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J'apprends de mon ministre à la cour de Saxe que, s'étant entretenu avant son départ de Varsovie avec l'ambassadeur de France, pour apprendre de lui s'il gagnait du terrain dans sa négociation et s'il voyait jour qu'à l'occasion du mariage il pourrait espérer de détacher la cour de Saxe de celles de Vienne et de Pétersbourg, l'ambassadeur lui avait répondu qu'il n'avait pas gagné une pouce, que les expressions du comte de Brühl étaient choisies, mais si générales que jusqu'au moment présent il ne se flattait du moindre changement; qu'à l'égard de l'Empire ce ministre s'expliquait toujours d'une façon à pouvoir se flatter qu'on garderait une exacte neutralité; que d'ailleurs ce ministre l'entretenait souvent sur son désintéressement, lui faisant entendre que ni le roi de France, tout-puissant qu'il était, ni aucune puissance ne serait capable de le séduire. Il est aisé de voir par là que la France, malgré le mariage du Dauphin, n'empêchera pas ce ministre de suivre son ancien système et ne gagnera aucune supériorité à la cour de Dresde au point de la détacher de celles de Vienne et de Pétersbourg, à moins que la France ne tâche à culbuter le comte de Brühl, à quoi il faudrait que les ministres de France pensassent sérieusement. Vous devez insinuer tout cela au marquis d'Argenson, au premier tête-à-tête que vous aurez avec lui entre quatre yeux.

Federic.

Nach dem Concept.


2461. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE, A VIENNE.

Berlin, 17 décembre 1746.

Quand aux difficultés que vous croyez qu'il y a pour avoir de bons avis au sujet du caractère de l'Empereur et de l'Impératrice,1 il faut que je vous dise que, dans une ville telle que Vienne, on ne saurait guère manquer d'avoir par ci par là tant de traits du caractère de l'Empereur et de l'Impératric qu'en les notant et les ramassant tous, on en saura toujours faire quelque chose d'assez juste. Au reste, il ne me suffit pas d'avoir seulement les portraits de l'Empereur et de l'Impératrice-Reine, mais je désire encore d'avoir ceux de leurs ministres et généraux, comme de tous ceux qui ont part aux affaires.

Je suis persuadé que la cour de Vienne cachera, autant qu'elle pourra, ce qui lui revient des affaires de Turquie, mais pourvu que vous continuiez à être bien attentif, vous découvrirez à la fin toujours quelque chose; et une marque peu équivoque qu'il s'y passe quelque chose, sera, lorsque vous apprendrez qu'on envoie des officiers en Hongrie. D'ailleurs, plus ils seront civils et polis envers nous, plus on pourra croire qu'ils appréhendent quelque chose de sinistre de ce côté-là.



1 Vergl. S. 91. 247.