ce qui emporta huit jours de temps, pendant lesquels on fit les fascines et les autres arrangements necéssaires pour l'ouverture de la tranchée. Je reçus, entre ce temps, l'avis, par un de nos espions, que le comte Batthyany faisait amasser de gros magasins à Beraun, et que ces magasins n'étaient gardés que par 1000 hommes, ce qui me fit naître le dessein de m'emparer de ce poste et de déranger par là considérablement les desseins des ennemis. Le général Hacke fut commandé pour cet effet, avec cinq bataillons et 600 hussards, et eut l'ordre d'emporter ce poste. Il se trouva que l'ennemi en eut des nouvelles, et, quoique ce plan fût assez bien concerté, le général Hacke, après avoir emporté la porte de la ville du côté du pont, se vit obligé à se retirer, voyant deux corps considérables de cavalerie qui passaient la Beraun pour le prendre dans ses derrières; il perdit un canon à cette retraite, dont les roues furent cassées; il se posta ensuite sur une hauteur où il soutint six heures de suite l'attaque des cuirassiers et des pandoures, et, après les avoir repoussés par cinq différentes reprises, il les poursuivit et les chassa de l'autre côté de la rivière. Je fus averti à midi que le corps du général Hacke était environné, que le nombre des ennemis augmentait et qu'il avait besoin de secours. J'y marchais en personne avec 50 escadrons et 16 bataillons; nous arrivâmes, à dix heures, au-delà des plaines d'Unhoscht, à l'embouchure du défilé, et J'appris que l'affaire s'était heureusement passée à notre avantage, quoiqu'à la vérité le but de l'expédition se trouvât manqué.344-2

Nous avons eu le malheur, durant cette campagne, que les gens <345>préposés à la fourniture des vivres s'en sont si mal acquittés et se sont trouvés si peu intelligents que l'armée a été toujours mal fournie, et, à la fin, cette fatalité est devenue d'autant plus funeste qu'elle nous a obligés de quitter la Bohême. Le jour que je marchais vers Beraun, l'armée n'avait plus de pain, ce qui m'empêcha de poursuivre ma pointe et d'occuper le poste de Beraun, et de plus, j'avais appris que M. de Batthyany avait fait rétrograder ses magasins de Beraun à Pilsen.

Le 10, au soir, l'ouverture de la tranchée se fit à Prague, à trois endroits différents à la fois, savoir à la montagne de Zisca, vers le plateau de la montagne de Saint-Laurent, et vers la nouvelle porte, du côté du moulin, sur la basse Moldau ; la première attaque s'appela celle du maréchal de Schwerin, la seconde celle du comte de Truchsess, et la troisième celle du prince Charles. L'ouverture de la tranchée nous coûta peu de monde, à cause qu'on en déroba la connaissance à l'ennemi. Le 12, on emporta d'assaut le fort de Ziska, et encore un autre fortin qui lui était adjacent. Le prince Guillaume fut Itué, ce jour, à la batterie qui portait le nom de son frère. Les jours suivants, les attaques se poussèrent avec beaucoup de vigueur, le moulin de la basse Moldau fut abîmé par les bombes, et l'écluse, rompue, de façon qu'après que l'écoulement de l'eau eut duré quelques heures, on eût pu donner un assaut au travers de la rivière et entrer au milieu de la ville ; ce fut la raison qui détermina M. de Harsch à battre la chamade ; il y eut encore quelques pourparlers, mais il fut obligé de se rendre prisonnier de guerre. Le 16 septembre, la garnison sortit, forte de douze mille, quelques cents hommes, ce qui était distribué en 22 bataillons; on ne put y donner que des escortes faibles, et il en déserta la moitié avant qu'ils arrivassent en Silésie.

La ville de Prague une fois prise, c'était la grande question de quel côté diriger les opérations.

La trahison des Saxons était encore ensevelie sous les cendres; j'étais, à la vérité, informé que leurs troupes remuaient dans leurs quartiers, mais je ne leur supposais pas la hardiesse de se déclarer contre moi dans un commencement de guerre où la fortune ne s'était pas encore déclarée ni pour l'une ni pour l'autre partie, et d'exposer à la vengeance de leurs voisins un pays ouvert de tous côtés, mal garni de troupes, et qui doit être ruiné de fond en comble, toutes les fois que la guerre s'y fera et que l'ennemi se tourne du côté de Leipzig, qui est le nerf de leur État, le siége de leur commerce et la ressource de leur crédit. Toutes ces suppositions, toutes ces probabilités se trouvèrent ensuite fausses, le marteau d'or des Anglais avait ouvert les portes de fer des Saxons, et l'intérêt d'un moment les avait aveuglés sur un intérêt plus durable.

