2543. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BERLIN.

Potsdam, 22 février 1747.

Mon cher Podewils J'ai lu les informations que le baron de Mardefeld vient de fournir par écrit sur les différents caractères des personnes de la cour de Russie,328-3 et que je vous ai fait renvoyer d'abord. Elles sont fort instructives, mais toujours si importantes qu'elles demandent absolument le secret; ainsi, vous avez bien fait de ne les avoir confiées à personne pour les copier, et j'approuve fort que vous ne les communiquiez qu'au comte de Finckenstein, pour qu'il en tire une copie de sa main propre et qu'il vous rende, après, l'original, que vous aurez soin de cacheter alors et de faire garder dans les archives secrètes.

Puisque vous désirez encore savoir mes sentiments touchant l'invitation à faire à l'impératrice de Russie pour accéder à l'alliance à conclure entre moi et la Suède, je m'en vais vous dire qu'il y a plusieurs raisons, qui importent également à moi autant qu'à la Suède, pourquoi je suis d'opinion qu'on ne doit point omettre de faire cette invitation-là, parceque

1° Ce n'est qu'une simple politesse ou un compliment qu'on fait;

2° On convaincra par là l'Impératrice qu'il n'y a rien de préjudiciable à elle de stipulé dans cette alliance, puisqu'autrement l'on éviterait bien de l'inviter d'accéder à un traité où il s'agirait de choses contraires à ses intérêts;

3° L'affaire est sans conséquence, parcequ'on peut-être assuré que la cour de Pétersbourg ne s'y prêtera jamais; au lieu que, si nous omettions cette formalité, les ennemis que nous avons à cette cour ne

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manqueraient pas d'habiller à toutes les cours étrangères cette alliance de ligue et de complot contre la Russie et tâcheraient d'en former un prétexte pour tomber ou sur la Suède ou sur moi; ce que l'on préviendra probablement par la démarche que je désire. Quant à la France, je ne saurais me persuader qu'elle voudrait se montrer sensible sur une démarche tout-à-fait innocente et où il ne s'agit que d'une pure grimace, sans mettre aucun obstacle à l'accession de la France.329-1 Et sur cela, je prie Dieu etc.

Federic.

Nach der Ausfertigung.



328-3 Vergl. S. 294.

329-1 Vergl. S. 324.