<453> plus en état de faire communiquer à la France les avis qui me venaient relatifs à ses intérêts. J'ajoute encore que, quand vous me ferez votre réponse au sujet de tout ceci, vous ne la devez adresser qu'à moi immédiatement, sans en envoyer un double à mes ministres du département des affaires étrangères, et sans en faire mention dans aucune de vos relations ordinaires, parcequ'ils ignorent absolument cette affaire, et que le secret n'en est qu'entre mes mains.

Pour venir donc au fait, je vous dirai, premièrement, que je viens d'apprendre dans le plus grand secret que la cour de Vienne a trouvé moyen d'ouvrir ou d'avoir communiquées plusieurs lettres que le marquis de Puyzieulx a écrites à différentes fois au marquis de Valory, à des Issarts à Dresde, et au sieur d'Aillon à Pétersbourg, et qu'outre celleslà elle a encore en mains les copies de différentes relations que les ministres ci-nommés ont faites au marquis de Puyzieulx. Entre plusieurs de ces lettres-là, il y en a de ce ministre au marquis de Valory du 4, du 15 et du 29 du mai dernier, avec une de la même date au sieur Aillon, et encore des relations du marquis des Issarts du 14 et du 20 de mai et du marquis de Valory du 13 et du 20 dudit mois, toutes au marquis de Puyzieulx, qui paraissent être assez importantes. Comme ce ministre est à même de savoir au juste ce qui en est, vous ne lui marquerez tout ceci que pour qu'il puisse prendre mieux ses sûretés à cet égard, en lui demandant toujours un secret impénétrable sur ces avis, et qu'il n'en fasse rien apercevoir à qui que ce puisse être.

Quant au système que la cour de Vienne s'est maintenant formé à suivre, voici ce que j'en ai appris d'une manière que je puis y tabler. Cette cour, ne voyant aucun jour de pouvoir jamais me détacher de la France, veut prendre le contrepied et mettre présentement tout en œuvre encore, pas des voies directes et obliques, pour détacher la France de moi; elle compte cet article pour le plus important et le plus salutaire pour elle et qu'elle ne doit négliger en aucune occasion qui s'y offrira, puisqu'elle comprend bien qu'aussi longtemps que la France et moi resteront bien unis, elle ne saura jamais réussir dans ses grandes vues. Elle se flatte même d'y pouvoir réussir, surtout en un temps où la France se lassera du fardeau de la guerre présente, et ladite cour ne laisse pas de compter beaucoup à ce sujet sur le comte de Brühl, de qui elle espère encore d'être bien aidée dans ce propos, quoiqu'elle soit à présent assez mécontente de lui de ce que, selon elle, il penche maintenant trop du côté des Français, parcequ'il n'a pas voulu porter le Roi son maître d'accéder sans condition, et sans lui faire de nouvelles convenances, au dernier traité conclu entre la Russie et la reine de Hongrie.

Pour parvenir donc à ce grand but, la cour de Vienne veut se servir des moyens suivants &160;: d'un côté, elle prétend me donner toutes inquiétudes possibles sur une négociation secrète avec la France, touchant sa réconciliation prochaine avec elle; d'un autre côté, elle veut faire entretenir le marquis de Valory dans des soupçons contre moi, en lui