<193> objections que je puis imaginer contre le raisonnement erroné de la cour de Vienne, qui quitterait les Français pour me faire la guerre sans raison et sans sujet; je l'ai informé de la rétrogradation des troupes russiennes, ce qui fait paraître la conduite de la cour de Vienne encore plus singulière. C'est une disparate, et je ne conçois pas que cette cour, après avoir mis fin à la guerre qu'elle a contre la France, malgré la garantie des Anglais revînt contre la paix de Dresde et m'attaquât sans alliés. Dans le fond, je crois qu'il y a beaucoup d'ostentation et d'impertinence dans la conduite des Autrichiens, mais pas un dessein formé de m'attaquer; ils veulent flatter leur fierté, et ils se croiraient au comble de leur bonheur, s'ils pouvaient m'intimider. Malgré tout cela, il faut agir comme si Hannibal était ad portas, et se ressouvenir que la vigilance est la mère de la sûreté. Sur quoi, je prie Dieu, Monsieur le Comte, de vous avoir en sa sainte garde.

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.


2352. AU MINISTRE D'ÉTAT BARON DE MARDEFELD A SAINT-PÉTERSBOURG.

Potsdam, 26 septembre 1746.

Votre relation en date du 10 de ce mois m'est bien parvenue, et c'est avec bien de la satisfaction que j'en ai appris le pli avantageux que mes affaires commencent à prendre là où vous êtes. Vous devez faire un compliment fort obligeant en mon nom au comte de Woronzow et le fort remercier des premières marques qu'il vient de me donner de son amitié. Outre cela, je vous ordonne expressément de l'assurer de ma part de la manière la plus forte, la plus positive et la plus sérieuse, que je n'avais absolument point formé quelque dessein, ni contre l'Imperatrice-Reine, ni contre la Pologne, ni contre qui que se soit de mes voisins, et que j'étais plutôt fermement résolu de vivre en paix et en bonne intelligence avec eux. Cependant, si contre toute mon attente et même contre toute l'apparence le cas devait jamais exister où je me verrais forcé à quelque démarche de vigueur, je priais M. le comte de Woronzow d'être assuré que j'avais tant de confiance en son amitié, en ses lumières et en sa dextérité, que je n'entreprendrai rien alors, sans l'avoir consulté préalablement là-dessus et sans m'être avisé avec lui, et que c'était sur quoi il pouvait compter fermement. Au surplus, vous devez tâcher de bien fortifier ledit comte dans les sentiments amiables qu'il a pour moi, et l'assurer que, quand même j'enverrais un autre ministre que vous à Pétersbourg, celui-ci ne s'attacherait à quelque autre qu'à lui, et qu'il aurait tous les égards pour ses avis. Quant à vous, il faut que je vous dise que, malgré tout le bon accueil que le comte de Woronzow vous fait, je ne crois pas qu'il sera à propos que vous continuiez plus longtemps votre séjour à Péters-