<192> le change et de m'induire à quelque démarche de vivacité que les Autrichiens auraient l'avantage d'interpréter comme rupture de la paix. D'un autre côté, les troupes russiennes se séparent, et leur dislocation les éloigne de cinq cents milles d'Allemagne les uns des autres: est-ce là le moment favorable pour faire agir la cour de Vienne? Les troupes qu'ils font marcher en Bohême font, tout au plus, 12,000 hommes : est-ce une armée faite pour m'attaquer, lorsqu'ils n'ont pu gagner sur moi un pouce de terre en agissant avec 80,000 hommes? Si la paix se fait, elle sera générale; on sait pour sûr et certain que le roi d'Espagne ne se séparera point de la France. Dans cette paix générale, j'aurai la garantie de toutes les parties belligérantes : croyez-vous que la reine de Hongrie vienne m'attaquer après la conclusion d'une pareille paix? Dites-moi vos sentiments sur ce que dessus, et entrez dans quelque détail de raisonnement.

Les cours étrangères ont toutes leurs espions à Berlin, qu'elles se sont attachés par corruption; il est nécessaire que j'en aie à Vienne et il faut que vous fassiez jouer tous les ressorts imaginables pour trouver deux ou trois ou plus de personnes qui se vendent; pas tant pour me servir à présent qu'en cas qu'une guerre vienne à s'allumer entre moi et la reine de Hongrie. Je serais intentionné de donner une pension à ces gens-là; plus ils sont de haute volée, et plus ils vous sont utiles. Je donnerais bien deux à trois mille écus de pension à un homme qui pourrait me servir en ce genre; employez toute votre adresse et votre savoir-faire pour me procurer une pareille connaissance. Vous sentez vous-même que c'est le moyen le plus sûr pour être informé des projets de mes ennemis, et, en temps de guerre, des ordres qu'on donne aux armées et des projets de campagne qu'on veut leur faire exécuter.

Je sens toutes les difficultés que vous trouverez pour me servir, mais, comme je connais vos talents, je ne crois rien d'impossible dès que vous voulez bien vous en mêler; d'ailleurs, je vous ordonne de rehausser le ton et de parler plus fièrement, à mesure que les mauvaises intentions de la cour se découvrent, pour leur faire sentir qu'on ne les craint point.

Federic.

Ces oracles sont plus sûrs que ceux de Calchas.

Nach dem eigenhändigen Concept. Das Datum ergiebt sich aus Nr. 2351. Der Zusatz nur in der Ausfertigung, Potsdam 23. September.


2351. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BERLIN

Potsdam, 23 septembre 1746.

Monsieur de Podewils. J'ai vu par votre lettre le soin avec lequel vous allez expédier mes dépêches pour Andrié; j'en ai fait hier une très ample à votre neveu pour Vienne, dans laquelle je lui fais toutes les