Je fis deux fautes capitales en quittant Prague, qui ont entraîné après elles le dérangement de toute la campagne. Je n'aurais pas dû <346>m'éloigner de cette capitale, sans l'avoir pourvue suffisamment de vivres, car, au moment où nous l'occupâmes, il n'y avait de provisions de bouche que pour huit jours. Je n'y laissais non plus qu'une garnison' de 6 bataillons et de 300 chevaux, ce qui aurait été bon dans le cas que l'on fût resté dans le voisinage, mais ce qui devenait insuffisant pour défendre une place de cette immense étendue et qui ne se soutient qu'à force de bras. L'autre faute était encore de plus de conséquence: si l'armée avait marché d'abord à Pilsen, nous aurions fort dérangé et peut-être rompu la jonction des Saxons et du prince Charles, nous aurions pris le principal magasin des Autrichiens et nous couvrions Prague; mais au lieu de prendre ce parti sage et qui semblait obvier à beaucoup d'inconvénients, il parut à mes généraux que M. de Batthyany, ayant fait construire à Kamaik un pont sur la Moldau, passerait incontinent cette rivière, dès que nous serions sur la rive gauche; et, dès que les Saxons avaient résolu de se déclarer, M. de Batthyany aurait pu se joindre à eux par la Lusace, me rafler mes magasins sur l'Elbe et faire du dégât en Silésie, pendant que j'aurais été vis-à-vis du prince Charles, qui se serait jeté par les montagnes du Palatinat et de la Haute-Autriche vers Tabor et Budweis, où Batthyany et les Saxons l'auraient pu joindre également. La raison principale qui me détermina de marcher sur Tabor et Budweis, est que les Français ont regardé l'abandon de ceux deux postes, l'année 41, comme la perte de toutes leurs affaires ; de plus, l'Empereur, Seckendorff et Schmettau me rebattaient les oreilles de la nécessité d'occuper ces postes importants.

Le lieutenant-général de Nassau fut détaché, avec 10 bataillons, 10 escadrons de dragons et 30 de hussards, à Tabor; la ville se rendit,346-1 après avoir fait une sortie où nos hussards sabrèrent et firent prisonniers plus de 140 hommes. L'avant-garde marcha de là à Budweis, de là à Frauenberg, et prit ces deux postes sans presque coup férir.346-2 L'armée suivait à pas lents le chemin de Tabor, partagée en deux corps, dont l'un côtoyait la Moldau et l'autre marchait plus à gauche. Dès que j'eus quitté Prague, M. de Batthyany envoya 2,000 hussards, quelques milliers de Talpatschs et 1,000 hommes de cavalerie, à Beraun et Königssaal; ceux-là bloquèrent, pour ainsi dire, la ville de Prague et en occupèrent si bien les avenues qu'on n'y put faire entrer aucunes provisions. Je me suis alors trouvé, pendant quatre semaines, sans aucune nouvelle, sans lettres, sans pouvoir trouver de bons espions, sans savoir si le prince Charles, M. de Batthyany et les Saxons étaient en Bohême ou à Péquin. On s'étonnera peut-être que nous n'ayons tiré aucune lumière des prisonniers que l'on faisait tous les jours sur les ennemis; mais il faut savoir que les prisonniers autrichiens ne sont que des hussards ou des pandoures, détachés avec leurs corps six semaines ou plus longtemps de leur armée, et qui n'en ont aucune connaissance. On ne se trouve <347>guère avancé après les avoir examinés. Les espions du pays ne sont pas de plus grande ressource, on n'en trouve aucun, ou même ils rapportent des faussetés. Le plat pays et le peuple est supersticieusement attaché à son gouvernement ; il cache, enfouit les blés et tout devant les armées, n'apporte ni vivres ni subsistance dans les camps, et vous oblige de nourrir le soldat des denrées que l'on a eu la faculté de conduire avec soi. Les baillis et les prêtres sont encore pis, ils servent d'espions aux Autrichiens, et, ayant toutes les commodités d'apprendre ce qui se passe dans une armée qui embrasse leurs villages dans le camp qu'elle occupe, ils informent incontinent l'ennemi de la moindre manœuvre, d'un petit mouvement, et des détachements qui sortent, et obligent, par conséquent, à n'envoyer jamais des partis, mais des corps, au moins, de 10,000 hommes, pour ne les point aventurer et les exposer mal à propos à quelque affront. Ce n'était pas là tout l'embarras encore, il y en avait un autre auquel des contretemps infinis se sont joints, et qui nous a, dans la suite, forcés à tous les mouvements rétrogradifs que nous avons été obliges de faire. Il y avait pour un mois de farine pour l'armée, chargée sur des caissons, et qui nous suivait sous l'escorte de l'arrière-garde que commandait le général Posadowski. Soit que cet officier s'ennuyât de la lenteur de sa marche, soit qu'il y eût quelque autre accident, il n'amena à Tabor que la moitié de nos caissons qui avait été à la tête de l'escorte; l'ennemi n'en enleva pas un seul, mais Posadowski les laissa en chemin, à la garde des gens du pays qui, bien éloignés de s'employer pour les faire suivre, brisèrent les caissons, volèrent les chevaux et la farine et chassèrent les valets qui les conduisaient. Le seul moyen qu'il y avait pour remédier à ce malheur, était de faire livrer et contribuer le pays. Le régiment de Dieuri, nouvellement levé, paraissait le plus propre à cet emploi ; il y fut destiné, mais il arriva encore d'autres fatalités qui achevèrent de nous déranger, comme on le verra dans la suite.

