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2037. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BERLIN.

Rohnstock, 24 octobre 1745.

Mon cher Podewils. Je suis en tout de votre sentiment et je vois avec plaisir que nous nous rencontrons si bien. Cependant, je suis si ébloui des assurances de l'Angleterre, de l'esprit de parti que prendra la nation pour soutenir son ouvrage, que je ne crois pas que la cour de Vienne puisse esquiver la paix, mais bien qu'elle puisse trouver des délais.

Quoi que les rebelles fassent en Écosse, voilà l'hiver qui arrive, la saison des opérations passée, et, par conséquent, les avantages de ce parti suspendus jusques au printemps. Il nous faut attendre deux choses : l'une, que le ministère anglais revienne de son premier étourdissement, l'autre, que la reine de Hongrie revienne de son ivresse de Francfort. Quand elle aura entendu ce que Robinson a ordre de lui dire, qu'elle verra le tout de bon des Anglais, je réponds qu'elle se verra obligée de plier, d'autant plus que chez eux la disette d'argent est très grande; marque de cela, que le commissaire qui paie leurs prisonniers n'a pas reçu depuis trois semaines un sol pour leur donner le prêt. Supposons qu'une révolution totale arrive en Angleterre, d'où la Reine prendrat-elle de l'argent? qui paiera la Saxe, la Savoie, la Hesse etc.? Si l'Angleterre se soutient, elle nous soutiendra aussi, et il n'y a pas à douter qu'elle ne couronne son œuvre en remplissant ses engagements? Un des grands motifs de mon départ est l'arrangement des fonds pour la campagne prochaine; j'ai, en attendant, pourvu au nécessaire, et nous sommes en règle jusqu'à la fin de décembre.

L'armée autrichienne prendra ses quartiers le 28 de ce mois; j'attends cet événement pour partir, ne voulant pas laisser l'œuvre de cette campagne incomplète.

Je suis bien aise que les Suédois et tout le monde nous rendent la justice qui nous est due, et que du moins l'État et le public n'aint rien à me reprocher.

J'ai écrit la lettre, il y a huit jours, que le colonel Hamilton désire; il doit l'avoir à présent.1

Vous pouvez débiter à Berlin que l'on m'attend d'un jour à l'autre, ce qui amusera sûrement le comte Woronzow.2

J'ai bien de la besogne ici, et j'ai trouvé tant de lacunes à remplir que je n'ai pas eu le temps de m'ennuyer.

Adieu. Je me flatte que vous serez assez poli pour m'apprendre toute sorte de bonnes nouvelles à mon arrivée à Berlin, où je compte d'être, en cas que les Autrichiens se séparent le 28, le 1er de novembre au soir.

Je suis avec bien de l'estime votre fidèle ami

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



1 Führer einer Anzahl schwedischer Volontäre im preussischen Heere. Der Brief liegt nicht vor.

2 Woronzow verliess Berlin erst nach der Rückkehr des Königs, der ihn am 2. November empfing.