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Je puis vous dire avec ouverture, quoiqu'en confidence, que tous les points sur lesquels doit s'être énoncé de la susdite manière le sieur Legge, sont absolument faux et contiennent des choses qui ne me sont jamais venues en pensée. J'en juge que peut-être la cour de Vienne, par l'habitude qu'elle s'est acquise de forger des mensonges et des faussetés, pour les donner ensuite pour choses vraies à d'autres, a fabriqué elle-même les imputations en question, lesquelles elle aura ensuite trouvé moyen de donner comme évangile au roi d'Angleterre et au duc de Newcastle, et que celui-ci en aura imposé conséquemment au sieur Legge.

Quoi qu'il en soit, j'ai bien voulu vous en avertir, afin que, sans vous faire observer le moins du monde, vous tâchiez de faire des découvertes là-dessus et d'approfondir ainsi davantage si en effet la façon de penser du roi d'Angleterre et du duc de Newcastle y a du rapport, et quelles peuvent être proprement leurs vues. Vous m'avertirez de ce que vous en saurez.

Au reste, le chevalier Legge n'a point encore donné de signe de vie après son retour ici; je ne m'en tiendrai pas moins tranquille pour cela à son égard, pour le voir venir.

Federic.

Nach dem Concept.


3200. PRÉCIS DE LA LETTRE QUE J'AI FAITE AU SIEUR ANDRIÉ POUR LA LIRE AU CHEVALIER LEGGE, CEPENDANT SANS LUI DONNER COPIE.

[août 1748].

Que je le remerciais de bon cœur de tout ce qu'il venait de dire à lui, Andrié, par rapport aux compliments dont le Roi son maître l'avait chargé de me faire en son nom, mais que je savais que les Autrichiens faisaient aussi bien à Berlin et en Angleterre de certaines insinuations contre moi. Et, pour que M. Legge ne crût point que je voulusse lui en imposer, j'étais bien aise de lui dire en quoi tout cela consistait : que les Autrichiens m'attribuaient malicieusement et malignement d'être d'intelligence avec le maréchal comte de Saxe et d'intriguer en France pour y rallumer le feu de la guerre; qu'en conséquence de cela les ministres autrichiens avaient ordre d'amplifier les moindres de mes démarches, et que, comme il était d'usage ici de faire toujours des arrangements militaires, ils ne manquaient pas d'user de cela pour insinuer à mes voisins toutes sortes de soupçons et de donner à mes intentions les interprétations les plus malignes; que moi de mon côté, j'allais toujours mon grand chemin et que je ne me souciais que très peu de tous ces bruits calomnieux qu'ils ne cessaient de répandre contre moi et que l'événement détruisait toujours; mais que je n'en savais pas moins, à n'en pouvoir point douter, que Sa Majesté Britannique croyait de n'avoir des ménagements pour moi que dans l'intention de me tenir