L'armée à Tabor, et l'avant-garde à Budweis, il s'agissait de régler les opérations ultérieures. Nous pouvions aller à Neuhaus, pour donner au prince Charles des jalousies sur l'Autriche; nous pouvions aller à Budweis, et nous pouvions passer la Moldau, à Tein, pour marcher au prince Charles que l'on nous disait camper à Pisek. Je ne me serais pas aventuré si avant, si un malheureux espion ne m'avait assuré que l'armée autrichienne avait marché sur trois colonnes vers Budweis : nous n'eûmes pas passé la Moldau,347-1 que nous apprîmes que sa nouvelle était fausse; on sut ensuite par les partis que l'ennemi était campé à Mirotitz, à deux milles de l'autre côté de Pisek, proche de la Moldau. Ce faux avis rendit ma manœuvre mauvaise, qui n'était bonne qu'au cas où l'ennemi se serait approché de Protiwin ou de Budweis. Nous séjournâmes cependant trois jours dans le même camp,347-2 et dans cet espace347-3 <348>le général Ghillanyi passa la Moldau, avec un corps de 10,000 hommes, tomba sur trois ou quatre détachements du régiment de Dieuri, qu'il défit, et empêcha toutes les livraisons du pays pour Tabor. Nous étions au . .348-1 de septembre348-2 et nous n'avions de farine à Tabor que pour huit jours, point de ressources pour en faire de nouvelles provisions, ni aucune espérance d'en pouvoir prendre sur l'ennemi, ce qui me fit prendre le parti de marcher à Tabor,348-3 pour être de là plus à portée de me rapprocher de mes magasins. J'appris à Tabor que les Saxons allaient joindre les Autrichiens, que le prince Charles faisait faire quatre ponts sur la Moldau, qu'il faisait amasser des provisions à Beneschau, et qu'il voulait me couper de Prague et de la Sazawa. Je savais que le poste de Beneschau est inattaquable, et que, si l'ennemi s'y mettait une fois, ne fût-ce qu'avec un détachement d'une vingtaine de mille hommes, il serait impraticable de l'en déloger; que ce mouvement me rejetait sur Rattay et sur Pardubitz, où j'avais un petit dépôt; que je n'avais que pour huit jours de farine, ce qui était opiné suffisant pour faire la marche de Beneschau; que j'aurais par conséquent manqué de pain avant que d'atteindre Pardubitz; que de plus, si les ennemis se mettaient entre moi et Prague, cette ville et la garnison, trop faible pour en soutenir la vaste enceinte, seraient à coup sûr perdues. Il y avait à considérer, d'un autre côté, que ce mouvement rétrogradif était fort préjudiciable à mes desseins, qu'il pouvait me faire perdre Tabor et Budweis et donner même à mes alliés des soupçons contre ma fidélité. Ce raisonnement était fort, mais la faim était plus forte encore, et l'article de Prague un argument sans réplique. B restait à savoir si l'on garderait les postes de Tabor et de Budweis. Si l'on considérait d'un côté que, nous en éloignant, il y avait à craindre que l'ennemi ne les prît, nous aurions dû les évacuer d'abord, mais à cela il y avait beaucoup à objecter. Je savais que le prince Charles était joint par les Saxons, je savais qu'il avait fait faire des ponts sur la Moldau ; ce qui semblait indiquer qu'il n'aurait pas quitté l'Alsace, qu'il n'aurait pas rassemblé tant de forces et qu'il ne ferait pas un mouvement aussi décisif que celui de passer la Moldau, s'il n'avait intention d'en venir à une bataille.

