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2061. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Berlin, 12 novembre 1745.

Vous verrez, par la copie ci-close d'un avertissement que je viens de recevoir,1 ce que les cours de Vienne et de Dresde ont comploté contre moi et de quelle façon elles pensent de s'y prendre pour m'abîmer, s'il est possible; aussi suis-je averti, à n'en pouvoir douter, que le général autrichien de Griinne est actuellement en marche avec deux régiments de cuirassiers, quatre d'infanterie et 2,000 pandours, pour entrer de la Bohême en Saxe et pour se joindre aux troupes saxonnes qui cantonnent jusqu'à présent auprès de Leipzig, afin d'envahir conjointement mes anciennes provinces. J'avoue que de pareilles démarches, avec celle que la cour de Russie a faite à l'instigation des Saxons, dont je vous ai informé par ma précédente, ne laissent pas de me causer de la surprise, ayant toujours cru que le ministère anglais soutiendrait efficacement son ouvrage par rapport à la convention d'Hanovre et qu'il ferait faire, conjointement avec les ministres de la république de Hollande, de si fortes représentations aux cours de Vienne et de Dresde que celles-ci n'oseraient pas y regimber; mais comme les faits démontrent tout une autre chose, il faut que les représentations qu'on a faites de la part des Puissances maritimes aux cours susdites, n'aient pas été assez énergiques, ou que celles-ci les méprisent ouvertement et n'en fassent pas le moindre cas. Vous vous souviendrez de toutes les assurances les plus fortes que le roi de la Grande-Bretagne et ses ministres vous ont données qu'ils soutiendraient par les moyens les plus efficaces, et même par la pointe de l'épée, ce dont ils étaient convenus avec moi par la convention d'Hanovre, et qu'ils ne se laisseraient point impunément mépriser de la reine de Hongrie et de son allié, la Saxe: voilà le cas à présent, et ma volonté est que vous deviez représenter sans le moindre délai tout ce que je viens de vous dire, de la manière la plus forte et la plus énergique, au lord Harrington, bien que sans aigreur et dans des expressions honnêtes. Vous lui direz que, comme il paraissait absolument, par les démarches des Autrichiens et des Saxons, que la paix avec eux et moi était fort éloignée, et qu'ils ne témoignaient pas la moindre considération pour le roi d'Angleterre, il me fallait savoir à présent ce que j'avais à espérer de la Grande-Bretagne et ce qu'elle voudrait faire pour moi pour soutenir sa dignité et les engagements qu'elle avait pris avec moi de la manière la plus solennelle; qu'il n'y avait pas de temps à perdre et que le cas était si pressant qu'il fallait ou tout faire ou rien; qu'avec l'assistance du bon Dieu on ne m'attaquera pas impunément, mais que, si l'Angleterre ne prenait pas de vigoureuses résolutions, je



1 Eine durch Rudenschöld vermittelte Mittheilung des schwedischen Gesandten in Dresden von Wulwfenstjerna über den Plan der Oesterreicher und Sachsen zu einem Winterfeldzug gegen die Mark Brandenburg. Vergl. Preussische Staatsschriften I, 720, Anm. 1.