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2520. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A DRESDE.

Potsdam, 4 février 1747.

J'ai bien reçu votre dépêche du 31 du janvier passé. Quant à l'affaire du renouvellement des pactes de confraternité, vous aurez vu, par la dernière dépêche que je vous ai faite à ce sujet, toutes les difficultés qu'on rencontrerait, si l'on voulût les mettre d'abord pour base de mes nouvelles liaisons avec la Saxe; et comme je vous ai en même temps assez amplement instruit sur un autre biais que vous devez prendre, en proposant au comte de Brühl un traité préalable d'amitié et de garantie réciproque, en attendant qu'on puisse se concerter sur le renouvellement des pactes de confraternité, je vous renvoie à tout ce que je vous ai dit à ce sujet dans ma dépêche susmentionnée. Cependant les particularités dont vous m'avez rendu compte par votre dépêche précédente, sur la grande méfiance que le comte de Brühl continue d'avoir contre moi, et sur la crainte qu'il a d'être sacrifié si jamais je réussis à m'attacher la Saxe, ne me laissent pas augurer beaucoup de bien de cette négociation-ci, et il me paraît d'ailleurs que, si ce ministre penchait à faire constater cette alliance, il aurait mis d'abord les fers au feu pendant que le duc de Richelieu était encore à Dresde, pour s'en faire un mérite auprès de la France. J'avoue qu'une alliance avec la Saxe, faite sur le pied que je vous en ai instruit, me ferait plaisir et me conviendrait à plusieurs égards; mais je présume toujours que le comte de Brühl ne voudra pas la goûter et fera naître tant d'incidents là-dessus que toute la négociation n'aboutira à rien. Malgré cela, je hasarderai encore une tentative. Mais comme il me paraît que plus j'en rechercherai le ministre, plus il s'y roidira, s'imaginant peut-être que tout mon salut dépend de cette alliance, je suis d'avis qu'il sera toujours mieux qu'avant que d'entamer solennellement cette négociation, vous en parliez préalablement au comte de Brühl comme d'une idée particulière qui vous était venue par le grand désir que vous sentiez à voir rapatriées les deux maisons. De cette façon-là, vous le ferez s'expliquer sans que j'y paraisse d'abord et sans que je sois exposé à quelque refus désagréable. Je me remets en tout celà à votre prudence et à votre dextérité.

Quant aux déserteurs des miliciens qui, à ce que vous me mandez, remplissent à leur retour le pays de toutes sortes de mensonges sur le traitement qu'on leur a fait, mon intention est que vous n'en devez porter aucune plainte, mais faire semblant plutôt comme si vous n'en avez aucune connaissance.

Au surplus, je ne présume pas qu'il y ait quelque chose d'arrêté par les cours de France et de Dresde relativement à de certaines convenances pour la dernière; je suis, au contraire, de l'opinion que les ministres saxons n'ont fait qu'à amuser les Français et qu'à les tromper.