A ces préjugés se joignaient ceux de l'expérience. Dans la dernière guerre, l'ouverture des campagnes se faisait par une bataille, et ce qui achevait de me persuader que c'en serait de même de celle-ci, c'est la coutume qu'ont les Autrichiens, de tirer tout le parti qu'ils peuvent de leurs auxiliaires, le peu de risque qu'il y avait pour eux de faire tuer quelques Saxons, et l'espérance qu'ils pouvaient avoir qu'en me battant ils gardaient le champ libre et gagnaient la faculté de tourner toutes leurs forces, ou du moins la plus grande partie, contre la Bavière. Enfin, soit que l'on songe ce que l'on espère, ou que ces raisons furent solides, elles me parurent du moins telles, et, dans cette disposition, je <349>devais conserver nécessairement les postes de Tabor et de Budweis, qui ôtaient à l'ennemi, s'il avait été battu, toutes ses ressources, lui coupaient le chemin d'Autriche et le rejetaient dans cette partie montueuse de la Bohême qui tient à la Basse-Autriche.

Il s'est manifesté dans toute cette campagne une fatalité si ouverte et si opiniâtre à déranger mes entreprises, que je ne puis m'empêcher d'en rapporter quelques exemples, à mesure que l'occasion s'en présente.

A la prise de Budweis, il ne s'était presque point trouvé de munitions de guerre dans la place; le régiment de Kreytzen, qui devait défendre cet endroit, n'avait que soixante coups à tirer, par tête; on ne pouvait alors suffisamment ravitailler la place, étant trop éloignée de Prague; j'envoyais349-1 cependant une assez bonne provision de cartouches au général Kreytzen, si un accident que l'on ne pouvait prévoir, ne l'en eût privé. Le général du Moulin était commandé avec quelques bataillons pour prendre son chemin par Budweis et pour repasser par Neuhaus à Tabor, afin d'amasser des vivres et surtout de la farine; les caissons de poudre entrèrent à Budweis avec le détachement de du Moulin, et celui qui avait la lettre à rendre au général Kreytzen, n'arriva que le lendemain, de sorte que les caissons suivirent le général du Moulin, et que le général Kreytzen ne reçut la lettre qui lui marquait que les caissons étaient pour lui, que lorsque le petit convoi était à une grande marche de lui et que beaucoup de hussards lui avaient déjà ôté la communication avec du Moulin; depuis ce moment l'armée perdit, également, la communication avec cette ville. Tabor devenait absolument nécessaire pour avoir la communication avec Budweis, et, de plus, il y avait dans la ville 500 malades qu'il nous était impossible de conduire avec l'armée, faute de charriage, ainsi nous ne pûmes l'abandonner.

