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1805. AU MINISTRE D'ETAT COMTE DE BEESS A DRESDE.

Beess berichtet, Dresden 20. April : „Le comte de Saint-Séverin vient de m'informer que le comte de Brühl lui a fait entendre nettement que le ministre de Russie lui avait remis une déclaration de guerre dans les formes, de la part de Votre Majesté, contre la Saxe, et que le roi de Pologne avait ordonné de la communiquer à tontes les cours de l'Europe, pour mettre dans le grand jour la manière dont Votre Majesté en agissait envers lui. Que ce Prince, loin de se laisser intimider par les menaces, allait réclamer le secours de tous ses alliés, et nommément de l'impératrice de Russie, de la reine de Hongrie, de l'Angleterre et de la Hollande, qui se joindraient toutes pour garantir la Saxe de l'invasion dont elle était menacée, et qu'on fondrait non pas avec 20,000 hommes, comme Votre Majesté songeait de le faire en Saxe, mais avec 50,000 sur les Etats de Votre Majesté. Le comte de Saint-Severin, extrêmement surpris de la façon dont le ministre saxon s'expliquait sur ce chapitre, lui demanda si sa cour avait donc absolument résolu de faire agir ses troupes auxiliaires contre les États de Votre Majesté en Silésie, puisque ce n'était qu'en ce cas-là seulement que Votre Majesté Se verrait obligée d'en venir à une rupture avec le roi de Pologne; à quoi le comte de Brühl lui répondit avec la même chaleur qu'oui; que la Saxe avait pris son parti, et que les troupes auxiiaires saxonnes qui étaient en Bohême, tomberaient avec les Autrichiens en Silésie.“

Neisse, 23 avril 1745.

Je viens de recevoir la dépêche que vous m'avez envoyée en date du 20 de ce mois. Il faut absolument que l'orgueil du comte de Brühl soit monté au suprême degré, puisqu'il a pris tant de feu sur une déclaration aussi innocente que juste et raisonnable, que celle que j'ai fait faire, pour détourner la cour de Saxe de faire entrer ses troupes auxiliaires dans la Silésie; aussi espéré-je encore de lui que, lorsque ses premiers emportements l'auront quitté, et quand il y aura pensé de sens rassis, il aura trouvé lui-même le peu de raison qu'il y a en voulant prétendre que je dusse me laisser assaillir impunément par les troupes saxonnes dans mon propre pays, sans prendre en main tous les moyens licites pour une juste défense. Que si la Saxe veut réclamer pour cela le secours de tous ses alliés, elle en est la maîtresse, mais je suis trop persuadé que tous ses alliés seront trop sages et trop raisonnables de lui prêter leur assistance sur une demande aussi injuste qu'extraordinaire; outre que des armées de 50,000 hommes ne se forment pas si aisément, comme on les projette peut-être sur le papier. Ainsi, tout ce que le comte de Brühl a voulu menacer contre moi, n'opèrera pas plus sur moi qu'il prétend que les menaces qu'on m'attribue avoir faites au Roi son maître, ont opéré sur celui-ci, et j'ai pris mes mesures pour me Wen défendre contre quiconque voudra venir m'attaquer. Quant à vous, je veux que vous restiez tranquillement à Dresde, jusqu'à ce que mes ordres vous parviennent par mon ministre d'État, le comte de modewils, et vous ne laisserez point, en attendant, d'être fort attentif à tout ce qui s'y passe, et de m'en faire toutefois au plus tôt possible vos relations. Au reste, le sieur Splitgerber a ordre de vous faire