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2610. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A DRESDE.

Potsdam, 22 avril 1747.

Les dépêches que vous m'avez faites en date du 15, du 18 et du 19 de ce mois, m'ont été bien rendues. Quoique je ne saurais regarder les démonstrations de la Russie que comme des ostentations pour me tenir en échec, afin de ne rien entreprendre en faveur de la France, et pour que la reine de Hongrie ait les bras d'autant plus libres pour pousser vigoureusement et de toutes ses forces la guerre contre la France, et que d'ailleurs la Russie n'ait ni motifs ni raisons à se commettre avec moi, cependant, comme le comte de Brühl continue à s'expliquer d'une façon assez vague et équivoque à l'ambassadeur de France en l'assurant que les Russes ne passeraient point dans l'Empire, je souhaiterais bien que vous puissiez habilement disposer l'Ambassadeur pour faire s'expliquer plus clairement le comte de Brühl sur les desseins des Russes, et où donc ils pensaient d'employer les troupes qu'on tenait prêtes à marcher, si c'est aux Pays-Bas ou quelque autre part qu'on les veut envoyer. Je dois vous avertir à cette occasion qu'il m'est revenu d'assez bon lieu qu'un ministre autrichien a déclaré à un de ses confidents qu'il n'était rien de plus certain et de plus décidé que la marche d'un corps de 30,000 Russes au secours de la reine de Hongrie contre la France, et que c'était principalement à cette fin que le parlement d'Angleterre avait accordé au roi d'Angleterre un subside extraordinaire de 500,000 livres sterling, sous le titre de le mettre par là en état de pousser la guerre vigoureusement et de satisfaire aux engagements qu'il avait pris ou qu'il prendrait avec ses alliés.

Vous agirez de même avec le vice-chancelier de Pologne1 et tâcherez habilement de l'employer pour faire s'expliquer le comte de Brühl à ce sujet; vous tournerez d'ailleurs ce vice-chancelier de différentes façons pour savoir s'il est possible [d'apprendre] au juste de lui les desseins qu'on couve, et qui apparemment l'ont fait tant soupirer lorsque vous vous êtes entretenu la dernière fois avec lui. Enfin, vous tâchetez autant que vous pourrez à démêler ce mystère, et si peut-être les ministres de Dresde couvent encore quelque mauvais dessein contre moi, dont ils pourront cependant se trouver fort mal. Quant au mémoire relativement aux ordonnances que j'ai été obligé de donner aux officiers saxons dans mes États,2 je ne vois pas ce qui doit vous empêcher de le présenter, la chose ne pouvant être cachée aux ministres saxons, après la déclaration que vous en avez déjà faite au comte de Hennicke; au moins vous auriez dû vous expliquer sur les inconvénients que vous trouvez en présentant ce mémoire.

Je ne refuserais pas au lieutenant Swiniarski la permission demandée du Vice-Chancelier,3 si ce n'était justement à présent le temps où les



1 Wodzicki.

2 Vergl. S. 329.

3 Zu einer Urlaubsreise nach Polen.