Nous nous mîmes le . . de septembre349-2 en marche vers la Sazawa, et je détachai le maréchal de Schwerin, avec 16,000 hommes, pour gagner Beneschau, ce qui me réussit;349-3 l'armée y arriva deux jours après, nous occupâmes ce poste sonica, ayant gagné quatre heures sur l'ennemi. Nous séjournâmes huit jours au camp de Konopischt et Beneschau, pendant lequel temps j'envoyais un détachement à Leitmeritz pour faire transporter incessamment des farines, tant pour l'armée que pour Prague. Les Autrichiens qui, voyant leur coup manqué, s'étaient retirés du côté de Neweklau, furent bientôt joints par toutes leurs forces, et le prince Charles fut se camper à Marschowitz. J'appris cette nouvelle349-4 avec beaucoup de plaisir, me flattant de pouvoir attaquer le prince Charles et de le battre. Je fis défiler l'armée sur huit colonnes, et nous prîmes le chemin de Marschowitz, aux environs duquel nous arrivâmes après le coucher du soleil,349-5 de façon que l'armée n'était pas même tout-à-fait en bataille pendant la nuit. Le lendemain, à la pointe du jour, nous <350>nous préparions à attaquer les Autrichiens. Us étaient postés sur une montagne qui faisait comme un demi-cercle dont la gauche tournait vers notre droite; et leur droite était entièrement éloignée de nous; dans la vallée, au pied de la montagne, il y avait un marais au travers duquel il coulait un ruisseau marécageux; à l'extrémité de leur gauche, l'on voyait quelques grands étangs qui couvraient tout leur flanc, en retournant vers les derrières. Nous commencions à nous former de notre côté sur la montagne qui était vis-à-vis de leur centre, mais le terrain qu'il y avait à notre droite, se trouva si étroit qu'à peine aurait-on pu mettre six bataillons en bataille, et, cela fait, on ne pouvait les faire marcher en avant, à cause du précipice qui séparait les deux armées. Le centre était encore plus immuable, car un monticule et deux fonds considérables le séparaient de l'armée ennemie. Toutes ces positions bien reconnues, il fut facile de juger que c'aurait été une témérité très condamnable que d'engager une affaire dans ces circonstances. C'est ce qui m'obligea à me replier vers mon camp; je cachai cette manœuvre à l'ennemi par quelques fausses démonstrations, comme si l'on avait toujours intention de les attaquer, ce qui me réussit si bien que toute l'armée rentra dans le camp, sans qu'il parût une âme de l'ennemi.

Les fourrages étaient cependant consumés, aux environs de Konopischt, où nous avions séjourné longtemps; il fallait changer de camp; nous ne pouvions prendre d'autre position que celle de Pischeli,350-1 le côté de Rattay étant trop montûeux et moins abondant en fourrage que les autres contrées de Bohême. Deux jours après, le prince Charles vint occuper le camp que nous avions quitté. Le fourrage se livrait à son armée par ses derrières, ce qui lui donnait autant de facilité que nous trouvions d'obstacles. De Prague à Pischeli, il y a cinq lieues d'Allemagne; les chemins étaient remplis de défilés, l'ennemi nous enlevait quelquefois des caissons, et, pour surcroît d'inconvénients, les gens préposés aux vivres s'étaient si mal acquittés de leur fonction qu'après avoir séjourné huit jours à Pischeli, nous n'étions pas en avance de pain d'un jour pour l'armée.

