1699. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Berlin, 26 janvier 1745.

J'ai vu avec beaucoup de satisfaction, par votre dépêche du 15 de ce mois, et surtout par le post-scriptum de la même date, que le lord Harrington s'est expliqué envers vous d'une manière si raisonnable sur l'affaire de la pacification, que j'ai tout lieu de me flatter qu'il voudra se prêter à travailler de concert avec moi pour mener à sa perfection un ouvrage si salutaire et si important pour le repos général de l'Europe, et surtout pour les intérêts de la Grande-Brétagne, quand même ce ne serait d'abord que de rétablir la paix en Allemagne, dont la guerre a été si onéreuse pour la nation britannique, sans qu'il lui en puisse revenir aucun profit et avantage.

Vous direz donc de ma part à milord Harrington que j'étais extrêmement satisfait de sa façon de penser et de ses sentiments justes et équitables sur ce sujet, et que je contribuerais, en ce qui dépendrait de moi, pour tâcher de rétablir de concert avec l'Angleterre la paix en Allemagne.

21-1 A quoi vous ajouterez que j'étais charmé de le voir au poste où il est, et que j'avais irifiniment plus confiance dans son caractère que je n'avais pu prendre dans celui du lord Carteret, dont le caractère était connu; que je pouvais lui dire bien sincèrement que dans tout ce que j'avais fait jusqu'à présent, l'unique but que je m'étais proposé avait été toujours la paix, et qu'il pouvait compter que, dans mon alliance avec la France, il n'y avait rien qui fût opposé au rétablissement de la paix, ou pour m'empêcher d'y donner les mains, si on y peut parvenir. Qu'il serait à voir à présent si l'on n'en pourrait pas venir à bout de contenter tout le monde, que je me confie à lui, non pas tant comme secrétaire d'État que comme à un ami que j'estimais sincère, et dont je me flatte qu'il n'en ferait jamais mauvais usage; mais que si même mes pensées n'étaient pas de son goût, il aurait la discrétion de n'en parler à âme qui vive; qu'ainsi, je le priais donc de me dire cordialement qu'est ce qu'il en pense, si on commençait à pacifier l'Allemagne sur le pied suivant, savoir:

Qu'il fallait, outre la reconnaissance plénière et illimitée de l'Empereur et de sa dignité impériale et élection, la restitution entière de ses États héréditaires, et pour son dédommagement, parceque la reine de Hongrie avait tant de fois envahi ses États, quelque satisfaction, dont la plus convenable serait l'Autriche antérieure ou les possessions de la cour de Vienne en Souabe, qui, dans le fond, étaient peu de chose, et dont la reine de Hongrie tirait peu.

Qu'il serait nécessaire de comprendre dans cette pacification la maison palatine, celle de Hesse et les autres qui ont été du parti de l'Empereur.

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Que pour mon particulier, je m'étais à la vérité déclaré de ne demander rien pour moi, mais que, depuis que la reine de Hongrie venait d'enfreindre la paix qui avait subsisté entre nous, en attaquant mes États, et en y commettant des cruautés et des exactions exécrables, en saccageant et ruinant le pays, j'avais besoin pour moi, pour n'être plus exposé à de pareils inconvénients, et pour le dédommagement du passé, que la reine de Hongrie me cédât les débouchés des montagnes d'où ses troupes sont entrées dans ma Silésie.

A ce sujet, je vous dirai pour votre instruction que vous pourriez voir quel chemin vous pouvez faire avec cette proposition : elle est vague, pour qu'on la puisse étendre ou restreindre, selon que je le jugerai à propos. Ainsi, si vous voyez qu'il y a quelque espérance de ce côté-là, vous pouvez étendre ce que je souhaite — outre la partie de la Haute - Silésie avec les enclavures de la Moravie qui par la paix de Breslau sont restées à la reine de Hongrie — sur les gorges des montagnes du côté de la comté de Glatz, comme Nachod, ville et château, et les petites villes de Neustadt, Opotschno, Braunau. Mais si vous voyez trop d'obstacle sur tout cela, ce sera, au moins, l'ultimatum de mes prétentions que la Haute-Silésie.

Pour disposer d'autant plus le lord Harrington d'entrer dans mes vues, vous lui insinuerez que je suis à présent dans la plus belle situation du monde, après avoir chassé les Autrichiens de toute la Silésie; que je pourrais commencer la campagne qui vient avec espérance du plus grand succès du monde, mais qu'indépendamment de cela, je sacrifierais mes intérêts pour le salut public, et que j'accepterais avec plaisir la médiation dont milord Harrington vous avait parlé, savoir de rétablir la paix en Allemagne de concert avec l'Angleterre; que la pacification de l'Allemagne pourrait être la planche, faite pour nous conduire à une paix générale, sur quoi je voulais donner certaines matières à milord Harrington pour qu'il veuille amicalement et comme homme routine dans les affaires d'État, y réfléchir et m'en indiquer, par ses lumières, ses sentiments; savoir que je ne vois pas pourquoi on ne peut pas établir une alternative: ou bien de laisser Fumes au roi de France en démolissant Dunkerque, ou bien de souffrir que le roi de France relèverait les fortifications de Dunkerque moyennant quoi il rendrait les conquêtes qu'il avait faites en Flandre; que l'article qui regardait l'Espagne serait sans contredit plus difficile, mais que je ne croyais pas la difficulté insurmontable; que la grande affaire était le commerce des Anglais, et qu'il me semblait qu'on pourrait s'accorder là-dessus de façon que l'Angleterre s'employât à faire céder la Savoie et la comté de Nice à l'infant Philippe, ou si on ne trouvait pas que cette cession leur convînt, qu'on accommodât l'infant du Parmesan et du Plaisantin, moyennant quoi l'Espagne continuerait le commerce et les octrois des Anglais pour un nombre d'années dont on pourrait convenir.

Que je soumettais tout cela à la considération du lord Harrington,<23> et le priais de m'en dire en ami ses sentiments, me persuadant, encore, qu'il n'en ferait jamais un mauvais usage, et que, si même il rejetait ces idées, il n'en parlerait jamais à personne.

Quant à vous, je veux bien vous dire pour votre direction que vous devez insister bien plus sur la pacification d'Allemagne que sur tout le reste, puisque celle-là m'est l'article le plus important. Vous insinuerez, pourtant, toujours que l'article sine qua non serait toujours de tirer l'Empereur de ses embarras.

Après cela, je veux bien vous dire confidemment que je n'accrocherai point l'ouvrage de la paix par mes propres intérêts, mais que, si je puis faire mes affaires en temps, cela me serait bien agréable, et que, si vous me servez bien et à mon souhait dans cette occasion par votre adresse et habileté reconnue, je ne vous augmenterai pas seulement votre pension, mais récompenserai encore votre fidélité d'une manière distinguée.

J'attends sur tout cela votre rapport détaillé au plus tôt possible.

Et sur cela, je prie Dieu etc.

Federic.

Nach der Ausfertigung.



21-1 Das Bisherige ist im Concept von der Hand von Podewils, das Folgende von der Eîchels.