Les ennemis avaient fait un détachement, commandé par le général Ghillanyi, qui marcha le même jour à Kammerburg que nous marchions à Pischeli. Je fis, d'abord que j'en fus informé, un gros détachement contre celui-là, sous les ordres du général Nassau, avec ordre de côtoyer le corps autrichien et de le chasser de Kammerburg. Le général s'acquitta très intelligemment des ordres que je lui avais donnés, il chassa M. Ghillanyi de Kammerburg350-2 et le prévint sur le poste de Kolin350-3 dont l'Autrichien voulait s'emparer. M. de Nassau n'eut pas fait deux marches qu'il me fut impossible de communiquer avec lui, et bien moins de recevoir des nouvelles de ce qu'il était devenu. Dans cette situa<351>tion, j'appris351-1 que le prince Charles avait décampé, qu'il se portait vers Rattay, et que son dessein était d'occuper le camp de Jannowitz, Si j'avais pu, dans cette conjoncture, gagner le camp de Kuttenberg avant le prince Charles, je suis d'opinion que j'aurais pu me soutenir en Bohême, ou, du moins, en conserver une partie. Je voulus faire marcher incessamment l'armée, mais il n'y avait pas de pain; le convoi devait arriver le lendemain. Perdre deux jours dans un cas si pressant, c'était perdre Pardubitz et ma communication avec la Silésie, la seule qui me Testait, depuis que les Saxons avaient barré leurs frontières. Dans cet embarras, je me résolus de marcher avec l'aile gauche de l'armée à Schwarz-Kosteletz et de laisser le prince Léopold avec l'aile droite pour amener le convoi des vivres. J'arrivai le . . de . . .351-2 au camp. Le lendemain, lorsque j'allai me mettre en marche, pour me poster sur Kaurzim, il me vint deux cuirassiers, déserteurs des Autrichiens, qui déposèrent que toute leur armée était à Jannowitz. Dans ce cas, j'aurais fait une manœuvre dangereuse, si j'avais poursuivi le chemin de Kaurzim, principalement n'ayant aucune nouvelle du général Nassau, que je croyais à Pardubitz. Je me crus donc obligé de diriger ma marche sur Böhmischbrod, où je fus joint, le lendemain,351-3 par le prince Léopold et l'aile droite. Là, j'appris par un juif qui faisait le vivandier dans l'armée et qui venait de Kolin, que le général Nassau y était campé de l'autre côté de l'Elbe, ne se croyant pas sûr de celui de la Sazawa, vu la proximité de l'armée ennemie. J'appris d'un autre côté que les ennemis en voulaient à mon magasin de Pardubitz, où il n'y avait qu'un bataillon pour le défendre; cela m'engagea à y envoyer le général du Moulin, avec 6 bataillons que le général Nassau détacha. Tous ces postes de Bohême sont de nature qu'il leur faut des remparts de remblai pour les défendre. L'armée marcha le . .351-4 à Kaurzim, où notre aile droite se trouva fort près des ennemis, séparée seulement par des bois et des marais. Le lendemain, nous marchâmes à Gross-Gbell, ce qui nous approchait de Kolin et nous mettait en passe de gagner, le lendemain, le camp de Kuttenberg. Mais les Autrichiens, s'apercevant de notre dessein, et ayant encore un demi-mille d'avance sur nous, forcèrent leur marche et gagnèrent la hauteur avant nous. Je laissai exprès le général Nassau à Kolin dans l'espérance que ce détachement donnerait aux ennemis la hardiesse de m'attaquer, ou les induirait peut-être à prendre des camps moins forts que ceux qu'ils avaient été jusqu'alors fort soigneux de choisir. Mes espérances furent vaines, le maréchal de Traun ne fit aucun mouvement pour quitter ses montagnes, et il me fut impossible de l'y forcer. Pendant que M. de Traun était sur la cime de ses rochers, Nadasdy se mettait toujours à portée d'observer notre droite, et Ghillanyi notre gauche. Pour faire un fourrage, la moitié de l'infanterie était obligée de le protéger, et l'espace étroit du <352>camp ne nous fournissait pas, à beaucoup près, ce qu'il nous fallait pour le nécessaire. Il est toujours fâcheux pour une grande armée d'être à l'étroit, mais cette situation était susceptible de remèdes: le nombre des dyssenteries qui augmentait considérablement dans l'armée, n'était pas de cette nature. Le soldat avait manqué d'eau de vie et de bière depuis la seconde marche que nous avions faite du côté de Tabor. La nécessité nous avait même obligés de lui fournir de la farine au lieu de pain. Cette mauvaise nourriture, en partie, et principalement les eaux bourbeuses des lacs et des étangs, jointes aux fatigues des marches continuelles que nous faisions — ajoutez à tout cela les nuits froides de l'arrière-saison — rendaient les trois quarts des fantassins malades, soit de fièvres malignes ou de dyssenteries. Toutes ces tristes circonstances faisaient envisager le cantonnement des troupes comme l'unique moyen de les conserver; ce fut cette circonstance qui m'obligea à passer l'Elbe le . .352-1 de novembre. Nous fîmes cette manœuvre-là avec tant de précaution que l'ennemi n'osa nous entamer, ou que: nous étions en état d'engager avec avantage une affaire générale.

Lorsque toute l'armée eut passé l'Elbe, jusqu'aux dix bataillons près que j'avais destinés à garder Kolin, il vint un corps de quelques mille Hongrois qui voulurent attaquer Kolin ;352-2 ils en perdirent promptement l'idée et se retirèrent tout de suite à un demi-mille de là. Lès postes de Kolin et de Pardubitz doivent être regardés comme les principaux qui se trouvent sur l'Elbe ; Pardubitz est important pour la communication de la Silésie, Kolin l'est pour celle de Prague, de Leitmeritz et de Nimburg, où étaient les magasins de l'armée. Il y avait encore d'autres avantages à tirer de ces deux postes, puisqu'ils empêchaient l'ennemi de pouvoir prendre des quartiers entre l'Elbe et la Sazawa, que, moyennant ces deux débouchés, leurs quartiers auraient été raflés tout autant de fois qu'ils auraient hasardé d'en prendre, soit à Kuttenberg, Czaslau, Chrudim etc. L'armée ennemie ne fit aucun mouvement pendant quelques jours et resta tranquillement sur les montagnes; ils attaquèrent encore une fois nos troupes à Kolin,352-3 mais ils y furent si mal reçus, qu'ils se retirèrent avec une perte de 600 hommes.

Mon armée était distribuée de façon que 10 bataillons et 10 escadrons étaient sous le général de Nassau à Kolin, 10 bataillons étaient sous les ordres du général du Moulin à Pardubitz, et l'armée, cantonnée en ordre de bataille, occupait le terrain qui se trouve entre Chlumetz, Bohdanetz et l'Elbe; des bataillons de grenadiers étaient postés le long de l'Elbe, de demi-mille en demi-mille; entre ces bataillons, il y avait de Pardubitz à Kolin 40 escadrons de hussards, pour faire les patrouilles le long de l'eau, observer la quantité étonnante de gués qui s'y trouvent, ensuite avoir un œil sur les mouvements de l'ennemi, et principalement avertir l'armée au moment qu'on s'apercevrait de quelques pré<353>paratifs pour la construction d'un pont. Les ordres et les mesures étaient si bien pris que l'armée, étant une fois avertie, ne pouvait pas manquer de faire échouer les desseins de l'ennemi ; mais on sait que le chapitre des accidents est plus vaste à la guerre qu'en toute autre occasion.

Pendant mon séjour à Trnowa, je reçus des avis, par des lettres de Vienne interceptées, que les ennemis avaient un dessein de conséquence, qu'ils exécuteraient le 18 de novembre. Il était bien difficile de juger de ce dessein ; j'étais dans l'opinion que, vu les mesures que j'avais prises pour empêcher aux ennemis le passage de l'Elbe, et vu la saison avancée, ils ne tenteraient pas de l'entreprendre, mais j'avais reçu des nouvelles de Prague que l'on y faisait construire des échelles dans les environs, ce qui me faisait juger que le dessein des ennemis pouvait être plutôt de surprendre une ville dont l'enceinte était immense, que de tenter quelque chose sur une armée postée derrière une rivière, à portée de la soutenir. Ce raisonnement, qui paraît simple et naturel, m'induisit à jeter trois bataillons et cinq escadrons de dragons dans Prague, pour mettre la ville hors de toute insulte. Le 18 arrivé, je fus fort intrigué d'apprendre quels pouvaient être les mouvements de l'ennemi; j'eus beaucoup de faux avis, entre autres qu'un corps de leurs troupes marchait vers Kaurzim et Prague, et qu'un gros corps s'avançait vers Pardubitz. Ce même jour, le général Nassau m'écrivit que ses espions lui déposaient unanimement que l'ennemi avait dessein de l'attaquer à la pointe du jour. Le 19 arriva enfin, j'étais levé avant cinq heures et j'entendis un grand bruit de canon, mêlé à des charges très fortes de petites armes. Je supposais d'abord que ce serait quelque nouveau dessein que l'ennemi voulait exécuter sur Kolin; le prince Léopold me fit dire la même chose de Bohdanetz, et tout ce que j'en appris, se réduisit à ce que l'ennemi tentait quelque chose sur cette ville. J'étais d'autant moins embarrassé de cet événement que je connaissais la situation de Kolin, pour y avoir posté les troupes moi-même, et je n'attendais que des avis ultérieurs du général Nassau, pour faire faire à mes troupes la manœuvre qui aurait été la plus convenable en ce cas. Mon incertitude dura jusqu'à midi, qu'un officier vint me dire que les Autrichiens avaient passé l'Elbe avec toute leur armée auprès de Selmitz. On peut s'imaginer facilement dans quel état de surprise me jeta cette nouvelle; il n'était plus temps à songer d'empêcher une chose qui était déjà faite; il ne s'agissait plus que d'y apporter un remède prompt et efficace, ou qui, du moins, levât les inconvénients considérables qu'il y avait à craindre. Je fis, pour cet effet, rassembler, encore le même jour, l'armée entre Bohdanetz et Chlumetz; là, j'appris par le lieutenant-colonel Wedell, dont le bataillon avait été à Selmitz, que les hussards, n'ayant pas fait leurs patrouilles avec l'exactitude qui se devait, n'avaient pas averti d'abord ce lieutenant-colonel des mouvements des ennemis ni des pontons que la patrouille avait <354>entendu conduire; que, lorsque Wedell s'était mis en marche avec son bataillon, pour empêcher le dessein de l'ennemi, il y en avait déjà eu trois mille de passés; qu'il les avait attaqués, indépendamment de leur nombre, et les avait obligés à se retirer sous la protection de trois batteries qu'ils avaient de 50 canons; que dans cette terrible situation nos grenadiers avaient arrêté l'ennemi trois heures, mais qu'ils avaient été obligés de se retirer faute de secours, n'ayant perdu que deux officiers et 100 hommes; que l'on avait envoyé trois officiers pour m'avertir de ce qui se passait, qu'il y en avait eu un de tué et les autres faits prisonniers. En un mot, la fatalité voulut avoir si bien secondé les Autrichiens dans cette rencontre que leur dessein réussit comme ils l'avaient projeté, malgré toutes les dispositions que l'on avait faites pour le faire échouer.

L'armée ne fut assemblée qu'à l'entrée de la nuit, il nous manquait encore le détachement de Nassau. Ce fut tout mon soin de faire des mouvements capables de faciliter sa jonction, et d'aviser à ce qu'il y aurait à résoudre pour la ville de Prague.

Il était absolument nécessaire, alors, de choisir entre le parti, de tirer avec l'armée vers Nimburg et Prague, ou vers Königgrätz. Dans le premier de ces cas, je m'exposais à des inconvénients si dangereux que j'aurais été perdu avec l'armée, si j'avais choisi ce parti-là ; car les Autrichiens, sentant que j'étais coupé de mon pays par les frontières de la Saxe, et que je n'avais plus d'autre connexion avec mes États que par la Silésie, se seraient postés le long des gorges et des défilés qui conduisent dans ce duché, moyennant quoi j'aurais manqué de toutes les choses nécessaires pour refaire une armée en tout genre; et ce qui était plus décisif encore que tout ceci, c'était que le trésor de l'armée était épuisé à la fin de novembre, que je ne pouvais trouver de l'argent en assez grande quantité pour payer les troupes Toutes ces raisons, résumées, me déterminèrent à marcher vers Königgrätz, après avoir attiré à moi le corps du général Nassau. Ce n'étaient pas encore là tous les embarras de ma fâcheuse situation. Mes dernières lettres de Prague portaient qu'il y avait de la farine pour six semaines pour la garnison, mais pas davantage. Cette garnison était augmentée, depuis, de trois bataillons et de cinq escadrons; dès que je voulais marcher vers Königgrätz, je me voyais hors d'état de ravitailler Prague. S'il y avait eu pour trois mois de vivres dans la ville, j'aurais laissé la garnison dedans et tout ce qui en dépendait ; mais, me voyant hors d'état de la pouvoir secourir en six semaines, je fus obligé, pour sauver la garnison, de donner encore le même soir les ordres pour lui faire évacuer la ville, dirigeant sa marche par Leitmeritz, Böhmisch-Leipa, à Friedland. Le lendemain, je fis un mouvement avec l'armée qui m'approchait de l'ennemi — que je ne pouvais attaquer à cause des lacs — ; je m'y tins le lendemain, ce qui donna au général Nassau la faculté de gagner Neubydzow; alors je marchais vers Nechanitz, où <355>notre jonction se fit le 24, sans que le général Nassau eût reçu un mot de mes ordres, et sans que j'eusse appris un mot de lui; mais nous calculâmes si juste les manœuvres de l'un et de l'autre que nous n'avons manqué que d'une demi-journée le moment de la jonction. La jonction faite, nous allâmes camper à Königgrätz, nous évacuâmes Pardubitz, et l'armée se divisa en trois colonnes, pour entrer par les trois gorges des montagnes en Silésie ; il n'y eut que de petites affaires d'arrière-garde, où les ennemis ont eu constamment le désavantage.

J'apprends aujourd'hui que la garnison de Prague a heureusement regagné la frontière. Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.



343-1 Dieselbe Relation schickte der König unter dem 19. December an die Marschälle von Noailles und von Coigny.

343-2 Tetschen.

343-3 28. August.

344-1 29. August.

344-2 6. September.

346-1 23. September.

346-2 30. September, 1. October.

347-1 Der Uebergang erfolgte am 4. October.

347-2 Bei Zirnau.

347-3 6. October. 348

348-1 Lücke in der Vorlage.

348-2 Sic.

348-3 8. October.

349-1 8. October.

349-2 Am 13. October setzte sich Schwerin, am 14. der König mit der Hauptarmee in Marsch.

349-3 17. October.

349-4 23. October.

349-5 24. October.

350-1 25. October.

350-2 27. October.

350-3 31. October.

351-1 30. October.

351-2 31. October.

351-3 2. November.

351-4 3. November.

352-1 8. November.

352-2 9. November.

352-3 14. 15. November.